Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 26 juillet 2018 à 15h00
Lutte contre les rodéos motorisés — Adoption définitive en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « exaspération », c’est le mot qui revient constamment dans la bouche des maires et de nos concitoyens qui subissent les nuisances liées aux rodéos motorisés.

Cette exaspération tient à des questions de sécurité sur la voie publique et de nuisances sonores, qu’il ne faut pas sous-estimer. Dans le département du Loiret, nous avons été saisis de ces sujets dans plusieurs communes, notamment à Sully-sur-Loire et à Fleury-les-Aubrais. Mon collègue Jean-Noël Cardoux apportera des précisions sur ce point, les témoignages vivants étant particulièrement éclairants pour justifier les textes de loi.

Madame la ministre, vous avez eu raison d’insister sur l’accord unanime qui s’est fait jour à l’Assemblée nationale, ainsi que sur le large consensus qui s’est dégagé parmi les sénateurs, très attachés à l’intérêt public. J’ajouterai que nous sommes capables d’organiser des commissions d’enquête parlementaires, dans un climat où chacune et chacun apporte sa contribution pour établir la vérité, mettre en lumière les dysfonctionnements et proposer des mesures. Nous ne sommes pas un tribunal, mais notre rôle est d’accomplir une mission de service public. Ceux qui méconnaissent l’utilité du Sénat pourraient peut-être y réfléchir, monsieur le président de la commission des lois.

Mes chers collègues, le texte dont l’examen nous rassemble aujourd’hui était nécessaire. Il permet tout d’abord de définir enfin les rodéos motorisés : il s’agit du « fait d’adopter, au moyen d’un véhicule terrestre à moteur, une conduite répétant de façon intentionnelle des manœuvres constituant des violations d’obligations particulières de sécurité ou de prudence, prévues par les dispositions législatives et réglementaires du code de la route, dans des conditions qui compromettent la sécurité des usagers de la route ou qui troublent la tranquillité publique ». Ces agissements seront punis « d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

Cette définition est très claire : il doit y avoir intentionnalité, violation du code de la route, atteintes à la sécurité des usagers ou à la tranquillité publique.

Ce délit appelle une sanction ; cela va sans dire, mais il est parfois utile de le rappeler pour nos concitoyens. Il s’agit d’une sanction maximale : le juge portera son appréciation au regard des faits dont il aura eu connaissance.

Madame la rapporteur, vous avez décliné, à juste titre, ce qui figure dans cette proposition de loi. Vous avez mentionné, tout d’abord, que les peines seront alourdies si les faits sont commis en réunion, ou encore sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants.

Une peine spécifique est par ailleurs instituée – c’est très important, mes chers collègues – pour réprimer l’incitation à ces rodéos motorisés ou leur organisation. Dans la plupart des cas, l’incitation comme l’organisation s’effectuent par le biais de ce qu’on appelle les « réseaux sociaux » ; permettez-moi d’ailleurs de faire remarquer que ceux-ci ne sont pas toujours très sociaux ! L’anonymat ne peut pas être toléré en cette matière : il importe vraiment que les personnes qui incitent et qui organisent puissent être sanctionnées.

La proposition de loi prévoit en outre sept peines complémentaires, qui sont justes : la confiscation du véhicule ; la suspension du permis de conduire pour trois ans ; l’annulation dudit permis, avec impossibilité de le repasser pendant trois ans ; les travaux d’intérêt général, dont Mme la rapporteur a mentionné dans son rapport qu’ils seront très utiles à l’encontre de certains de nos jeunes concitoyens ; les jours-amendes ; l’interdiction de conduire des véhicules à moteur pendant cinq ans ; enfin, des stages de prévention. Tout cela est très bon et nécessaire : il fallait que les sanctions applicables à ce délit spécifique fussent déterminées.

Je terminerai mon propos, madame la rapporteur, en reprenant certaines des propositions que vous avez faites à juste titre.

Tout d’abord il m’apparaît nécessaire que l’on puisse utiliser la vidéo pour la mise en œuvre de ce texte. Il sera sans doute nécessaire, madame la ministre, d’adopter quelques dispositions réglementaires à cet égard.

Pour les forces de police et de gendarmerie, atteindre les contrevenants, les dépasser, les arrêter et les interpeller est une tâche ardue, difficile et parfois impossible pour des raisons de sécurité évidentes. Le recours à la vidéo serait donc très utile, d’autant que nombre des véhicules utilisés pour ces rodéos ont été volés et que leur plaque minéralogique a été changée.

Il est tout aussi certain qu’il faudra des moyens supplémentaires, madame la ministre. Ils seront nécessaires pour élucider l’affaire et pour découvrir qui possède le véhicule que l’on va confisquer.

En effet, ce texte comporte une clause utile, qui empêche la confiscation d’un véhicule qui aurait été volé et dont le propriétaire n’est donc pour rien dans son utilisation au sein d’un rodéo. Il faudra donc retrouver tant le propriétaire du véhicule que le responsable de son utilisation, ce qui peut être encore compliqué par le changement de la plaque minéralogique. Il faudra donc de nouveaux moyens pour la police et la gendarmerie, comme les organisations professionnelles de la police n’ont pas manqué de nous le signaler.

Enfin, madame la ministre, il faudra à l’évidence faire œuvre de prévention. La sanction est indispensable, mais la prévention est utile.

Nous ne manquions pas d’idées – vous nous connaissez, madame la ministre – pour déposer des amendements. Nous aimons le faire ; c’est un peu notre travail. Pourtant, nous avons réfréné notre ardeur.

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