Intervention de Joël Labbé

Réunion du 2 juillet 2018 à 14h30
Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire — Article 14 quater AA

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

Nous voici arrivés au cœur du débat sur les pesticides. C’est un sujet essentiel sur lequel, à notre sens, le projet de loi ne va pas assez loin, d’autant que des reculs ont été adoptés par le Sénat : retour sur la loi Labbé, pourtant équilibrée, appliquée sans difficulté sur le terrain, votée très largement au Sénat en 2014 et adoptée par l’Assemblée nationale ; recul sur l’épandage aérien des pesticides, qui n’est plus limité aux produits bio. Pourtant, l’interdiction des épandages aériens avait été l’une des avancées de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Sur ces deux points, on revient en arrière par rapport au droit existant. C’est inadmissible et incompréhensible !

De plus, le texte issu de la commission constitue un recul par rapport à la version adoptée par l’Assemblée nationale, s’agissant de l’extension de l’interdiction des néonicotinoïdes. Pourtant, vous le savez, la situation des abeilles et, donc, des apiculteurs est gravissime. Ce sont tous les pollinisateurs – les abeilles, les oiseaux et la faune – qui sont menacés.

Le texte est également en recul concernant la séparation de la vente et du conseil. Pourtant, les agriculteurs ont tout intérêt à avoir un conseil indépendant. Ils sont même 70 % à le réclamer. Un rapport de l’ANSES souligne un risque de conflit d’intérêts en cas de non-séparation de la vente et du conseil.

Ces mesures vont à contre-courant du sens de l’histoire. Il nous faut préparer l’ère de l’après-pesticide. On doit pouvoir se passer de ces produits dangereux pour la santé, en tout premier lieu la santé des agriculteurs.

Or les systèmes d’évaluation des molécules laissent à désirer. Peu transparents, ils se basent sur des dossiers fournis par les firmes de l’agrochimie. L’affaire des « Monsanto papers » l’a montré : ces études sont volontairement biaisées !

De plus, l’étude des effets chroniques se base uniquement sur la substance active, et non sur le produit avec ses coformulants, alors que ceux-ci se révèlent parfois plus toxiques que la substance active seule.

Dans les dossiers d’autorisation de mise sur le marché, il est considéré que tous les agriculteurs portent des équipements de protection. Nous savons que c’est faux. Et le chiffre selon lequel les équipements de protection réduisent de 90 % les risques d’utilisation des produits n’est absolument pas démontré ; il semble même invalidé par un rapport de l’ANSES, qui a montré que les équipements de protection peuvent même parfois accentuer les risques. Par exemple, si elle est réutilisée, une combinaison de protection peut concentrer les molécules.

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