Intervention de Jean-Pierre Sueur

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 26 juillet 2018 à 8h30
Audition de M. Jacques Toubon défenseur des droits

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur, rapporteur :

Monsieur le secrétaire général, vous avez fait état de l'autorisation qui vous a été donnée par le Président de la République de venir répondre à nos questions. Cette autorisation n'était pas nécessaire, elle n'était pas utile et elle n'a pas d'effet, pour la raison simple que nous considérons que tout citoyen doit, en vertu de la Constitution, venir répondre aux questions d'une commission d'enquête parlementaire dès lors qu'il y est convié, à la seule exception du Président de la République, que nous n'avons jamais pensé à solliciter, contrairement à d'autres, car nous sommes, comme vous-même, très attachés à la séparation des pouvoirs et aux principes de notre Ve République.

Ceci étant précisé, je reviens sur l'article 40 du code de procédure pénale, lequel va bientôt supplanter en popularité un autre article 40 dans les assemblées parlementaires.

Vous nous avez dit que vous n'aviez pas cru devoir saisir le procureur de la République. Nous avons posé cette question à environ six personnes. M. le préfet de police a dit qu'il ne lui appartenait pas de le faire, au motif que M. Benalla relevait de la présidence de la République. M. le ministre de l'intérieur nous a dit la même chose. Quand on interroge au plus haut niveau les représentants de l'Élysée, nous obtenons la réponse que vous venez de donner. Il peut apparaître singulier - je dis : « il peut », car nous sommes très prudents ici et nous avons raison de l'être - que la justice n'ait été saisie - elle s'est en fait auto-saisie - que lorsque M. Benalla a fait appel à trois fonctionnaires pour obtenir une vidéo. L'usage de la violence à l'égard de citoyens et le fait de s'approprier indûment les insignes de la police nationale ne sont-ils pas suffisamment graves pour justifier la saisine immédiate du procureur de la République ?

Par ailleurs, depuis l'audition de M. le directeur de cabinet, j'ai reçu un certain nombre de messages de spécialistes du droit du travail qui se demandent s'il est conforme au code du travail qu'une mise à pied avec réduction de salaire à due concurrence soit mise en oeuvre sur les congés non pris. Il me semble qu'une étude juridique approfondie, notamment sur la notion d'indemnités compensatrices relatives à des congés, ne serait pas inutile.

Pour revenir à l'essentiel, je prends bien en compte ce que vous avez dit sur les services rendus par M. Benalla et sur les appréciations positives qu'il a suscitées, mais son attitude incompréhensible, inacceptable, selon le Président de la République lui-même, ne justifiait-elle pas de lui retirer toute tâche relative à la protection et à la sécurité à l'issue de sa mise à pied, comme l'a d'ailleurs dit le porte-parole de la présidence ? Or M. Benalla a été vu aux côtés du Président de la République dans des situations extrêmement sensibles et publiques, que ce soit au Panthéon, le 14 juillet, ou à l'arrivée des Bleus à Roissy, laquelle a suscité quelques discussions avec la gendarmerie. Comment pouvez-vous justifier cela ?

M. Strzoda s'est donné beaucoup de mal pour nous expliquer que sa fonction n° 1, avant sa mise à pied, était d'une nature différente de sa fonction n° 2, après sa mise à pied, mais je dois vous dire que je n'ai pas été totalement convaincu.

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