Intervention de Sophie Taillé-Polian

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 19 septembre 2018 à 9h05
Audition de Mme Véronique Bédague-hamilius M. Ross Mcinnes et M. Frédéric Mion co-présidents du comité action publique 2022

Photo de Sophie Taillé-PolianSophie Taillé-Polian :

Votre rapport est un projet global d'administration, qui a sa cohérence - même si je n'en partage pas la philosophie - mais sans pragmatisme.

Il veut dégager de la souplesse pour certains aspects de la gestion de l'action publique, et veut donner confiance aux manageurs par le recrutement de contrats à durée déterminée (CDD). Je serais plus encline à favoriser une logique de parcours, et à mettre fin aux blocages entre catégories A+, A, B... Certains postes sont cooptés au sein des grands corps, alors qu'ils pourraient être plus ouverts, non seulement aux personnes issues du privé, mais aussi à celles ayant une grande expérience au sein du secteur public.

Vous prônez plus de souplesse du service public avec la création d'agences mais aussi le développement de la logique d'indicateurs qui me semble rigide, et donne une vision quantophrénique - pour reprendre l'expression d'un sociologue - de l'administration, avec de multiples effets pervers. Des indicateurs, certes intelligemment conçus, avec des objectifs bien définis, peuvent orienter l'action de l'administration, mais celle-ci a surtout besoin de souplesse. Au lieu de dégager de l'efficacité et des moyens, on en est réduit à faire du chiffre, comme dans la police, dans une logique bureaucratique kafkaïenne...Donnons plus de souplesse aux manageurs, alors que la mutualisation de l'action publique est très complexe, coûteuse et favorise les grands groupes. Elle n'est pas forcément efficace.

Rapporteure spéciale de la mission « Travail et Emploi » avec Emmanuel Capus, je m'interroge sur l'adaptation aux cycles économiques. Comment prévoir ces cycles ? Les effectifs de Pôle Emploi ont été réduits l'année dernière pour cette raison, or la baisse du chômage attendue n'est pas là. Augmenter le recours aux CDD renforce la précarité des agents, ce n'est pas une bonne logique humaine, surtout si l'on veut orienter Pôle Emploi sur les personnes les plus en difficultés. Celles-ci auraient en face d'elles des personnes précaires ? Ce n'est pas une bonne dynamique. Oui, il faut plus de moyens, centrés sur les personnes en difficulté. Mais faut-il réduire le service public à un « rôle croupion », tandis que le secteur privé avec une mission de service public récupèrerait toutes les missions qui rapportent ? Qui paierait la rentabilité du secteur privé : les salariés en recherche d'emploi ou les entreprises ?

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