Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi qui est soumise au vote aujourd’hui répond à un enjeu important pour les promoteurs de recherche impliquant la personne humaine, puisqu’elle vise à renforcer l’efficacité du tirage au sort des comités de protection des personnes, les CPP.
Ce texte, auquel le Gouvernement, par la voix de Mme la ministre des solidarités et de la santé, était favorable à l’Assemblée nationale en première lecture, contribue à l’une des priorités du Gouvernement : maintenir et renforcer l’attractivité de la France en matière de recherche impliquant la personne humaine tout en assurant la sécurité des personnes qui s’y prêtent.
Cette mesure était également préconisée par le rapport sur les médicaments innovants, porté par les sénateurs Yves Daudigny, Catherine Deroche et Véronique Guillotin, que je veux ici remercier.
Notre pays figure parmi les trois États européens les plus attractifs en matière de recherche, aux côtés de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne. Toutefois, depuis quelques années, les chiffres témoignent que nous accusons un retard pour les essais cliniques de phase 1, ceux qui correspondent le plus souvent à la première administration d’un médicament à l’homme.
Aujourd’hui, nous devons non seulement rattraper ce retard pour tenir notre rang, mais aller au-delà, car notre pays a les capacités d’être un leader mondial de la recherche clinique.
À l’occasion du 8e Conseil stratégique des industries de santé, le CSIS, qui s’est tenu en juillet dernier, le Premier ministre a souhaité que le renforcement de l’attractivité de la recherche française soit l’un des axes prioritaires.
L’objectif est de faire de la France, à 5 ans, le premier pays européen en recherche clinique.
Lors de son discours, le Premier ministre a bien noté que, ces dernières années, l’allongement des délais d’autorisation a entravé l’essor des essais cliniques, ce dont tout le monde pâtit : la recherche, les patients et l’industrie.
Aussi, il a annoncé vouloir réduire drastiquement les délais, en les abaissant dès 2019 à 45 jours pour l’Agence nationale de sécurité du médicament, et à 60 jours pour les comités de protection des personnes.
Atteindre cet objectif suppose la mobilisation de chacun.
L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, a d’ores et déjà adapté son organisation en mettant en place une phase pilote de fonctionnement selon les exigences du règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments.
Mais les promoteurs, les comités de protection des personnes, ou CPP, dont il est question aujourd’hui, doivent également se mobiliser.
La proposition de loi, qui a recueilli un accueil favorable de votre part lors de son examen en commission, apporte une solution à un point de cristallisation de la mise en œuvre, en novembre 2016, de la réforme des recherches impliquant la personne humaine : le dispositif d’attribution purement aléatoire par un système d’information du dossier de recherche à un CPP.
Comme l’a déjà souligné Agnès Buzyn, ce texte permet de maintenir l’exigence de déontologie forte qui était légitimement voulue lors de la mise en place de ce tirage au sort, à savoir l’absence de tout conflit d’intérêts. Aussi, il s’agit bien d’améliorer le tirage au sort, mais certainement pas de le remettre en cause par un mécanisme qui reviendrait à une spécialisation des CPP.
Cette proposition de loi répond en même temps à la volonté des personnes malades et des professionnels de santé d’accéder dans les meilleurs délais, lorsque cela est possible, à des traitements innovants.
Les travaux à l’Assemblée nationale ont ainsi conduit à ajouter de nouveaux critères afin de rendre le tirage au sort plus efficace.
Le critère de disponibilité permettra de réguler plus finement l’attribution des dossiers et leur examen dans les délais prévus par la réglementation. Ce critère permettra de prévoir un nombre de dossiers traités par les CPP, afin d’éviter l’engorgement des comités, de lisser leur activité et donc d’éviter un retard dans l’examen des dossiers.
Le critère de compétence, quant à lui, permettra de résoudre la question du défaut d’expertise de certains CPP pour l’examen de projets de recherche sur des thèmes particuliers.
Les études avaient ainsi montré que des CPP rencontraient des difficultés à recourir à certaines expertises, les conduisant parfois à rendre des avis très au-delà des délais réglementaires.
Le critère de compétence permettra à des CPP, compte tenu de leur composition et de leur capacité à recourir à l’expertise, de déclarer eux-mêmes, de façon transitoire, ne pas être en mesure d’évaluer certains types de dossiers.
L’ensemble des CPP gardera bien une compétence générale pour donner un avis sur l’ensemble des dossiers de recherche. Cela ne ralentira pas les processus d’instruction, bien au contraire.
Ces deux critères de « disponibilité » et de « compétence » contribueront à rendre plus efficient le tirage au sort. Ils sont à la fois nécessaires et suffisants pour répondre à l’enjeu de diminution drastique des délais d’autorisation des essais cliniques, dont chaque acteur pâtit, en premier lieu les patients.
Cette proposition de loi intervient alors même qu’un ensemble d’actions visant à l’amélioration du fonctionnement des CPP est mis en œuvre.
En effet, le Gouvernement s’est engagé à améliorer les conditions d’exercice des CPP. Nous travaillons par ailleurs à la clarification de l’environnement réglementaire et à la qualification des recherches, ainsi que sur une grille commune d’évaluation des dossiers.
Enfin, cette proposition de loi s’inscrit dans un cadre réglementaire européen en transition : les règlements européens portant sur les essais cliniques de médicaments et sur les dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro entreront en vigueur respectivement en 2020 et en 2022.
Or, dans ce cadre, un CPP qui ne répondrait pas dans les délais prévus par ces règlements rendrait par défaut un avis favorable. Chacun pourra convenir que cela serait préjudiciable à la sécurité des personnes se prêtant volontairement aux essais cliniques.
Aussi, il est indispensable de permettre aux CPP de rendre des avis de qualité dans les délais. C’est l’objectif de cette proposition de loi.
Le Gouvernement se réjouit de la perspective de voir les deux chambres parvenir à un accord dès la première lecture.
Et nous poursuivrons ensemble le travail pour renforcer la recherche clinique française !