Intervention de Jean-Michel Blanquer

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 4 juillet 2018 à 10h30
Audition de M. Jean-Michel Blanquer ministre de l'éducation nationale

Jean-Michel Blanquer, ministre :

Vous avez raison, monsieur Ouzoulias, de souligner la spécificité de l'Île-de-France s'agissant de Parcoursup. Car s'il y a des difficultés, c'est peut-être dans cette région plus qu'ailleurs. Certains problèmes que vous pointez du doigt ne sont toutefois pas nés avec Parcoursup. Nous sommes à la recherche d'une position équilibrée en matière de mobilité territoriale et sociale. La Seine-Saint-Denis a un taux d'accès à l'enseignement supérieur plus élevé que la moyenne nationale grâce, notamment, aux universités Paris VIII et Paris XIII. Tous les étudiants de ce département n'ont donc pas vocation à s'inscrire dans les établissements parisiens. Ce ne serait pas rendre service au département et à son développement que de permettre cela. Je peux néanmoins vous affirmer qu'au final nous compterons à partir de cette année plus d'étudiants issus de la banlieue parisienne dans les universités de la capitale qu'auparavant. Enfin, tout le monde aura une place ; c'est la raison pour laquelle les commissions rectorales que vous évoquez ont été créées.

Je fais régulièrement l'éloge des lycées agricoles. Il est très utile de les observer pour penser l'évolution de l'enseignement professionnel. Nous avons pris en compte la création de la spécialité « écologie, agronomie et territoires » dans la réforme du baccalauréat.

Le budget de l'enseignement français à l'étranger a retrouvé, en 2018, l'étiage qui était le sien en 2016, après la baisse de 2017. Le Président de la République a clairement fait part de sa volonté de développer l'enseignement français à l'étranger en consolidant les moyens actuels et en faisant émerger de nouveaux dispositifs fondés sur un nouveau modèle économique comme le font d'autres pays. L'attractivité des lycées français à l'étranger existe dans beaucoup de pays, y compris en Chine. Si nous nourrissons des doutes à ce sujet, il est toujours possible de mener une politique de publicité. En ce qui concerne les professeurs, je mise beaucoup sur l'européanisation ou l'internationalisation des formations pour faire évoluer l'écosystème actuel et le rendre plus attractif. Il conviendrait ainsi, à travers des échanges, de permettre à des professeurs français d'accéder à une carrière dans un autre État membre, ou à des professeurs issus d'un autre État membre de venir se former en France et repartir enseigner dans leur pays d'origine.

Je n'ai pas d'inquiétudes sur la capacité de mettre à la disposition des élèves et des professeurs les nouveaux manuels en septembre 2019. La direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) et les éditeurs scolaires savent travailler en amont et, grâce au travail des auteurs dès septembre 2018, nous serons à même d'avoir les nouveaux manuels scolaires prêts pour les élèves de seconde et première, l'échéance pour les terminales étant celle de la rentrée de septembre 2020.

Avec Frédérique Vidal, nous présenterons, dans les prochains mois, une réforme de la formation des professeurs qui est la matrice de toutes les réformes. La loi prévue en 2019 afin de rendre obligatoire la scolarité à partir de trois ans sera également l'occasion d'avancer sur ce sujet. L'excellence de la recherche et donc de la formation, la présence des praticiens dans les ÉSPÉ, le rôle de l'éducation nationale comme employeur unique in fine dans les ÉSPÉ font partie des idées que nous souhaitons porter dans le cadre de cette réforme. De même, nous mènerons une réflexion sur la place du concours.

Je regrette qu'en matière de langues régionales certains acteurs continuent de pratiquer la politique du fait accompli notamment sur le nombre d'épreuves du brevet et du baccalauréat composées en langues régionales. C'est un problème de méthode, je suis ouvert mais il faut rappeler toutefois les principes républicains.

L'informatique doit être présente dans les classes dès le primaire. Nous devons toutefois en éviter les usages superficiels d'où l'importance à mes yeux de l'apprentissage du codage. Nous devons également éviter certains effets négatifs : l'exposition aux écrans, l'usage des portables... Je suis d'accord avec vous : nous devons raisonner en partant des usages et ensuite envisager les équipements. De même, la formation des professeurs est un enjeu très important ainsi que le souligne le tout récent rapport de Mme Morin-Desailly. Enfin, il est évident que le numérique doit être mis à profit par toutes les disciplines.

Le contexte familial et social est une donnée que nous prenons en compte. Le second professeur principal doit permettre de lutter contre les inégalités en matière d'information éclairée et d'orientation. Ces enjeux doivent être intégrés dans notre politique d'accompagnement dès la classe de 6e, la « mallette » des parents pouvant jouer un rôle à cet égard. En ce qui concerne la capacité financière des jeunes, nous allons revoir la politique de bourse dans le but de la rendre plus sociale et plus motivante.

M. Piednoir, je vous confirme que l'épreuve du grand oral durera 20 minutes et non pas 30. Les risques que vous pointez sont réels. C'est pourquoi nous insistons sur la présentation d'un projet spécifique à chaque élève. Dans l'architecture de ces 20 minutes, les cinq dernières minutes devraient être consacrées à la réaction de l'élève face au jury, qui se composera de trois personnes, ce qui permettra à celui-ci de tester la spontanéité du candidat et sa capacité de réflexion. Les contours de cet oral sont encore débattus afin qu'ils échappent aux effets de standardisation que vous avez évoqués.

Pour ce qui est de l'attractivité du métier de professeur, il s'agit d'un enjeu majeur. J'utilise le terme « école de confiance » à cet effet, pour créer cette attractivité qui pose problème en France comme dans de nombreux pays. Le sujet de la rémunération est également en cause. Je vous confirme qu'en REP+, une prime de 1 000 euros va être allouée dès la rentrée prochaine, en lien avec les instances syndicales. Je suis très attaché au « bonheur professionnel » des enseignants, au travers des évolutions de carrière, des formations et d'une meilleure gestion des ressources humaines de proximité. La philosophie d'éducation prioritaire doit évoluer. Les moyens importants qui y sont mis ne doivent pas indemniser la souffrance mais stimuler la réussite. Le but ultime est de sortir les écoles, de l'éducation prioritaire vers des écoles en situation normale. Tout ceci est en discussion avec les organisations syndicales.

Pour ce qui est d'AFFELNET, ce logiciel n'est pas uniquement versaillais mais est développé également au niveau national. Des cas de saturation peuvent se présenter, ce qui est regrettable, mais ce logiciel est amélioré tous les ans afin d'éviter de tels cas, qui sont passibles de recours.

Enfin, pour répondre à Mme Monier, les enjeux de l'informatique sont une priorité pour nous, aussi bien sur l'orientation dès la sixième que sur la formation continue des professeurs qui enseignent cette matière jusqu'au baccalauréat.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 12 h 25.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion