Intervention de Christian Poncelet

Réunion du 24 juillet 2007 à 16h00
Éloge funèbre de daniel goulet sénateur de l'orne

Photo de Christian PonceletChristian Poncelet, président :

C'est au Moyen-Orient, à Abou Dhabi, bien loin de son « pays » du Mêle-sur-Sarthe, que notre ami Daniel Goulet a été terrassé, le 25 février dernier, par le mal soudain qui l'a emporté.

Ceux qui ont connu et aimé Daniel Goulet y verront comme un signe. Car Daniel était, tout à la fois, un homme d'enracinement, de conviction et de terrain et un homme d'ouverture, de vision et d'horizons lointains.

Daniel Goulet aimait profondément son « pays » du Mêle-sur-Sarthe, surtout ce territoire situé entre Alençon et Domfront, qui était d'ailleurs aussi celui de son ancienne circonscription de député. Il en connaissait chaque vallon, chaque colline, chaque prairie, chaque bois et chaque carrefour.

Attentif aux autres, il en connaissait les habitants, leurs ressorts profonds, leurs attentes, leurs espoirs, leurs craintes, leurs déceptions aussi. Avec énergie, humanité, imagination et humilité, il a consacré sa vie à défendre l'avenir de ce territoire auquel il était si profondément attaché. Cet avenir, il le voulait harmonieux, dynamique, mais surtout conforme aux équilibres fondamentaux qui constituaient l'aspiration de ses électeurs, mais aussi les siens propres.

Après un engagement militaire courageux en Indochine, au service des valeurs universelles de démocratie et de paix auxquelles il croyait, Daniel Goulet a été professeur, puis, très vite, directeur dans l'enseignement privé. Son dévouement aux autres, son énergie, son intelligence l'ont conduit très jeune à la mairie du Mêle-sur-Sarthe, dont il fut le premier magistrat pendant vingt-quatre années.

Dès 1973, il fut élu député. Il le resta jusqu'à ce qu'il devienne sénateur, en septembre 1992. Tout au long de ces trente-quatre années où il fut l'élu de la Nation, Daniel Goulet se montra un parlementaire actif et respecté. Ses centres d'intérêt et d'action furent éclectiques, mais aussi d'une grande cohérence.

Daniel Goulet considérait comme essentiel à l'harmonie de la France le développement maîtrisé des pays et des paysages multiples et différents qui composent notre territoire.

C'est cette conviction qui le conduisit à devenir l'un des pionniers de la décentralisation et de la régionalisation ; c'est cette conviction qui le conduisit à beaucoup réfléchir et à agir avec détermination pour le maintien des activités dans les zones rurales à faible densité ; c'est cette conviction qui fit de lui l'un des premiers à prôner la coopération directe entre les collectivités locales d'États différents, ce que l'on appellera plus tard la « coopération décentralisée » ; c'est cette conviction qui lui fit consacrer une grande énergie à la lutte contre l'exode rural, à la réorientation de la politique agricole commune, à l'aménagement du territoire et au développement rural, à la préservation éclairée de l'environnement dans nos campagnes, à l'harmonisation et à l'intensification des relations entre ce que l'on appelle communément les deux Normandies ; c'est cette conviction aussi qui fit de lui un acteur efficace du désenclavement de l'Orne et un défenseur déterminé de l'axe autoroutier Calais-Bayonne.

Mais, par-dessus tout, Daniel Goulet était un homme qui aimait les autres.

Rien ne l'intéressait plus que l'examen des situations particulières, parfois difficiles, de ses concitoyens. Avec attention, chaleur et courtoisie, il aimait, en quelque sorte, à les débroussailler, à les démêler, à les clarifier.

Oui, Daniel Goulet aimait aider.

Il aimait être utile aux autres et savait écouter ses interlocuteurs. C'est sans doute la raison pour laquelle, quels que soient les publics auxquels il s'adressait, Daniel Goulet savait capter l'attention, l'intérêt et, très souvent, la sympathie de ses interlocuteurs.

L'empathie et la sympathie que suscitait spontanément Daniel Goulet ne venaient pas de l'art ou de la technique dialectique du politicien habile. Elles venaient tout simplement du coeur et de l'amour des autres, et c'est ce qui faisait sa force.

Il est révélateur qu'en trente-six années de vie publique, parfois dans des contextes difficiles, Daniel Goulet n'ait, à une exception près, jamais connu que la victoire.

Mais Daniel Goulet a toujours su que la France ne se comprenait et que les intérêts nationaux ne se défendaient, parfois, qu'avec le recul de l'éloignement. Il l'a prouvé avec courage, les armes à la main, dès le début de sa vie.

Cet engagement initial s'est poursuivi sous une forme plus pacifiée par une action déterminée dans le cadre de la diplomatie parlementaire, dont Daniel Goulet a été l'un des promoteurs et l'un des acteurs les plus éminents.

Comme pour tout ce qu'il entreprenait, son action dans ce domaine s'est concentrée avec énergie sur les causes auxquelles il croyait, notamment la francophonie, et surtout la paix au Proche-Orient et le développement des relations entre la France et le monde arabe.

En même temps qu'il remplissait avec un dévouement et une efficacité rares ses mandats nationaux et locaux, Daniel Goulet a développé une expérience et une activité internationales reconnues.

C'est ainsi qu'il agit en militant inépuisable de l'amitié franco-arabe : président de la fédération des groupes d'amitié France-Pays arabes, vice-président de la section française de l'association parlementaire pour la coopération euro-arabe, chef de la délégation du Sénat chargée de l'observation des élections en Palestine en 2005, membre et secrétaire de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, vice-président de la délégation française aux assemblées parlementaires du Conseil de l'Europe et de l'Union de l'Europe occidentale. Les références de Daniel Goulet dans ce domaine étaient aussi nombreuses qu'éminentes.

C'est avec émotion que je salue aujourd'hui la mémoire de Daniel Goulet, dans cet hémicycle où il était aimé et respecté autant pour son travail que pour ses engagements et son attention à autrui.

J'adresse mes sincères condoléances à ses collègues de la commission des affaires étrangères et des forces armées, à ses collègues du groupe UMP, à tous ses amis du Sénat. Mes pensées se tournent aussi, naturellement, vers son épouse, qui nous a rejoints dans cet hémicycle, et vers chacun des membres de sa famille si durement éprouvée. Nous nous associons à leur douleur et leur exprimons notre profonde sympathie attristée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion