C’est un sujet qui tient à cœur à beaucoup de parlementaires et à nombre de nos concitoyens. J’ai effectivement précisé l’autre jour que le travail avançait ; je ne parlais pas du fonds d’indemnisation en lui-même, mais de la question de la reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles. C’est le sens de l’action que nous menons.
Je sais le travail que vous avez réalisé, madame la sénatrice, avec Sophie Primas en 2012 sur ces sujets.
Un rapport des inspections générales, qui a été remis en février 2018, préconise d’améliorer la réparation dans le cadre du régime accidents du travail et maladies professionnelles. C’est sur ce point que nous avançons en particulier. Notre objectif est de faciliter la reconnaissance des maladies professionnelles liées aux expositions aux produits pharmaceutiques et, bien sûr, d’améliorer leur prise en charge.
Nous avons souhaité une évaluation scientifique à la fois solide et robuste pour la reconnaissance des maladies professionnelles. Cette mission a été confiée à l’INSERM, en lien avec l’ANSES. Il importe notamment d’actualiser les liens entre les pathologies et les expositions professionnelles aux pesticides. La précédente étude avait compilé les données jusqu’en 2013. Or la connaissance depuis cette date a nettement progressé.
Notre deuxième souhait était de réviser le tableau des maladies professionnelles, afin qu’il prenne en compte les nouvelles données scientifiques depuis 2013. C’est un travail qui a été demandé aux présidents de commission. Il sera remis au plus tard à la fin de l’année 2019.
Nous avons également souhaité harmoniser les décisions de reconnaissance qui ne relèvent pas des tableaux de reconnaissance par les comités régionaux. Ce sera fait d’ici à la fin de l’année 2018. Nous avons voulu entamer une concertation pour améliorer l’indemnisation des exploitants agricoles dont le niveau d’indemnisation est moindre aujourd’hui que pour les salariés agricoles.
En résumé, nous souhaitons améliorer le système d’indemnisation pour les victimes des produits phytopharmaceutiques par le dispositif qui existe aujourd’hui pour les maladies professionnelles. Par ailleurs, nous souhaitons répondre aux besoins réels de simplification du dispositif pour le rendre beaucoup plus accessible. Il s’agit de mettre un terme au parcours du combattant auquel doivent se livrer les personnes touchées par ces maladies professionnelles, les procédures n’ayant jamais été aussi longues. Tout cela va dans le sens des préconisations de la mission que vous aviez conduite avec Mme Primas.
Pourquoi ne créons-nous pas un fonds spécifique, même si nous souhaitons faire en sorte que les victimes des produits phytopharmaceutiques puissent être mieux indemnisées, mieux traitées et qu’elles puissent faire valoir leurs intérêts ?
Votre proposition initiale a été modifiée pour la limiter aux seules personnes dont la maladie a été reconnue comme maladie professionnelle consécutive à l’exposition aux produits phytopharmaceutiques. Vous avez ainsi pris en considération l’une de nos préoccupations – mais ce n’était pas la seule – dans votre amendement de repli n° 560 rectifié bis. Un tel dispositif pose cependant un problème d’équité, parce qu’il ne concerne que les victimes des produits phytopharmaceutiques. Par conséquent, les personnes victimes de maladies professionnelles liées à d’autres causes seraient indemnisées de manière moins favorable. En outre, certaines de ces maladies peuvent être causées par l’exposition à d’autres risques chimiques que des produits phytopharmaceutiques.
Un tel dispositif, qui viserait à la réparation intégrale, exonérerait également les industriels de leurs responsabilités, ce qui ne doit pas être le cas. Cette indemnisation serait opérée sans détermination préalable de responsabilité, et les industriels bénéficieraient, de fait, d’une décharge de responsabilité individuelle contre une prise en charge mutualisée du risque, sachant que les contributions qu’ils peuvent apporter concourent au fonctionnement de l’ANSES, mais pas à la réparation des préjudices.
Je rappelle que des actions de prévention des utilisateurs, mais aussi un réel engagement en faveur d’une réduction des produits phytosanitaires iront dans le sens d’une meilleure reconnaissance et d’une meilleure traçabilité pour celles et ceux qui sont atteints par des maladies ou pathologies liées à l’utilisation ou à l’exposition à des produits phytosanitaires.
Avec Mme la ministre des solidarités et de la santé, nous allons engager un travail pour compléter le tableau des maladies professionnelles, car il est aujourd’hui absolument indispensable de le faire : un certain nombre de pathologies doivent être reconnues comme étant liées à l’exposition à des produits phytosanitaires ; je pense, par exemple, aux lymphomes ou à la maladie de Parkinson.
Tel est le sens de l’action que nous menons. Nous n’employons peut-être pas tout à fait le même chemin que celui que vous préconisez au travers de votre amendement, mais soyez sûre que l’objectif reste parfaitement le même, à savoir déterminer et accompagner les victimes des produits phytopharmaceutiques. Nous continuerons à travailler en ce sens, et vous serez la bienvenue – c’est une invitation que je vous adresse – pour vous joindre à nous sur l’ensemble de ces sujets.
En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements.