Le retard pris par rapport aux objectifs initiaux s'observe pour toutes les phases de mise en oeuvre du projet.
D'abord, je constate que tous les décrets d'application prévus par la loi du 13 août 2004 ne sont pas parus : seul le décret relatif aux hébergeurs a été publié le 4 janvier 2006. À quelle échéance, monsieur le ministre, pensez-vous publier les autres décrets ?
Ensuite, le lancement des expérimentations a également pris du retard : la phase dite d'hébergement, destinée à permettre le déploiement expérimental de 5 000 dossiers par hébergeur, soit un total de 30 000 dossiers, devait s'achever le 31 mars 2006. À l'heure actuelle, cette phase devrait, au mieux, débuter en juin pour s'achever en décembre 2006. On est donc très loin des propos tenus dans cette enceinte par votre collègue Philippe Bas lors de l'examen du PLFSS 2006. Je le cite : « notre intention, pour l'année 2006, est de réaliser des essais grandeur nature en développant ce qui est en germe à partir des expériences déjà réalisées en France. L'objectif à atteindre est ambitieux : trois millions de dossiers médicaux personnels en 2006. ».
Qui plus est, je m'interroge sur la pertinence et la viabilité de ces expérimentations dans la mesure où un revirement stratégique a été défini par le GIP le 5 mai dernier. Le GIP reprend le concept de « colonne vertébrale » développé par les Britanniques, à savoir la désignation, par appel d'offres, d'un hébergeur unique de référence assurant l'interopérabilité entre les six autres hébergeurs industriels et la mise en place d'un portail Internet unique d'accès géré par la Caisse des dépôts et consignations.
Quelle est la véritable raison de ce revirement stratégique puisque l'interopérabilité était bien garantie par le cahier des charges initial préfigurant les expérimentations ? Celles-ci débutant avant la mise en place de cet hébergeur de référence, quels enseignements utiles pourraient en être tirés ? Aura-t-on le temps de faire un bilan de ces expérimentations avant le lancement de la phase de généralisation ? Je ne le crois pas.
Je ne suis d'ailleurs pas le seul à me poser ces questions : en effet, plusieurs industriels engagés dans ce projet m'ont fait part de leurs doutes, voire de leur démobilisation, ce qui est plus grave, en raison du peu d'intérêt suscité aujourd'hui, au sein de la direction du GIP, par les expérimentations.
Ces industriels ont investi de l'argent et se sont mobilisés pour faire vivre ce projet. Aujourd'hui, on leur apprend que la généralisation doit être privilégiée, à court terme, et qu'ils seront chapeautés par un organisme public, dont le rôle reste d'ailleurs à préciser.
Monsieur le ministre, prenez garde que ces industriels ne se désengagent du projet. Vous ne pouvez pas demander à des industriels de continuer à perdre de l'argent et ne pas leur dire ce que vous attendez d'eux.