… à une dérégulation, à un détricotage des règles actuelles relatives au temps de travail, même si la durée annuelle légale reste fixée à 1 607 heures.
Permettez-moi de vous fournir deux illustrations des extrémités auxquelles ce texte peut conduire.
Premier exemple. Aujourd'hui, le volume d’heures supplémentaires effectuées par les salariés qui ont recours à cette pratique – c'est-à-dire seulement 30 % d’entre eux – est en moyenne de 55 heures. Or le contingent a été porté à 220 heures. La marge de la déréglementation est don considérable.
Deuxième exemple. S’agissant des conventions de forfait en jours, le seuil maximal du nombre de jours travaillés dans l’année passe de 218 à 235 pour les cadres, avec la possibilité d’étendre ce dispositif à l’ensemble des salariés. Au cours de la discussion, nous avons démontré qu’il pourrait même atteindre 280 jours et que le volume d’heures supplémentaires pourrait être supérieur à 400. Et il ne s’agit pas là d’une caricature : c’est bien la réalité qui est devant nous !
En six ans, nous en sommes aujourd'hui à la septième loi tendant à introduire plus de flexibilité et de souplesse dans le code du travail. Permettez-moi d’effectuer à cet égard un petit rappel.
Le contingent annuel d’heures supplémentaires avait été porté de 130 à 180 par la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi. Puis, après la promulgation d’un décret du 21 décembre 2004 – il faut toujours se méfier des mesures prises au moment des fêtes de fin d’année ! –, il a atteint 220 heures.
La loi du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise a permis d’aller encore au-delà, avec l’accord du salarié. Nous approchions donc du gré à gré.
La loi du 21 août 2007 – l’an dernier, nous avions siégé jusqu’au 2 août – en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, la loi TEPA, a institué des exonérations de cotisations pour les entreprises et des avantages fiscaux pour les salariés ayant recours aux heures supplémentaires, ce qui a constitué une attaque très vive contre la possibilité de créer de nouveaux emplois.
Puis, dernièrement, la loi du 8 février 2008 pour le pouvoir d’achat a autorisé les salariés à racheter des jours de RTT.
Aujourd'hui, certains en mesurent peut-être mal la portée – en fait, il s’agit d’un véritable coup de poignard dans le dos des salariés –, mais le Gouvernement a arbitrairement décidé d’introduire dans le projet de loi toute une série de dispositions graves et très éloignées des principes qui avaient pourtant été âprement négociés entre les partenaires sociaux.
Ma collègue Annie David l’a déjà souligné, mais je le répète parce que c’est très important, ce texte ouvre la voie à la semaine de quarante-huit heures, à la suppression des jours fériés, hors 1er mai, dans les conventions de forfait en jours et à la possibilité d’effectuer 17 jours de travail supplémentaires, soit un samedi sur trois. En outre, une de nos collègues du groupe UMP prépare actuellement une loi sur le travail du dimanche.
Le projet de loi aura également pour conséquences la monétisation du repos compensateur, quand il en reste, et l’évaporation des jours de RTT, sans compter qu’il ouvre la porte à tous les abus pour certains employeurs, auxquels vous offrez désormais un outil de dumping social de la sphère économique du travail.
Par ailleurs, l’avis des comités d’entreprise et des délégués du personnel, ainsi que la consultation de l’inspection du travail disparaissent.
Quant à l’article 16 du projet de loi, il consacre l’inversion de la hiérarchie des normes, ce qui revient à remettre en cause l’ordre public social. La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne est de nouveau bafouée, tout comme notre Constitution.
En outre, la législation relative aux 35 heures, qui est votre bouc émissaire habituel, subsiste, mais elle est détournée.