Monsieur le ministre, votre objectif prioritaire est non pas l’augmentation du taux d’emploi, mais l’allongement de la durée de travail de ceux qui ont déjà un emploi à temps plein. Or, en longue période, la prospérité d’une nation dépend moins de la durée du travail que de la productivité de ce travail horaire. C’est si vrai que les pays où l’on travaille le plus, comme la Turquie, la Roumanie ou la Pologne, sont aussi les moins développés. Pis, ce sont aussi les pays où le travail est le moins bien partagé et où le taux d’emploi est le plus bas.
Cet exemple illustre donc que le « travailler plus » ne fait pas bon ménage avec le « travailler tous », et le dispositif complexe de défiscalisation des heures supplémentaires et de rachat des jours de réduction du temps de travail mis au point par le Gouvernement en fera rapidement la démonstration.
Ce dispositif permettra certes à ceux qui bénéficient de ces heures supplémentaires d’arrondir leurs fins de mois. Il satisfera aussi les employeurs, qui pourront utiliser au maximum la main-d’œuvre existante sans recourir à de nouvelles embauches. En revanche, cela a été souligné, il pénalisera les chômeurs et les salariés précaires, qui trouveront plus difficilement des emplois, et ne profitera que marginalement aux salariés à temps partiel. Pour eux, les heures supplémentaires sont en effet plafonnées à 10 % de leur temps de travail et ne sont ni majorées ni exonérées de cotisations patronales.
Ainsi, monsieur le ministre, le « travailler plus pour gagner plus » ne profitera pas à ceux qui en auraient le plus grand besoin. C’est tout le projet de loi qui va dans ce sens et, bien entendu, nous le combattons.