Intervention de Emmanuel Capus

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 11 juillet 2018 à 9h05
Contrôle budgétaire — Maisons de l'emploi - communication

Photo de Emmanuel CapusEmmanuel Capus, rapporteur spécial :

Je concentrerai mon intervention sur les principaux constats qui figurent dans notre rapport, avant de laisser ma collègue corapporteure, Sophie Taillé-Polian, vous présenter nos recommandations.

L'initiative de ce contrôle part d'une interrogation : comment expliquer l'écart entre le regard positif porté par les élus locaux sur les maisons de l'emploi, qui s'est traduit par le dépôt de nombreux amendements tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances, et la méconnaissance de ces structures par le grand public, voire par l'État, lequel prévoit de se retirer de leur financement dès l'année prochaine ?

Nous avons donc souhaité nous forger notre propre opinion, en établissant un bilan de leur action. Quatre constats s'imposent.

Premier constat : le champ d'intervention des maisons de l'emploi a énormément évolué au cours du temps.

Ces structures ont été créées par la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, avec l'objectif, notamment, d'accueillir et d'orienter les demandeurs d'emploi. Cette fonction a perdu de son intérêt lors de la fusion de l'ANPE et des Assedic, qui a abouti à la création de Pôle emploi en 2008. Depuis lors, l'État n'a cessé de s'interroger sur la place des maisons de l'emploi au sein du service public de l'emploi. Leur champ d'intervention s'est ainsi considérablement réduit, le nombre d'axes ouvrant droit à un financement étatique passant de quatre en 2009 à deux en 2013.

Deuxième constat : depuis cette date, le champ de compétence des maisons de l'emploi semble néanmoins clarifié et accepté par les autres acteurs du service public de l'emploi, qui ont unanimement salué l'action de ces structures. Celle-ci se décline autour d'un triptyque : fédérer, anticiper et innover.

Premier axe d'action : fédérer. Il s'agit du plus petit commun dénominateur des maisons de l'emploi. Ces dernières jouent un rôle d'« ensemblier » des différents intervenants en matière de politique de l'emploi. La coordination s'effectue non seulement au niveau de la gouvernance, qui réunit au minimum l'État, les collectivités territoriales et Pôle emploi, mais aussi dans le cadre de la mise en oeuvre d'actions partenariales.

Deuxième axe d'action : anticiper. La gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences territoriale, la GPECT, est ainsi devenue le coeur de métier des maisons de l'emploi.

Troisième axe d'action : innover. Les maisons de l'emploi ont développé une expertise en ingénierie de projets. Elles sont également des acteurs incontournables en matière de promotion des clauses sociales, qui permettent d'insérer, au sein des marchés publics, des obligations en matière de développement social ou environnemental. Ces clauses rencontrent un succès croissant, le nombre de bénéficiaires ayant crû de plus de 50 % entre 2013 et 2016.

Le troisième constat que nous avons pu dresser, c'est que le suivi par l'État de l'activité et des moyens des maisons de l'emploi au niveau agrégé est succinct.

Si un contrôle d'intensité variable est exercé par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, les Direccte, dans le cadre du conventionnement liant ces structures à l'État, en revanche, au niveau national, les seules données dont nous disposons sont celles qui sont produites par l'Alliance villes emploi.

Les informations présentées dans ces « consolidations » réalisées à partir de réponses à des questionnaires sont utiles, mais nécessairement imparfaites, puisque déclaratives, non exhaustives et non annuelles. En 2016, une grille d'évaluation nationale, sur laquelle s'est appuyée la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) pour la répartition des financements de l'État en 2017 et 2018, a, certes, été établie, mais celle-ci n'a été actualisée qu'à la marge en 2017.

Le quatrième et dernier constat à souligner tient au fait que les maisons de l'emploi souffrent d'une absence de visibilité sur leur financement. Entre 2009 et 2018, les crédits du budget de l'État consacrés aux maisons de l'emploi sont passés de 75 millions à 12 millions d'euros, soit une diminution de près de 87 %. Si la diminution progressive de la part de l'État dans le financement des maisons de l'emploi, entamée par la précédente majorité, a été annoncée dès 2013, l'ampleur de la baisse annuelle n'est connue qu'au moment du dépôt du projet de loi de finances. Cette incertitude, conjuguée à des modalités de financement reposant de plus en plus sur des appels à projets, nuit à la visibilité dont ont besoin ces structures pour lancer des actions de moyen-long terme.

Mes chers collègues, au terme de nos travaux, nous dressons donc un bilan globalement positif de l'action des maisons de l'emploi, constat, semble-t-il, partagé par l'ensemble des personnes que nous avons entendues. C'est pourquoi il n'est pas injustifié d'envisager le maintien d'un financement de ces structures.

Sophie Taillé-Polian et moi-même avons cependant un désaccord sur le montant qui doit leur être alloué. Je considère, pour ma part, que la participation financière de l'État pourrait être modulée en fonction du nombre et des performances de ces structures, tout en prenant en compte la nécessité de maîtriser la dépense publique, quand Sophie Taillé-Polian demande le maintien des crédits à leur niveau actuel.

C'est là notre seul point de divergence sur les maisons de l'emploi.

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