Intervention de Éric Woerth

Réunion du 24 juillet 2007 à 10h00
Orientation budgétaire — Débat sur une déclaration du gouvernement

Éric Woerth, ministre :

Cette situation de déficit structurel est grave et inacceptable.

La sécurité sociale est au fondement de notre pacte social : sa fragilisation financière exige que nous nous penchions tous ensemble sur son avenir et sur les solutions à trouver plutôt que de regarder en arrière et de nous perdre une nouvelle fois en de vaines querelles de responsabilité.

La maîtrise des finances sociales est un exercice très difficile. Tous ceux qui s'y sont essayés peuvent en témoigner. Ce n'est donc pas la peine de donner des leçons.

C'est un véritable travail de Sisyphe, sans cesse à refaire, qui demande du courage et de la ténacité.

Il n'y a pas de réforme miracle. Nous devons nous atteler de nouveau à la tâche et fournir un effort continu, quotidien, sans relâche, pour parvenir à mieux réguler les dépenses d'assurance maladie et à nous donner les moyens de financer de nouveaux besoins, qui apparaissent très vite.

Le retour à l'équilibre doit être un impératif absolu, un impératif financier autant qu'un impératif de responsabilité. Il s'agit d'un impératif moral. Mettons-nous à la place des générations à venir : que dirions-nous si nous avions à rembourser les dettes de nos aînés ?

J'en viens maintenant à la stratégie du Gouvernement pour la législature qui s'ouvre.

Notre objectif est de revenir dès que possible, et en tout état de cause avant 2012, à une dette inférieure à 60 % du PIB et à un solde public équilibré.

Cette stratégie volontariste s'appuie sur deux piliers, que j'ai déjà mentionnés : des mesures fiscales ambitieuses, qui revalorisent le travail et vont créer un choc de confiance permettant de relancer durablement la croissance, seule créatrice de richesses ; une maîtrise sans précédent de la dépense publique, qui participera tout autant au rétablissement de la confiance en permettant de réduire la dette, d'améliorer l'efficacité des services publics et de préserver la solidarité juste et nécessaire entre les générations.

La clé de l'assainissement des finances publiques réside donc - la répétition a de la vertu - dans la maîtrise de la dépense.

Pour réussir, il faut plusieurs conditions : cette maîtrise doit être partagée par l'ensemble des acteurs ; elle ne doit souffrir aucun report ; elle doit s'inscrire dans la durée.

L'objectif que nous nous sommes fixé pour la législature, c'est, je le disais en introduction de mon propos, de diviser par deux la progression de la dépense publique par rapport aux tendances passées.

Cela correspond à une évolution moyenne légèrement supérieure à 1 % par an en volume sur l'ensemble de la sphère publique - État, sécurité sociale, collectivités territoriales -, contre une évolution en moyenne de 2, 25 % sur les dix dernières années.

J'ai bien conscience que c'est un effort difficile et sans précédent à fournir.

Cet effort doit permettre, dès 2008, d'amorcer une baisse du déficit. Un ralentissement de la croissance de la dépense publique à hauteur d'un point représente près de 10 milliards d'euros de dépenses en moins dès 2008 par rapport aux années passées.

L'effort que nous ferons sur la dépense est ainsi du même ordre que le choc fiscal en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. Il permettra même de poursuivre une légère baisse du déficit public en 2008 par rapport à 2007, comme s'y est engagé le Président de la République.

Dès 2009, la maîtrise de la dépense nous engagera sur la voie d'une trajectoire de désendettement plus rapide. Son rythme dépendra néanmoins de la croissance du produit intérieur brut.

Si cette croissance est au rendez-vous et atteint 3 %, le double objectif d'une dette inférieure à 60 % du PIB et d'un équilibre des finances publiques pourra être atteint beaucoup plus rapidement.

Sinon, il sera atteint au plus tard en 2012 - c'est l'engagement du Président de la République à l'égard de nos partenaires européens -, pour peu que la croissance atteigne 2, 25 %.

Dès que nous dépasserons 2, 25 % de croissance par rapport à la norme de dépenses fixée, l'objectif de réduire le déficit et le taux d'endettement sera atteint avant 2012.

Ces scénarios sont fondés sur le respect de la norme de dépenses pour l'État, sur des prévisions de recettes prudentes, sur l'affectation des plus-values au désendettement, et, plus généralement, sur une maîtrise générale de la dépense publique.

Tous les acteurs devront s'impliquer si nous voulons parvenir à atteindre cet objectif.

S'agissant de l'État, une norme « zéro volume » au plus, c'est-à-dire une hausse qui ne devra pas excéder le taux d'inflation, s'appliquera sur un périmètre élargi, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, puisqu'il inclura les prélèvements sur recettes, notamment ceux qui sont destinés aux collectivités locales.

Cette norme élargie est un objectif ambitieux, qui n'a jamais été demandé à l'État jusqu'à présent.

Nous devons, en outre, prendre en compte le fait que l'évolution des dépenses inéluctables - charge de la dette et pensions - est désormais malheureusement défavorable : la remontée des taux d'intérêt fait croître la charge de la dette, qui était quasiment stable depuis quatre ans. Les pensions, quant à elles, progressent fortement en raison du choc démographique majeur que connaît la fonction publique.

L'effort sur les autres dépenses devra donc en tenir compte et être encore plus exigeant. Il devra être perceptible dès le budget de 2008.

Je sais que ce sera une tâche difficile par nature : les entretiens que j'ai eus avec chacun de mes collègues m'ont confirmé que l'objectif de 0 % en volume nécessite, de la part de chaque ministre, une discipline très stricte en matière de gestion des effectifs comme en matière d'efficacité des dépenses d'intervention.

En ce qui concerne les administrations de sécurité sociale, elles bénéficieront de la nouvelle démarche que nous avons lancée pour une meilleure maîtrise des dépenses de santé ainsi que du dynamisme des rentrées de cotisations grâce à la poursuite prévisible de l'amélioration de la situation de l'emploi.

En moyenne, la croissance de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, devra être au plus de 2 % en volume sur la période, ce qui représente environ 3, 5 % en euros courants.

C'est également un objectif ambitieux, qui implique que le Gouvernement examine et renforce dès maintenant les leviers de la maîtrise médicalisée avec l'ensemble des acteurs.

C'est aussi un objectif réaliste - supérieur du reste à celui qui avait été assigné en 2007 -, car il est inutile d'afficher des cibles impossibles à atteindre. De telles cibles ne sont plus crédibles pour les acteurs de la dépense de santé et perdent d'emblée toute signification.

L'instauration de la franchise devrait, quant à elle, permettre de financer les nouveaux besoins.

La maîtrise des dépenses d'assurance maladie s'impose d'autant plus que nous devons faire face à la dégradation des comptes de la branche vieillesse.

Un rendez-vous a été fixé en 2008 afin de poursuivre la démarche engagée en 2003 et de programmer la réforme des régimes spéciaux.

Nous devons également renforcer l'emploi des seniors, car c'est la clé de l'équilibre des régimes de retraite par répartition. Le Gouvernement mettra tout en oeuvre pour lever les obstacles financiers, réglementaires et parfois culturels au développement de l'emploi des plus de cinquante-cinq ans.

En ce qui concerne, enfin, la branche famille, ses dépenses devront, elles aussi, participer à l'effort global de maîtrise de la dépense publique.

Les collectivités locales, et je sais combien ce sujet est important pour le Sénat, ne peuvent pas non plus rester à l'écart de cette obligation de maîtrise de la dépense. Personne ne le comprendrait.

Elles devront donc stabiliser leur endettement, en modérant leurs dépenses.

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