Intervention de Michel Prieur

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 11 juillet 2018 à 10h30
Table ronde relative à l'inscription des enjeux climatiques et environnementaux dans la constitution

Michel Prieur :

Le débat entre environnement et économie n'est plus d'actualité depuis le concept de développement durable qui concilie développement économique, progrès social et protection de l'environnement. Poser ainsi le débat serait faire marche arrière. Il a été largement démontré que protéger l'environnement est un moteur de progrès et bénéficie aux deux autres piliers et au respect des droits de l'homme.

Le Grenelle de l'environnement, auquel j'ai participé, en a tiré les conséquences par rapport à la Charte de l'environnement. Le dialogue entre collectivités territoriales, État, associations et entreprises de l'environnement n'a plus mis sur la table cette éventuelle contradiction. J'ai rencontré M. Lustenberger, ancien ministre de l'environnement du Brésil, qui avait auparavant travaillé pour une multinationale très polluante. Il avait rendu obligatoire des processus de dépollution, et a été félicité par son ancien employeur, qui finalement a gagné plus d'argent grâce à ces nouvelles technologies.

Tant pour des raisons de fond que pour des raisons de forme, je suis défavorable à une modification de la Charte de l'environnement. La Constitution a soixante ans, et a subi 24 révisions - c'est beaucoup. Aucune n'a touché au préambule. Comme le disait le général de Gaulle, elle est aussi une pratique. C'est confirmé par le rapport de la commission présidée par Simone Veil, demandé par le président Sarkozy, qui proposait de respecter l'héritage constitutionnel, soulignait que réécrire le préambule de la Constitution introduirait un risque d'insécurité juridique, et demandait d'assurer l'intangibilité de l'oeuvre constitutionnelle, même récente - ce qui incluait la Charte.

Le principe de précaution n'a servi à rien, sauf à être brandi comme un drapeau rouge. Mais il n'a pas eu les effets juridiques craints. Entre 2005 et 2018, le Conseil constitutionnel a rendu cinq décisions - sur 2081 - sur le sujet, dont trois estimaient que ce principe était inopérant en l'espèce car il concerne des mesures provisoires et non pérennes, et deux n'aboutissaient pas à l'annulation de la loi. Aucune loi n'a été jugée comme violant le principe de précaution, il n'est donc pas appliqué.

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