Merci pour vos réactions.
Pour répondre à la question de Laurence Cohen sur les refus de parcours de sortie de la prostitution que nous avons rencontrés, j'aimerais préciser que nous avons justement rendez-vous à la préfecture pour en discuter. Ces cinq refus ont effectivement eu lieu dans le même département. Nous nous battrons au moins pour quatre d'entre eux, si les personnes le désirent. Je vous invite à insister auprès des préfets sur ces questions. Nous sommes en outre disponibles pour former un maximum d'associations généralistes. Nos structures se soutiennent et s'entraident. Nous avons un réel intérêt à multiplier le nombre d'associations qui connaissent ces problématiques, d'autant plus que, lors de la réunion de la commission, l'association qui a présenté le dossier faisant l'objet de la discussion n'est pas habilitée à assister à son examen par ladite commission. Il est donc important que les autres associations présentes puissent être en mesure de le défendre s'il y a lieu.
Par ailleurs, la pénalisation des clients constitue un volet essentiel de la loi. Il s'agit d'une conséquence logique de la reconnaissance de la prostitution comme une violence faite aux femmes, en premier lieu par les acheteurs de prostitution.
Nous participons ainsi à des stages de responsabilisation organisés en Seine-et-Marne. Ils durent deux jours et s'adressent à des hommes qui ont été verbalisés comme clients de prostituées. Nous leur expliquons la loi et nous tâchons de les faire réfléchir aux situations dans lesquelles se trouvent les êtres humains qui se prostituent. Au cours de ces discussions, nous voyons apparaître clairement une vision basique des relations entre les hommes et les femmes. D'un côté, il est dit que les hommes ont des besoins sexuels importants ; de l'autre, que la sexualité des femmes se cantonne à la reproduction. Ces stages fonctionnent, notamment pour les plus jeunes clients. Ils comprennent qu'il ne s'agit pas seulement de « tirer un coup » et qu'au contraire, en achetant des services sexuels, ils participent à une violence grave envers les femmes ou les hommes.
Vous avez raison de souligner la question de la politique migratoire. La France ne respecte pas ses engagements internationaux en matière de protection des victimes de la traite des êtres humains. Elle ne dispose à l'heure actuelle d'aucun plan contre la traite des êtres humains, le dernier s'étant achevé en 2016, ni d'aucun dispositif pour assurer la protection des victimes. Nous craignons notamment les effets de la nouvelle loi, actuellement en discussion, sur l'asile et l'immigration. Toutes les politiques restrictives aident à notre avis le développement du trafic des êtres humains. Ainsi, en application du Règlement Dublin III, des victimes de traite, « dressées » et exploitées en Italie, y sont renvoyées et y vivent en situation irrégulière, sans hébergement, abandonnées aux mains des trafiquants qui les exploitent encore plus gravement. Nous devons donc leur procurer des hébergements sécurisés. En raison du peu de places d'hébergement dont nous disposons (325) et en fonction de la situation des personnes, nous sommes parfois obligés d'utiliser des hôtels. Or cette solution ne met pas fin à la vulnérabilité des personnes. Certaines femmes sont ainsi enlevées dans leur chambre d'hôtel par les réseaux. La question des enfants mineurs se pose également, nous ne sommes pas agréés pour les héberger.