Intervention de Pascal Clément

Réunion du 11 mai 2006 à 10h00
Respect effectif des droits de l'homme en france — Discussion d'une question orale avec débat

Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord rendre hommage à votre assemblée pour l'intérêt qu'elle porte aux questions pénitentiaires. En effet, je le rappelle, le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, publié en 2000, avait marqué le début d'une prise de conscience sur la situation trop souvent inacceptable dans nos établissements pénitentiaires. En outre, voilà quelques mois, j'avais répondu à l'invitation de la commission des finances de votre assemblée pour débattre de la détention et, d'une manière générale, du problème de nos prisons.

Aujourd'hui, je tiens à saluer le groupe d'études des droits de l'homme du Sénat et notamment son président, M. Jacques Pelletier, qui est à l'origine du débat qui nous réunit ce matin.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la situation est bien connue : le rapport de l'ancien commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe M. Álvaro Gil-Robles, qui a été souvent cité, fait donc suite aux rapports des commissions d'enquête du Sénat et de l'Assemblée nationale, au livre du docteur Vasseur, mais aussi à d'autres avertissements que la société française n'avait pas manqué de lancer. Il a été publié après l'alternance politique que notre pays a connue en 2002, plus précisément après le vote de la loi d'orientation et de programmation pour la justice.

Or les commentaires sur ce rapport ont laissé croire que nous n'avions rien fait depuis 2000, depuis le premier constat établi par la Haute Assemblée. Devant de telles inexactitudes, j'ai réagi fortement, m'exprimant au nom de la France, et pas seulement au nom d'un camp partisan, pour affirmer que nous avions pris toute la mesure du problème. Cette prise de conscience a d'ailleurs débouché sur la loi d'orientation et de programmation pour la justice et sur la création de 13 200 places de prisons, qui sont actuellement en construction. Ainsi, dès 2007, nous disposerons de sept établissements pour mineurs, d'une capacité de soixante places chacun, ce qui constituera une bonne base de départ pour tenter de résoudre le problème de la délinquance des jeunes.

En définitive, le constat repris par tous exigeait une réponse vigoureuse du Gouvernement. C'est tout à l'honneur de la majorité actuelle d'avoir agi comme elle l'a fait.

Je tiens tout de suite à rectifier une erreur matérielle. Certains d'entre vous ont considéré qu'il n'était peut-être pas opportun d'être chicanier et de répondre point par point à toutes les assertions de M. Gil-Robles. Je ne vais certes pas faire un procès au commissaire du Conseil de l'Europe que j'ai eu l'occasion de rencontrer et à qui j'ai exprimé personnellement tout mon respect. D'ailleurs, dans cette affaire, il n'est pas le seul responsable : son travail n'aurait pas eu un tel écho s'il n'avait pas été suivi d'une quantité de commentaires plus ou moins objectifs.

Cela étant, je tiens à souligner, disais-je, une erreur qu'il a commise, car elle est tout de même fondamentale. En effet, M. Gil-Robles affirme que le budget de la justice représente, en France, 1 % du budget de l'État. Vous-même, monsieur Pelletier, vous vous êtes également trompé, quoique moins gravement, en déclarant que celui-ci s'établissait à 1, 73 %. En réalité, le pourcentage exact est 2, 16 %. §Madame la sénatrice, entre 1 % et 2, 16 %, il y a plus que du simple au double ! Dans ces conditions, nous expliquer que la situation française n'aurait pas changé depuis l'an 2000 est véritablement malhonnête !

Serait-ce une simple faute de plume ? Si certains commentateurs ne s'étaient pas fondés sur ce taux pour démontrer que la situation française était calamiteuse, j'aurais volontiers oublié cette erreur, qui aurait effectivement pu alors être considérée comme une erreur matérielle. Tel n'est malheureusement pas le cas : sur cette fausse information, les commentateurs se sont appuyés pour en déduire des conséquences fallacieuses.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il ne s'agit pas pour moi d'affirmer que tout est bien dans le meilleur des mondes. Vous le savez, je ne le pense pas, je l'ai déjà dit ici. Pour autant, je n'accepte pas que ceux qui n'ont rien fait auparavant nous intentent un faux procès, en s'efforçant de faire oublier le formidable effort politique qui est réalisé depuis trois ans !

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