Je vais retracer la chronologie du 1er mai, pour que nous soyons bien d'accord.
Vous me demandez si l'événement du 1er mai a fait l'objet d'un compte rendu ; mais, pour moi, au soir du 1er mai, l'événement de la journée, ce n'est pas M. Benalla, très clairement. L'événement de la journée, ce sont les dix heures passées, avec deux autres commissaires de police, trois compagnies républicaines de sécurité et deux engins lanceurs d'eau, à faire de l'ordre public sur le terrain, notamment à repousser 1 200 Black Blocs, individus cagoulés, gantés, armés de cocktails Molotov - j'ai récupéré et pris en photo six de ces cocktails. Pendant deux heures, sur le boulevard de l'Hôpital, de 15 à 17 heures, nous avons manoeuvré, en faisant usage de gaz lacrymogène, de grenades de désencerclement et d'engins lanceurs d'eau, dans une atmosphère extrêmement dégradée.
La question, pour moi, n'était pas de savoir où était M. Benalla ; il s'agissait de savoir comment éviter les blessés dans les rangs des forces de l'ordre et de la CRS qui était à mes côtés, l'excellente CRS 15 de Béthune, et comment intervenir sur le McDonald's qui était gravement pris à partie.
Le deuxième événement important du 1er mai, c'est ce qui se déroule sur la place de la Contrescarpe. Mais ce n'est pas l'interpellation de deux personnes qui venaient, nous dit-on, y manger des crêpes ; c'est un rassemblement de 80 à 100 personnes dont les services de renseignement nous avaient dit - cette information a été transmise sur les ondes de la DOPC, fait assez rare pour être souligné - qu'elles avaient participé très directement aux déprédations sur le boulevard de l'Hôpital. Les services de renseignement nous ont fait savoir que le « bon public » - traduisez : les individus autonomes de la mouvance contestataire radicale - était présent sur la place de la Contrescarpe, et, très clairement, pas pour pique-niquer.
Ma deuxième priorité de la journée du 1er mai était donc d'éviter la formation d'un cortège sauvage qui aurait ravagé le Quartier latin. Les instructions qui étaient les miennes, émanant de la salle d'information et de commandement, étaient de protéger le Quartier latin, d'éviter un départ de ces individus en cortège sauvage et d'intervenir très rapidement sur les barricades qui étaient susceptibles d'être montées. C'est ce que j'ai fait : le 1er mai, de 20 à 23 heures, je suis intervenu - beaucoup de vidéos en témoignent - sur un certain nombre de barricades dans les rues du Pot de Fer, Clotilde, Lhomond ou Tournefort.
Tels sont, pour moi, au moment où je suis libéré du Quartier latin, au soir du 1er mai, les deux événements importants. Le 2 mai, un autre événement devient important : c'est la fameuse vidéo.