Intervention de Annick Girardin

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 5 juin 2018 : 1ère réunion
Jeunesse des outre-mer et le sport — Audition de Mme Annick Girardin ministre des outre-mer

Annick Girardin, ministre des outre-mer :

Je souscris à votre constat sur le retard en matière d'infrastructures sportives, d'encadrement, de formation ou encore de moyens dédiés aux déplacements. On peut dire que certains de nos outre-mer sont des territoires sous-développés et que les défis à relever ne concernent malheureusement pas que le sport. Le plan Kanner a permis de donner de la visibilité au projet sportif pour les outre-mer et de l'afficher comme une priorité aux yeux des fédérations sportives pour lesquelles ce ne relevait pas toujours de l'évidence. Qu'une somme soit réservée dans les fonds du CNDS est certes positif, mais il ne s'agit pas d'un fonds spécifique contrairement à l'idée qui a pu être véhiculée. De même, une enveloppe est réservée au sport au sein du FEI. La somme globale dédiée au sport au titre du plan Kanner a été arrêtée à 20 millions d'euros par an ; ce montant a bien été respecté en 2017, même si le ministère des sports a apporté davantage que sa quote-part et le ministère des outre-mer moins du fait des priorités qui se sont imposées par ailleurs. Pour 2018, le ministère des sports a décidé d'affecter 7 millions d'euros à la mise en oeuvre du plan Kanner et le ministère des outre-mer de même, soit un total de 14 millions d'euros, ce qui n'est pas satisfaisant. Peut-être faut-il étudier l'idée d'un fonds spécifique pour le développement du sport outre-mer, qui serait abondé non seulement par ces deux ministères mais également par d'autres tels que le ministère de la santé. Les fédérations sportives et les grandes entreprises devraient également être impliquées. Il faut réfléchir autrement pour répondre aux besoins car, seul, l'État n'y parviendra pas, d'autant que les collectivités elles-mêmes sont souvent en grande difficulté financière. La question de la double, voire de la triple insularité n'est pas aujourd'hui par exemple un critère pris en compte pour le calcul des dotations qui leur sont dévolues. Si le plan Kanner est une avancée positive, il n'est cependant pas calibré de façon à répondre aux besoins des outre-mer.

Aujourd'hui, le loto culturel qui est lancé s'inspire du loto sportif et n'oublions pas que fiscalité sur les paris sportifs abondent le CNDS. Je m'interroge sur les montants récoltés par la Française des jeux dans les outre-mer alors que les populations ultramarines sont très joueuses.

Sur la question de l'appui en ingénierie, qui correspond à une priorité pour nos outre-mer, je me félicite de l'annonce par le ministère des sports d'une dotation de 40 000 euros par territoire. Il faut travailler à l'équilibrage territorial des infrastructures sportives sur la base de l'élaboration de schémas territoriaux qui favoriseront la coordination entre les acteurs et donc l'éclosion des projets et qui permettent d'établir des priorités.

Sur la question de l'accompagnement à la mobilité, l'enveloppe du FEBECS n'a cessé de se réduire et j'ai préconisé un doublement de son montant pour 2018. Cependant, tous les contributeurs ne sont pas au rendez-vous et, actuellement, l'objectif des 2 millions d'euros paraît compromis car nous sommes à 1,4 million. Mais je ne renonce pas ! Il faut préciser que tous les territoires ne sont pas à la même enseigne : les collectivités de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française n'en bénéficiaient pas et je leur ai alloué une enveloppe de 50 000 euros. Il faut de mon point de vue réviser la circulaire relative aux FEBECS pour intégrer de nouveaux indicateurs au-delà du simple critère d'évolution démographique, tels que l'éloignement. Cependant le FEBECS couvre d'autres domaines que le sport, ce qui complique le choix des critères.

Concernant les bénévoles, il faut reconnaître qu'ils sont confrontés à de véritables parcours du combattant, qu'il s'agisse des présidents d'associations, des entraîneurs, des encadrants, pour monter les dossiers avec la nécessité de démarcher les différents ministères et les collectivités. Je serais favorable à un guichet unique et à un fonds unique. Nous avons actuellement des bureaux d'information jeunesse (BIJ), il nous faudrait des bureaux dédiés non seulement aux jeunes mais aux acteurs accompagnant la jeunesse. Il faudrait outre-mer informer les associations et les entreprises de l'existence du pacte performance, qui reste ignoré. Il existe de nombreux dispositifs d'accompagnement tels que des bourses, notamment mis en place par les territoires : là encore il faut améliorer l'accès à la connaissance de ces dispositifs par ceux qui en sont potentiellement les destinataires.

La suppression des emplois aidés, dispositif national, a été brutale et a eu un impact très négatif pour les outre-mer ; j'étudie, notamment dans le cadre des Assises, d'éventuels palliatifs.

La question de la participation des sportifs à des compétitions internationales sous la bannière des territoires est complexe car il faut pouvoir à la fois pouvoir participer à la coopération régionale et faire en sorte qu'une sélection régionale ne soit pas amenée à affronter l'équipe de France.

Concernant l'usure accélérée des équipements, il est largement imputable à nos climats extrêmes en termes de températures, de vent et de précipitations. Les normes de construction ne tiennent pas compte de ces spécificités, ni d'ailleurs des évolutions du climat. Il faudrait évoluer en la matière, privilégier des modes de construction traditionnels et encourager l'innovation. Le 5 mars dernier, cinq collectivités ont participé à une démonstration d'équipements sportifs innovants lancée par le ministère des sports et nous devons poursuivre dans cette direction.

L'accès au sport des plus jeunes, dans les cadres scolaire et périscolaire, est primordial ; l'apprentissage de la natation constitue un impératif dans des territoires baignés dans l'océan mais qui, paradoxalement, ne disposent pas ou seulement de très rares piscines. Mayotte en est totalement dépourvue. La solution de mise en place de bassins en mer me paraît pertinente dès lors qu'il n'y a pas de risque particulier, comme les requins à La Réunion.

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