Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 25 juillet 2018 à 10h05
Déplacements à washington du 15 au 18 mai 2018 et à berlin les 13 et 14 juin 2018 — Communication

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

J'en viens maintenant plus spécifiquement à l'avenir de l'Union européenne et de la zone euro.

Plusieurs de nos interlocuteurs ont rappelé les nécessaires efforts des États européens en situation de déficit pour mener à bien des réformes structurelles pendant que la croissance reste soutenue. Certains ont ainsi affirmé que la Commission européenne aurait pu être plus stricte en termes de respect des règles du pacte budgétaire européen (TSCG) compte tenu de la conjoncture favorable.

Contrairement à ce que l'on évoquait pour les États-Unis il y a quelques instants, avec un président et son administration qui mènent une politique tendant à augmenter le déficit, l'Allemagne attend de ses partenaires économiques européens qu'ils profitent de cette fenêtre d'opportunité pour mener les efforts nécessaires.

Concernant la fiscalité des entreprises, nous avons évidemment interrogé les personnes rencontrées sur la position de l'Allemagne concernant les deux projets de directives relatives à la taxation des activités numériques. Dans la feuille de route franco-allemande, l'Allemagne semble encore soutenir cette initiative. Mais, il nous est apparu très clairement que, tout en partageant le constat selon lequel BEPS ne réglait pas le problème, l'Allemagne privilégiait une solution internationale.

En outre, le principe d'une taxation en fonction de là où se trouve l'utilisateur et où le contenu est créé constitue également un changement de paradigme, et ne manque pas d'interroger plus globalement nos interlocuteurs allemands.

Nous avons ainsi compris que la réforme était soutenue dans son objectif mais que les solutions proposées, tant à court terme qu'à long terme, faisaient l'objet d'une certaine frilosité, voire d'hostilité.

D'importants progrès nous avaient été annoncés lors de notre déplacement pour les négociations de l'Accord sur l'assiette commune de l'impôt sur les sociétés (ACIS) et se sont concrétisés dans le cadre de la feuille de route franco-allemande présentée quelques jours plus tard.

Cette feuille de route entre les deux États a également été l'occasion d'arrêter un certain nombre de propositions destinées à consolider l'Union économique et monétaire (UEM), avec en particulier le renforcement du mécanisme européen de stabilité (MES) ou encore de l'union bancaire. À ce titre, nous avons pu constater que les Allemands s'interrogeaient toujours, voire pour certains, adhéraient peu au mécanisme européen de garantie des dépôts en Allemagne. C'est notamment le cas des banques qui ne souhaitent pas que les épargnants allemands se retrouvent à garantir les « mauvais choix » pris par d'autres pays.

Surtout, dans leur position commune, la France et l'Allemagne proposent de doter la zone euro d'un projet de budget d'ici 2021, « afin de promouvoir la compétitivité, la convergence et la stabilisation dans la zone euro ». Aucun montant n'est pour autant avancé. Bref, nous avons du mal à savoir ce que veulent les Allemands.

Sans transition, j'en viens à notre dernier thème : la procédure budgétaire.

En Allemagne, le « projet d'état prévisionnel et de loi de finances » est élaboré par le ministère des finances et adopté par le gouvernement fédéral, avant d'être examiné par le Parlement. Il comprend un budget d'ensemble et plusieurs budgets particuliers, lesquels détaillent le montant et la nature des recettes et des dépenses prévues pour chaque ministère et autorité fédérale suprême.

Du point de vue du calendrier budgétaire, la préparation du budget débute plus tôt en Allemagne qu'en France, dès novembre-décembre de l'année n-1, avec l'expression des besoins des ministères.

Ensuite, le texte est transmis au Parlement au plus tard lors de la première semaine de la session de septembre. Toutefois, il l'est généralement dès la fin du mois d'août, soit près d'un mois plus tôt qu'en France. Le Parlement dispose ensuite de près de 4 mois pour examiner le budget. Ainsi, alors que l'idée est émise de réduire le temps d'examen de la loi de finances en France, on constate que le Parlement allemand dispose de plus de temps, leur permettant de procéder à un examen de qualité.

Après une « première lecture » qui correspond à plusieurs jours de débat général en séance, le texte est renvoyé à la commission du budget où des rapporteurs examinent les postes de dépenses des ministères.

Le Bundestag comprend à la fois une commission des finances et une commission du budget : la commission du budget est chargée de l'examen du projet de budget et de contrôler son exécution ; la commission des finances est compétente pour tous les autres dossiers relevant du ministère fédéral des finances (recettes, droit bancaire, marchés financiers...).

À partir des recommandations des rapporteurs, la commission du budget propose un projet de budget modifié. C'est ce qui explique qu'en séance publique, très peu d'amendements soient présentés et adoptés. L'essentiel s'est passé en commission.

Une fois que le Bundestag s'est prononcé sur chaque budget particulier (« deuxième lecture »), il est prévu un vote final sur l'ensemble du projet modifié (« troisième lecture »).

Le Bundesrat travaille quant à lui parallèlement au Bundestag et dispose de 6 semaines. Il peut émettre des réserves sur lesquelles le Bundestag doit se prononcer.

De nos échanges avec nos homologues parlementaires, nous retenons tout d'abord une similitude avec notre procédure dans le travail approfondi de la commission, reposant sur des rapporteurs spéciaux pour chaque budget.

Ensuite, il existe une très grande proximité du Parlement avec la Cour des comptes, ses représentants étant même présents lors de l'examen des politiques publiques, pour répondre aux questions.

Du point de vue de l'évaluation et du chiffrage des amendements, le Bundestag ne dispose pas vraiment de moyens propres. Au contraire, les parlementaires travaillent directement avec les chiffres du ministère des finances qu'ils peuvent apparemment directement solliciter à cet effet.

Enfin, il n'existe pas d'article 40 proprement dit. Les groupes politiques s'accordent en revanche, au début de la période budgétaire, sur les règles qu'ils se fixent, par exemple en termes de compensation demandée lorsqu'une augmentation des dépenses est envisagée. Généralement, les députés ont pour ambition de faire mieux que le Gouvernement en termes de maîtrise des dépenses et du déficit.

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