Intervention de Gilles Briatta

Commission d'enquête mutations Haute fonction publique — Réunion du 11 juillet 2018 à 17h30
Audition commune de Mme Marie-Anne Barbat layani directrice générale de la fédération bancaire française et de Mm. Gilles Briatta secrétaire général de la société générale et nicolas bonnault associé-gérant de rothschild and co

Gilles Briatta, secrétaire général de la Société générale :

Je peux comprendre qu'il ne soit pas évident de saisir les choses quand on ne travaille pas dans le secteur bancaire. Il fallait donc expliquer en donnant des exemples concrets. Je sais aussi que l'Europe est autocentrée et a tendance à oublier qu'elle n'est qu'une partie du monde.

Vous m'avez demandé si ce passage de la fonction publique au privé avait eu des inconvénients. Je n'en vois pas. Au vu de la pyramide des âges au sein du Quai d'Orsay, nombre de mes collègues cherchaient des postes. Un départ comme le mien n'est donc pas un problème.

La véritable question est celle des conflits d'intérêts. Je suis passé devant une commission de déontologie. L'industrie bancaire étant l'une des rares dont je ne me sois pas occupé à Matignon, l'entretien fut assez rapide. A tout de même été prévue une interdiction de contacts avec mes anciens collègues du Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) et le cabinet du Premier ministre.

Les conflits d'intérêts ne se limitent pas au passage public-privé. Pour une banque, c'est un sujet majeur. Il y a quatre conditions pour les prévenir : des règles claires, des contrôles, une formation des agents, une obligation de transparence. Sur tous ces points des progrès ont été faits en France, avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et la loi Sapin 2. Mais je vous suggère de prévoir des conditions de mise en oeuvre plus simples, car la loi française est l'une des compliquées au monde en la matière. Alors que, pour tous les autres pays, les registres mentionnant les sociétés qui ont contacté la puissance publique sont consultables à Bruxelles, « en haut de l'entonnoir », en France - et au Québec, ce sont les entreprises qui doivent tenir leur registre. C'est un casse-tête ! Il a fallu interpréter la loi, et on a enrichi les avocats.

Deux mesures marchent bien pour prévenir les conflits d'intérêts : la menace de sanction et la formation. Dans le privé, les formations dispensées sont très pratiques. Je suggère que l'on en prévoie aussi dans la fonction publique, qui est un peu en retard à cet égard. Il est arrivé, par exemple, qu'un régulateur veuille traiter de problèmes bancaires personnels en montrant sa carte professionnelle, ce qui relève du pénal.

Peut-on revenir dans la fonction publique après un passage dans le privé ?

Je pourrais rejoindre le ministère des affaires étrangères, pour lequel l'économie et la finance sont actuellement des priorités. Je suis ainsi le co-coordinateur du Brexit pour ma banque... Quoi qu'il en soit, ma disponibilité a été prolongée pour trois ans.

Je crois à l'approfondissement des liens entre les entreprises privées et la fonction publique. J'ai ainsi échangé avec le Trésor sur la réforme de la zone euro. Lorsque vous travaillez dans une banque, vous avez une autre perspective, ce qui peut être utile. Pour moi, par exemple, les données sont essentielles. La direction juridique de ma banque travaille ainsi sur le Cloud Act, loi américaine visant à contrôler le cloud numérique externe qui peut avoir un impact gigantesque. Mes interlocuteurs de la fonction publique n'étaient pas au courant parce qu'ils n'ont pas la même perspective.

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