Il faut rappeler qu'avant même le conflit, 50 % de la population vivaient déjà sous le seuil de pauvreté. Aujourd'hui la situation est la suivante : 17 millions de personnes sont mal nourries ; 8 millions sont en situation d'urgence alimentaire absolue ; 15 millions n'ont pas accès à l'eau potable et 14 millions pas accès aux soins. Plus de 50 % des infrastructures sanitaires ont été détruites. 2 millions de personnes ont été déplacées, et ce nombre va sans doute croître à la suite de l'offensive d'Hodeida. L'économie est complètement désorganisée. Les importations d'articles essentiels (carburant, denrées alimentaires, médicaments) se sont effondrées. On constate une sorte de blocus de fait d'Hodeida, alors que 70 % des denrées alimentaires et 40 à 50 % des importations de carburant passent par ce port.
Il faut signaler aussi que les Houthis s'opposent à tout un volet de l'aide humanitaire, par exemple le versement de pécules aux ménages pour leur permettre d'acheter des biens de première nécessité, ou la vaccination du bétail. On assiste aussi à des intimidations du personnel humanitaire. Comme l'indiquait Lisa Grande, coordinatrice des Nations unies pour la situation humanitaire au Yémen, « tous les principes humanitaires sont violés par tous ».
C'est dans ce contexte que le Président de la République et le Gouvernement ont décidé de prendre une initiative humanitaire, en invitant à Paris :
- les principaux pays donateurs : l'Allemagne, la Suède, les Pays-Bas, la Suisse, l'Italie... ;
- les voisins du Yémen : l'Arabie Saoudite, les EAU, Bahreïn, le Koweït, Oman, l'Égypte ;
- le P5 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies) ;
- les organisations internationales les plus importantes impliquées au Yémen: les Nations unies, l'Union européenne, la Ligue arabe, l'OCI, le CCEAG, le FMI, la Banque mondiale, la Banque islamique de développement ;
- les agences: OCHA, PNUD, OMS, CICR, HCR ;
- les acteurs humanitaires proches de l'Arabie Saoudite (le King Salman Center) ;
- les ONG françaises et internationales.
Il s'agit à l'origine d'une initiative franco-saoudienne, mais il ne s'agira pas d'une coprésidence. C'est bien la France qui organise cette conférence.
Concrètement, il y aura une consultation des ONG afin de les entendre avant même l'ouverture de la conférence.
Les Houthis ne sont pas invités, mais ils doivent être « engagés ». Lisa Grande estime ainsi que 60 à 70 % des obstacles à l'aide humanitaire proviennent du camp houthi. La France est le seul pays du P5 avec qui les Houthis acceptent d'avoir des contacts, et l'ambassadeur de France pour le Yémen s'y attelle.
Il est certain que l'offensive sur Hodeida change la donne, en faisant peser un aléa supplémentaire sur cette conférence. À l'heure actuelle, nous imaginons avoir le 27 juin un segment technique, avec des réunions d'experts des agences et des Etats et à une date ultérieure proche, le segment ministériel, en fonction de la médiation actuellement effectuée par Martin Griffiths.