Merci, monsieur le président. Prenant en compte les premiers débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale, j'insisterai plus particulièrement sur certains points, dans la perspective de l'examen du projet de loi constitutionnelle qui va vous être proposé.
Ce projet de loi constitutionnelle est une occasion d'interroger le rôle du Parlement en matière de pilotage des finances publiques. Un débat particulier porte sur les finances sociales, leur autonomie et leur spécificité, ainsi que sur l'intervention du Parlement en matière de protection sociale, notamment obligatoire.
Cette réforme constitutionnelle n'est naturellement que le premier acte du travail parlementaire, la Constitution ne faisant qu'édicter de grands principes, et l'essentiel du contenu devant être défini dans la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et dans la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS), qu'il faudra plus ou moins profondément ajuster. Une partie des débats portera sans doute sur ce sujet.
Les dispositions intéressant les finances sociales sont de plusieurs ordres :
- l'alignement des délais d'examen des projets de loi de finances (PLF) et des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ;
- la possibilité d'étendre le champ des lois de financement de la sécurité sociale à la protection sociale obligatoire et l'effacement de la notion de sécurité sociale dans la Constitution, qui constitue un « faux débat » ;
- l'opportunité d'étendre aux lois de financements de la sécurité sociale la disposition concernant les lois de finances à propos du fait que « la loi organique détermine les conditions dans lesquelles les commissions permanentes de chaque assemblée entendent les membres du Gouvernement sur l'exécution de la loi de financement ».
Cette dernière disposition me semble utile puisque, comme vous le savez, des ministres autres que ceux chargés des finances et de la sécurité sociale interviennent tant dans le domaine de la sécurité sociale que de la protection sociale. De ce point de vue, l'insertion d'une disposition miroir semble plutôt opportune, de nature à permettre à cette commission de jouer son rôle et, au-delà, d'améliorer le pilotage des finances sociales et la conduite des politiques sociales.
Je souhaite tout d'abord évoquer une disposition centrale de l'article 7 du projet de loi constitutionnelle, qui propose que les PLFSS et les projets de loi de finances puissent être examinés conjointement en tout ou partie dans les conditions fixées par une loi organique.
On peut s'interroger sur la portée de cet ajout, qui se situe dans un débat assez complexe. Il se situerait à l'article 47-1 de la Constitution, ce qui peut donner à penser que la discussion conjointe sur la loi de finances et la loi de financement pourrait « avaler » une part non négligeable et substantielle de ce qui est fait actuellement dans le cadre de la LFSS. En fait, il s'agit d'un examen conjoint. Il faudra voir ensuite, dans le cas des débats parlementaires ou dans le cadre des dispositions organiques, si cela a un impact en cas de vote groupé sur l'ensemble des dispositions.
Il me semble que ceci risque de remettre en cause le cadre décrit actuellement par la Constitution et par la loi organique en matière de lois de financement de la sécurité sociale. Le Sénat, qui s'est toujours intéressée aux finances sociales de manière assez pointue, avait déjà essayé d'articuler les parties recette du PLF et du PLFSS. Peut-être s'agit-il de revenir sur ce mode d'organisation du travail parlementaire.
La pratique a cependant montré qu'on peut le faire de manière empirique. Je ne crois même pas que cela ait donné lieu à une mention dans le règlement des assemblées. On peut donc s'interroger sur la portée réelle de ces dispositions. En fait, cet ajout se situe dans un débat qui existe au niveau doctrinal, interministériel et entre commissions sur le pilotage et l'autonomie des finances sociales et son lien par rapport à l'État. Cela nécessite de s'interroger sur la manière dont la partie recettes, la partie clôture, la partie règlement de la loi de financement de la sécurité sociale actuelle, voire son volet dépenses pourraient donner lieu à une discussion conjointe avec le projet de loi de finances.
Cette disposition, à ce stade, apparaît relativement amphigourique. Elle nécessiterait de donner des explications quant à son champ et ses modalités d'application. Là encore, alors même que le texte constitutionnel prévoit actuellement lato sensu une modification de la LOLF, il semblera logique de modifier également la LOLFSS.
Or on a créé quelque chose de tout à fait particulier en 1996, qu'on a profondément réformé en 2005 qui a, me semble-t-il, permis de reconnaître la spécificité des finances sociales là où l'État et les collectivités territoriales sont régis par le principe de non-affectation des recettes. C'est un corollaire de la responsabilité mis en place pour s'assurer que les organismes ne dépensent pas leur argent autrement qu'en prenant en charge le risque social.
L'approche est plus universelle et se fait par branche depuis 2005. Ceci est pleinement justifié compte tenu des modes d'intervention et des masses financières considérées. Le débat s'est recentré sur une sorte de pédagogie sectorielle de l'équilibre ou du déséquilibre. On étudie si, par branche, les recettes permettent de couvrir les dépenses, et on ajuste en régulant la dépense ou la recette. C'est totalement inédit en matière de pilotage des finances publiques. Cela se justifie pleinement compte tenu des masses financières en cause, qui sont considérables.
Enfin, il ne s'agit pas d'une approche budgétaire, ce qui n'aurait pas de sens puisqu'on a reconnu des droits à prestations sociales, mais d'une approche de conditions générales de l'équilibre financier, donc de régulation : ce n'est pas parce qu'on pourrait dépasser l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) en octobre qu'on fermera les cabinets médicaux, les pharmacies ou les hôpitaux ou qu'on arrêtera de payer les retraites, ce qui semble assez cohérent.
Cette démarche est adaptée et totalement différente de ce qui s'applique dans les autres secteurs des finances publiques, qu'il s'agisse des finances de l'État ou des collectivités territoriales.
On a également mis en place une approche pluriannuelle pour faciliter les débats sur l'exécution. La loi de financement est une loi « tout-en-un ». Cela permet de limiter les éventuelles critiques et débats sur les rebasages. Il existe une annexe relative à l'évolution de l'ONDAM, une annexe sur les comptes pro forma, etc. Cela donne une vraie vision de l'équilibre des finances sociales qui, compte tenu du fait que les recettes bougent beaucoup avec la masse salariale et que les dépenses dépendent largement du comportement des acteurs, doivent être pilotées sur plusieurs années. Une réforme des retraites met plusieurs années à produire ses effets, tout comme une réforme de l'assurance maladie ou de la politique familiale.
Les lois de financement ont ainsi permis d'avoir un débat sur une tendance de six années -dernier exercice clos, rectification de l'exercice en cours, année à venir et projections quadriennales, ce qui permet au Gouvernement et au Parlement d'apprécier les conditions dans lesquelles on préserve les équilibres généraux de la sécurité sociale sur une durée plus longue que la perspective offerte par les lois de programmation des finances publiques (LPFP).
Le contexte dans lequel se tient ce débat est tout à fait particulier, voire inédit, les finances sociales étant sur une trajectoire de retour à l'équilibre. L'amélioration du solde public est d'ailleurs très largement liée à celle du solde des administrations de sécurité sociale (ASSO).
On peut avoir la faiblesse de penser que la création de lois de financement de la sécurité sociale à compter de 2005 n'a pas été sans effet. Elle a permis de mettre le système sous tension et, quels que soient les choix politiques des différentes majorités, de mieux piloter les recettes et les dépenses. On peut donc se demander si remettre en cause les lois de financement ne reviendrait pas à remettre en cause un pilotage qui a fait ses preuves.
La Cour des comptes le rappelle dans son dernier rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2018, qui souligne que l'amélioration de la situation des comptes sociaux reflète des efforts importants, qui ne doivent pas obérer un poids croissant des finances sociales - mais cela relève de choix politiques et de choix de société. Cette amélioration traduit à la fois des efforts en dépenses, mais aussi d'importants efforts de recettes. Il faut reconnaître que ce dispositif-là a permis de faire des choix et d'affecter une masse de prélèvements obligatoires supplémentaires compte tenu des besoins de la sphère sociale.
On va ainsi vers un plafonnement des excédents de la sphère sociale pour les orienter vers l'État, ce qui est un point important par rapport au débat qui nous intéresse. Ceci est annoncé dans la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. La Cour des comptes, comme l'ensemble des analystes, s'interroge sur les modalités dans lesquelles ce plafonnement va être assuré. Ce n'est pas neutre, puisque cela représentera 24 milliards d'euros en 2022, soit deux tiers des dépenses de la branche famille et un point de produit intérieur brut (PIB).
Ce transfert pourrait ne concerner que la partie sécurité sociale des ASSO et non l'assurance chômage ou les retraites complémentaires ce qui, compte tenu des trajectoires et des perspectives, peut amener à s'interroger. Devra-t-on transférer des recettes ? Vous y êtes habitués : c'est un débat courant et annuel. Aura-t-on des transferts de dépenses du budget de l'État vers celui de la sécurité sociale ? Les mois et les années à venir nous l'indiqueront...
Ce retour à l'équilibre des finances sociales - et en particulier de la sécurité sociale, qui a largement contribué à l'amélioration du solde - est déterminant pour les équilibres globaux de nos finances publiques, alors même que les ASSO représentent le premier secteur de dépenses et de recettes publiques et contribuent d'une manière extrêmement faible à la dette publique nette, qui est ici liée à l'État.
Il semble important de remettre ces éléments en perspective, alors même qu'on a, du côté de la sécurité sociale, hors débat sur le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), une perspective d'extinction de la dette sociale, la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) devant achever sa mission à l'horizon 2024, ce qui est tout à fait inédit. Il s'agit, là encore, d'une spécificité des finances sociales.
Ce retour à l'équilibre est légèrement fragilisé par le FSV, mais il est tout à fait net sur le plan du régime général. On a réussi à trouver des modes de pilotage de plus en plus fins. Auparavant, l'ONDAM connaissait un dépassement quasi-systématique mais tel n'est plus le cas désormais, alors même que l'objectif est devenu beaucoup plus ambitieux au fil des ans.
J'ai parlé de la question globale du pilotage des finances publiques et du rôle clé des finances sociales. On peut s'interroger sur la manière dont la sphère sociale va s'insérer dans ce pilotage. Au-delà, on a besoin d'un débat renouvelé et renforcé sur les finances sociales dans leur ensemble. On dispose aujourd'hui de lois de programmation des finances publiques. On assigne déjà des objectifs globaux à l'ensemble des secteurs. C'est le sens des engagements qui ont été souscrits vis-à-vis des autorités européennes. La question qui se pose est de savoir à quel moment on doit avoir un débat public plus équilibré sur l'ensemble de ces sphères, alors même que certains prônent l'intégration totale ou partielle des finances de la sécurité sociale dans celles de l'État.
En fait, les rivalités et les divergences entre la sphère sociale et l'État transcendent les alternances politiques. Il s'agit plutôt de débats entre les administrations, les ministres et même les commissions parlementaires sur la bonne manière de conduire la chose publique. Vous avez assisté aux interminables échanges auxquels a donné lieu la loi organique de 2005 à propos de l'opportunité de doter les commissions des affaires sociales de rapporteurs investis des mêmes pouvoirs d'investigation sur pièces et sur place que ceux des commissions des finances, entraînant une crispation assez forte sur la question du monopole des lois de finances et la manière dont s'ajustent les lois de financement.
Le choix qui a été fait est celui d'une loi de finances qui a la main sur une recette dès lors qu'elle garde une fraction de la dépense. Cela explique beaucoup des évolutions ou des transferts de dépenses auxquels vous êtes confrontés : quand on fait un transfert de recettes à 99,90 %, c'est notamment pour garder le monopole de la loi de finances. Si on fait un transfert de recettes à 100 %, c'est la loi de financement qui constitue le véhicule décisionnaire en la matière.
Il faut aussi tenir compte de la question de l'inéligibilité de la sphère sociale au fameux prélèvement sur recettes prévu à l'article 6 de la LOLF, réservé uniquement à l'Union européenne et aux collectivités territoriales. Cela signifie qu'on a fait le choix de la complexité via ce monopole des lois de finances, la sphère sociale, et notamment la sécurité sociale, n'étant pas éligible aux prélèvements sur recettes.
En fait, le fonctionnement des finances publiques est, en France, largement régi par l'idée de centralité de l'État. Or celle-ci n'a plus aucun fondement. Vous le savez, la contribution sociale généralisée (CSG) est le premier impôt direct supporté par les ménages. Elle représente 1,8 fois le produit de l'impôt sur le revenu. Les dépenses d'assurance vieillesse en loi de financement constituent à près l'équivalent des dépenses du budget général de l'État. Les masses financières en loi de finances, avec la dette, s'élèvent à 14 % du PIB, celles en loi de financement de la sécurité sociale, sans la dette, à peu près à 23 %. En outre, la France évolue dans un contexte européen très intégré, dans lequel on n'a plus d'outils monétaires et une moindre capacité à mobiliser l'outil budgétaire.
De ce point de vue, si on veut agir politiquement, on ne peut se désintéresser de la sphère sociale. On le voit en recettes comme en dépenses : c'est naturellement un point incontournable du débat public.
Pour autant, l'aggiornamento institutionnel, administratif, ministériel, intellectuel, universitaire n'a pas été réalisé, les débats publics demeurant largement centrés sur le projet de loi de finances. Par ailleurs, les administrations financières qui sont censées cadrer le sujet - je pense à l'ensemble des directions du ministère de l'économie et des finances - peinent à comprendre la spécificité des finances sociales s'agissant des volets financiers et juridiques, ainsi qu'en matière de gestion et de relations avec les partenaires sociaux, pourtant absolument incontournables. Les mêmes questions se posent dans le champ universitaire. C'est dans cet environnement qu'ont lieu chaque année les débats sur la baisse des recettes du budget général lorsqu'on transfère de la recette pour compenser l'exonération sur la compensation, etc.
Toutes ces questions de compensation et de transfert de recettes reflètent une incapacité que nous connaissons tous à revoir le financement de la protection sociale et le profilage du prélèvement social. On continue à réaliser des exonérations au niveau du SMIC et au-delà, faute d'avoir créé collectivement les conditions pour profiler le prélèvement social dans son ensemble et les structures de financement de la sécurité sociale.
C'est dans ce contexte qu'on doit apprécier la volonté de remettre la main sur les finances sociales. De ce point de vue, les affectations partielles de recettes sont un indice pour préserver le monopole des lois de finances. Cela pose la question de savoir quel sera le véhicule qui décidera des modalités d'affectation de la CSG et soulève des débats sur la compensation.
Cela justifie potentiellement la notion d'examen conjoint, mais des choix de complexité et d'étanchéité ont également été faits de ce point de vue. Les partages d'affectation ne sont en fait qu'un épiphénomène qui occupe beaucoup de temps et réclame beaucoup d'énergie, notamment dans les administrations et les assemblées parlementaires, mais ceci est minime par rapport aux masses en cause. Les effets collatéraux de réforme du prélèvement social et du prélèvement fiscal ont toujours existé. Compte tenu du niveau de prélèvements obligatoires dont on a fait le choix en France, ils continueront d'exister.
La vraie question est une question d'organisation des travaux parlementaires. C'est ce que le Sénat avait essayé de gérer avec les examens groupés. En fait, il existe une vraie pertinence des lois de financement de la sécurité sociale. On a créé, avec les PLFSS, un cadre de pilotage financier tout à fait particulier, sui generis, une pédagogie du solde, de l'équilibre ou du déséquilibre par branche, qui a permis un débat public annuel, de mettre le système sous tension et de le réformer en continu, malgré des crispations très fortes.
En fait, bien qu'ayant conscience de l'hétérodoxie de ma position, j'aurais plutôt tendance à penser que les LFSS et la LOLFSS sont à de nombreux égards un modèle. On n'a plus voté le budget de l'État en équilibre depuis 1974, et on a, en moins de quinze ans, une trajectoire de retour à l'équilibre des finances sociales, alors même que les masses sont largement supérieures. Une véritable question de gestion des excédents va donc se poser, ainsi qu'une question d'architecture du financement de la protection sociale et de transfert vers l'État.
Il existe d'ores et déjà des outils de pilotage financier concernant toutes les administrations publiques : le débat d'orientation des finances publiques, les débats sur les prélèvements obligatoires. Puis on a créé les LPFP qui sont normalement un outil d'unification de l'ensemble des dépenses publiques. Il faut cependant avoir conscience que le pilotage des dépenses et en particulier des dépenses d'intervention potentiellement non limitatives est assez critiqué. Ce sont les débats que vous avez sur les lois de finances : comment s'assure-t-on de la sincérité des prévisions de dépenses d'allocations aux adultes handicapés (AAH), de primes d'activités ? Ces débats montrent que ce mode de pilotage n'est pas nécessairement justifié.
À titre personnel, je recommanderai d'éviter une démarche de « vente à la découpe » des lois de financement de la sécurité sociale. Il me semble que le fait d'avoir un tout-en-un permet un débat équilibré sur la trajectoire, assortie de projections quadriennales.
L'idée a été avancée d'une loi de règlement « toutes administrations publiques » (APU). Pourquoi pas ? Il faudrait cependant que les finances de l'État puissent, en termes de délais de dépôt, faire preuve de la rigueur dont on fait preuve en loi de financement et que ce support existe en plus. Le débat sur la loi de règlement devrait intervenir dans une période très chargée, avant le débat des lois financières de l'année. Aurait-on la capacité de le mettre en place ?
Côté recettes, il vaudrait mieux selon moi ne pas modifier le texte constitutionnel, mais travailler le cadre organique et la loi ordinaire. Cela signifie donner le monopole à la loi de financement ou à la loi de finances dès lors qu'une recette est majoritairement affectée à l'une ou l'autre sphère, permettant ainsi de clarifier le débat sur les recettes, rendre le cas échéant la sécurité sociale éligible au prélèvement sur recettes comme l'Union européenne ou les collectivités territoriales, et mettre en place des comptes pro forma pour objectiver ces « tuyauteries » entre l'État et la sécurité sociale, ainsi qu'une annexe commune entre PLF et PLFSS pour apprécier les transferts de dépenses et de recettes entre les deux sphères.
En fait, on pourrait même faire évoluer les lois de finances en proposant de leur appliquer le même chaînage vertueux que les lois de financement de la sécurité sociale. On pourrait rêver et avoir une approche quaternaire des lois de finances : première partie, loi de règlement, deuxième partie, loi de finances rectificative, troisième et quatrième parties, recettes de la loi de finances initiale et dépenses, même si cela pose un certain nombre de problèmes techniques.
À côté de cela, on aurait les LPFP et on pourrait avoir une loi commune de règlement. La question est de savoir si l'on aurait besoin d'une base constitutionnelle sur ces sujets.
S'agissant du périmètre des LFSS, M. Olivier Véran a proposé un amendement qui, initialement, proposait de remplacer à chaque fois la mention de « loi de financement de la sécurité sociale » par celle de « protection sociale ». Cela ne touchait que les dispositions constitutionnelles introduites en 1996 qui, si ma mémoire est bonne, avaient conduit certains partenaires sociaux et certains acteurs politiques à redouter une étatisation de la sécurité sociale.
Or les mêmes acteurs se sont inquiétés de l'effacement de la notion de sécurité sociale pour la seule référence aux lois de financement au profit de la protection sociale.
En fait, le sujet n'est pas celui-là -l'article 34 de la Constitution parlant d'ailleurs toujours de la sécurité sociale- mais bien celui du champ des LFSS. Et, de ce point de vue, l'évolution proposée me semble tout à fait adaptée. On a réussi à créer du pilotage, de la clarté en matière de dépenses et de recettes publiques grâce à la loi de financement de la sécurité sociale. Ce qui est étonnant, c'est de ne pas intégrer dans cet outil l'action sociale et les soutiens de l'État ou autres -dépenses AAH, primes d'activité, etc.- et d'autre part, les champs des institutions de retraites complémentaires et de l'assurance chômage. Cela introduit une modification de l'article 34. Le débat est en cours à l'Assemblée nationale.
On est cependant confronté en la matière à l'hostilité de l'État. Il est par ailleurs compréhensible que les partenaires sociaux éprouvent, eux, une hostilité naturelle à toute remise en cause de l'autonomie des retraites complémentaires et de la gestion de l'assurance chômage. On peut apporter de ce point de vue plusieurs garanties. La première est de considérer que le débat existe puisqu'il figure en loi de programmation des finances publiques. On leur assigne déjà des soldes. Mieux vaut l'objectiver.
Ceci permettrait de disposer d'un véhicule unique permettant de faire le point sur l'état des recettes et des dépenses et les objectifs politiques qu'on poursuit, et de déterminer à quel niveau intervient le Parlement, dans le respect du champ d'intervention des partenaires sociaux, C'est une architecture qui, de ce point de vue, me semble présenter un certain nombre de garanties.
On peut choisir une position alternative qui serait moins satisfaisante mais qui marquerait déjà un gros progrès et, plutôt que d'avoir une loi de financement de la protection sociale obligatoire, prévoir des annexes comportant peut-être l'idée de coordination entre les dispositions des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.
Dernière idée qui fait souvent florès : imaginer une règle d'or des finances sociales. Mon sentiment est que le cadre constitutionnel ne le permet pas forcément. La question serait plutôt de voir ce qu'on pourrait faire de ce point de vue dans le champ de la loi organique.
Au-delà, il existe de nombreuses autres idées, mais qui relèvent, là aussi, plus du champ du débat sur les lois organiques, que j'ai évoqué en creux, que de la réforme constitutionnelle.