PRIARTEM signifie « Pour rassembler, informer et agir sur les risques liés aux technologies électromagnétiques ». Créée en 2000, PRIARTEM est la première association en France à traiter du sujet ondes, santé, et environnement. Elle est reconnue d'intérêt général, et agréée au titre des usagers de santé et de la protection de l'environnement. Nous sommes, par ailleurs, membres du comité de dialogue de l'Anses, et du comité d'orientation thématique santé environnement de l'Agence. Je précise que je suis moi-même devenue électro-sensible en 2011.
Notre action est fondée sur des principes de démocratie environnementale et des arguments rationnels, sur la base de la légitimité des citoyens à s'interroger sur ce qu'ils subissent et, par rapport aux droits inscrits dans la Constitution, à vivre dans un environnement sain, et à bénéficier de la justice, ainsi que de la participation environnementale. Nous développons des argumentaires basés sur une veille scientifique, et des plaidoyers vis-à-vis des malades. Nous assurons également une écoute, et favorisons le développement de l'entraide, car nous recevons de nombreux témoignages de personnes en grande difficulté.
Nous participons, par ailleurs, à la recherche. Je souhaiterais ainsi indiquer à M. Lévy que nous sommes justement en contact avec une équipe de l'Inserm de Lyon, qui n'était pas spécialisée à l'origine dans la question des rayons non ionisants, mais applique des concepts liés aux rayons ionisants à la question de l'électro-sensibilité, ce qui est très intéressant. Ces travaux sont financés par l'Anses, dans le cadre de son programme. Je précise que nous sommes tous bénévoles.
Nous accueillons le rapport de l'Anses comme une réelle avancée sur le plan de la compréhension du phénomène, et de la façon de considérer les personnes atteintes. Nous remercions vivement l'Agence de s'être attelée à ce travail difficile, long et délicat, et de l'avoir mené en transparence, notamment au niveau de la consultation publique mise en oeuvre dans ce cadre.
Si le lien de causalité n'est pas aujourd'hui formellement reconnu, des points importants nous semblent néanmoins mis en lumière par le travail de l'Anses. Ils concernent notamment le fait qu'il existe chez l'homme des systèmes biologiques, en lien avec la magnéto-réception que l'on peut trouver chez l'animal, et que le cerveau réagit aux expositions aux champs électromagnétiques. Il est également indiqué dans ce rapport que certaines études ont permis d'observer, chez les personnes électro-sensibles, un abaissement du seuil de perception du courant électrique, et une certaine capacité à percevoir les champs d'extrêmement basse fréquence.
Nous saluons également les différentes hypothèses soulevées, qui mériteraient d'être complètement défrichées.
Tout ceci nous semble compatible avec la définition que nous donnons de notre pathologie, qui diffère de celle formulée par l'OMS, rappelée par M. Olivier Merckel. Pour nous, l'électro-hypersensibilité correspond à une perte de tolérance aux champs électromagnétiques, potentiellement brutale et importante. D'après les constats que nous avons pu effectuer par nous-mêmes, il apparaît que les personnes électro-sensibles réagiraient à des niveaux de champs de l'ordre de la dizaine ou de la vingtaine de millivolts par mètre, sachant que les valeurs limites actuelles tournent autour de 28 à 87 volts par mètre.
Sur le plan de la prise en charge, l'Anses reconnaît la réalité des douleurs et des souffrances ressenties par les personnes électro-sensibles, ce qui opère pour nous un changement de paradigme quant à la prise en compte et à l'écoute des patients, en contradiction avec la position exprimée jusqu'à présent par l'OMS. L'Anses recommande ainsi de « développer la formation des professionnels de santé et des acteurs sociaux à l'accueil et à l'écoute des personnes se déclarant électro-hypersensibles, ainsi qu'à la prise en compte, dans leur pratique, des questions et attentes de ces personnes, notamment en ce qui concerne leur qualité de vie ». Pour nous, cette position représente une bouffée d'oxygène vis-à-vis, d'une part, de la santé des personnes et de leur insertion dans la société et, d'autre part, en matière de prévention primaire, secondaire, et tertiaire, ainsi qu'à l'égard de l'organisation de la veille sanitaire, et de la recherche clinique. J'ai été très intéressée par les propos de M. Lévy sur cet aspect. Cela me conduit naturellement à demander une expertise collective de la part de l'Inserm, à laquelle nous sommes tout à fait prêts à collaborer, selon les modalités proposées dans les recommandations de l'Anses.
J'ai en revanche été un peu déçue par l'intervention de Mme Grenier, de la Haute autorité de santé, qui s'est appuyée sur l'existence des centres de pathologies professionnelles, et la fameuse étude du PHRC dite « étude Cochin ». Je rappelle que cette étude, dont l'idée a été émise en 2009, a été initiée en 2012, avec une prévision de diffusion des résultats en 2016. Or, nous les attendons encore. S'ajoute à cela le fait que le promoteur de l'étude disposait des résultats dès le lancement des travaux, puisque, selon les dires d'un médecin auditionné par l'Anses au cours de l'élaboration de son rapport, cette étude visait à déterminer si une prise en charge thérapeutique basée sur l'hypothèse du caractère uniquement psychosomatique de cette symptomatologie aboutirait à une amélioration. L'hypothèse de départ évacuait donc d'emblée la possibilité d'atteintes physiopathologique. Vous comprendrez donc qu'elle ne nous satisfasse pas. Nous sommes tout à fait prêts à entendre et à travailler sur l'idée selon laquelle les centres de pathologies professionnelles pourraient être à même d'intervenir dans l'organisation de la prise en charge ; mais il y a avant tout nécessité d'un dialogue, et du rétablissement d'une confiance vis-à-vis de ces centres. Je pense que l'étude Cochin est l'exemple même d'un fiasco, d'une étude minée dès la base. Il y a donc là un travail de reconstitution d'un lien avec les malades à effectuer, préalablement à toute collaboration.
Concernant la recherche, nous sommes évidemment demandeurs. Ceci ne doit toutefois pas retarder l'action, car il y a aujourd'hui urgence face à ce problème sanitaire majeur pour l'ensemble de la population. Nous appelons, ainsi, à une réduction des expositions pour tous, à une prise en charge du problème sur le plan médico-social, et demandons, en tant qu'association agréée, à être associés à la discussion des orientations à envisager en matière de recherche et de prise en charge. Nous sommes force de proposition, et l'avons déjà montré, en faveur d'une politique intégrée et inclusive, avec l'objectif que personne ne soit laissé de côté, et qu'aucun nouveau cas n'apparaisse, dans la mesure où nous sommes face à des risques évitables.
Je conclurai en disant que les personnes électrosensibles ont beaucoup à apporter à la société, tant en termes de connaissances fondamentales sur le phénomène, que d'un point de vue social ; mais elles attendent aussi, légitimement, beaucoup en retour.