Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 16 juillet 2018 à 14h30
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Oh, vous savez, monsieur Dallier, après avoir relu les interventions des uns et des autres – les vôtres sont toujours pertinentes dans tous les domaines, mais particulièrement dans celui-ci –, je puis vous dire qu’il y a eu un certain nombre d’évolutions ou de tentatives d’évolution qui étaient encore plus frappantes. Il est bien normal que, chaque fois que l’on propose une évolution qui, parfois, est vécue comme une révolution, des résistances se fassent jour. Nous savons ce qu’il en est pour les niches fiscales, mais c’est vrai dans tous les domaines.

Nous souhaitons, avec cette réforme du secteur HLM, qui est le deuxième acte de la réforme d’ensemble, une restructuration des organismes du logement social, en posant comme principe qu’un organisme de logement locatif social qui n’a pas une taille suffisante doit rejoindre un groupe, sauf, j’y ai tenu, dans les territoires où le parc et les bailleurs sont peu nombreux. Il ne faut surtout pas mettre fin à la proximité en coupant le lien avec les territoires. Ceux qui ont voulu la fusion des régions doivent bien se rendre compte que le regroupement de ces organismes dans les treize nouvelles grandes métropoles régionales causerait de grandes difficultés, dans ce domaine comme dans bien d’autres. Le but est donc d’atteindre le bon équilibre entre la proximité, d’un côté, et la mutualisation, de l’autre. Le lien avec les territoires est ainsi garanti, ce qui est pour moi essentiel.

Je précise de nouveau qu’il s’agit non pas de contraindre les opérateurs à fusionner, sauf dans le cadre de la même intercommunalité, ce qui concerne un nombre très limité de cas, ni de faire disparaître la diversité des organismes d’HLM ou de leur faire perdre leur identité, mais seulement de fixer l’objectif et de leur fournir une boîte à outils complète pour y arriver. Ce que nous avons fait avec la fédération des SCOP, chère à Marie-Noëlle Lienemann, ou avec la fédération des EPL, en est la stricte démonstration.

Les travaux à l’Assemblée nationale ont permis de mieux prendre en compte certaines dimensions opérationnelles et d’en simplifier la mise en œuvre. Je pense, par exemple, à la réalité des situations des activités des bailleurs sociaux, notamment des entreprises publiques locales, pour lesquels des règles adaptées ont été définies.

Vous avez, là aussi, apporté une modification substantielle en abaissant le seuil de regroupement de 15 000 à 10 000 logements. Je comprends vos interrogations par rapport à cette évolution du secteur – j’ai bien dit « je ». Nous aurions pu obliger les bailleurs à fusionner pour devenir de grands acteurs régionaux, voire nationaux : tel n’est pas notre projet ! Il faut que, collectivement, nous gardions bien à l’esprit que l’objectif est d’aider les organismes à se renforcer mutuellement, tout en conservant leur diversité. Il n’y a aucun doute à avoir sur ce point. C’est la condition du maintien d’un système du logement social français fort. Or des sociétés de coordination trop petites à l’échelle des territoires ne pourront pas jouer le rôle qui est attendu d’elles. Il faut qu’elles puissent s’arrimer à des organismes de taille intermédiaire.

Par ailleurs, nous souhaitons la simplification du cadre juridique applicable aux bailleurs sociaux, avec de nouvelles mesures pour rendre leur maîtrise d’ouvrage plus efficace et compétitive. C’est d’ailleurs à la demande expresse des bailleurs sociaux que nous avons proposé ces mesures.

J’observe notamment que de plus en plus de bailleurs sociaux ont recours aux VEFA avec la promotion privée, car ils ne luttent plus à armes égales quand ils sont en compétition sur le foncier. Aujourd’hui, quasiment la moitié des logements sont construits ainsi, et même plus de 60 % dans certaines agglomérations tendues. Nous avions donc proposé, non pas de se passer des architectes, comme cela a pu parfois être grossièrement caricaturé, mais de donner plus de souplesse au cadre d’intervention qui est celui des bailleurs sociaux, et ce à leur demande, je le rappelle.

Quand on me dit que nous allons remettre en cause la qualité architecturale, je fais observer que la disposition obligeant les bailleurs sociaux à organiser des concours d’architecture remontait à moins d’un an et demi. On ne peut pas dire que ce qui s’était fait avant avait abaissé le niveau de qualité architecturale.

Je le répète, il s’agit simplement de donner plus de souplesse au cadre intervention qui est celui des bailleurs sociaux, qui plus est parce que ce cadre d’intervention est disparate entre les différentes familles de bailleurs sociaux, ce qui n’est pas justifié. Cette disposition engendrera non seulement des économies pour les bailleurs sociaux, mais surtout plus de réactivité, sans leur interdire de recourir aux concours d’architecture s’ils le souhaitent. Ils pourront également mieux s’adapter aux nouveaux modes de fabrication des logements, notamment avec les technologies numériques. Je pense au BIM. Bien sûr, je le répète une nouvelle fois, ils pourront toujours avoir recours aux mêmes procédures s’ils le souhaitent. Je le dis très clairement, c’est un objectif sur lequel nous n’entendons pas revenir. J’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer à M. le rapporteur pour avis.

Nous souhaitons également simplifier l’accession à la propriété pour les locataires d’HLM avec un double objectif simple : d’une part, permettre à des locataires d’acquérir leur logement quand ils le peuvent et le souhaitent et, d’autre part, soutenir la construction ou la rénovation de logements sociaux neufs par les bailleurs.

J’ajoute que c’est aussi une solution pragmatique pour stabiliser les classes moyennes dans certains quartiers où la mixité sociale est un enjeu réel. À ce titre, et même si je considère qu’il faut effectivement pouvoir prendre en compte encore plus finement les enjeux des territoires – je l’ai déjà exprimé en séance à l’Assemblée nationale –, je ne suis pas favorable à l’ajout d’une contrainte, avec cet avis conforme du maire pour l’autorisation des ventes d’HLM.

Vous le voyez, quand le Gouvernement souhaite accorder plus de pouvoirs aux maires, certains ne sont pas d’accord. Là, certes, c’est l’inverse, mais à la différence qu’à ce jour l’avis conforme n’existe pas. C’est donc une contrainte supplémentaire qui serait proposée, là où, justement, il faut de la fluidité pour favoriser ces ventes. Je rappelle qu’aujourd’hui – je sais que le débat aura lieu, souvent en adoptant des postures – 8 000 logements trouvent acquéreurs, alors que 100 000 sont en vente. Ce n’est donc pas une nouveauté en soi. La nouveauté, c’est de permettre que les objectifs, y compris ceux fixés par les bailleurs sociaux, soient tenus.

En troisième lieu, le projet loi cherche à répondre aux nombreux besoins de nos concitoyens en matière de logements et à favoriser la mixité sociale. Pour ce faire, nous avons mené de nombreuses consultations, ce qui est bien naturel, et fait des déplacements sur le terrain.

Concernant le parc social, nous proposons de renforcer la transparence des attributions grâce à la généralisation de la cotation dans les grandes agglomérations, ce qui ne me paraît pas poser de gros problèmes, et de renforcer la mobilité des locataires dans le parc social en réexaminant tous les trois ans leur situation. J’ai vu que la commission proposait six ans. Je n’ai pas d’états d’âme par rapport à cette proposition, mais il faut savoir que nous avions proposé six ans à l’Assemblée nationale – j’ai toujours considéré que les deux assemblées étaient très différentes, ce qui fait tout le charme de la démocratie parlementaire française – et que nous sommes passés à trois ans à la demande de tous les groupes.

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