Intervention de Sébastien Audebert

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 15 mars 2018 : 1ère réunion
Risques naturels majeurs en outre-mer — Visioconférence avec la réunion

Sébastien Audebert, directeur de cabinet du préfet :

Je vous prie de bien vouloir excuser le préfet, actuellement en déplacement sur Paris pour assister à La Réunion des préfets d'outre-mer. Je suis entouré des principaux services concernés par la prévention et la gestion de crise à La Réunion : Météo France, la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL), le bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), le service départemental d'incendie et de secours (SDIS), l'état-major de zone auprès du préfet et la plate-forme d'intervention régionale de l'océan Indien (PIROI) qui joue un rôle important sur le territoire et dans la zone.

Je commencerai par une présentation rapide des risques naturels auxquels le territoire est soumis. La direction générale de la sécurité civile a identifié 8 risques naturels au total, qui sont tous susceptibles de se manifester à La Réunion, à l'exception du risque sismique, plutôt faible. Les cyclones, les inondations, les mouvements de terrain, les feux de forêt, surtout entre septembre et décembre, sont les aléas principaux auxquels nous devons faire face. Je citerai à ce titre les grands incendies du Maïdo en 2010 et 2011 qui ont porté un coup significatif à la biodiversité. Il s'agit d'un enjeu majeur car le coeur de l'île est classé depuis 2010 au patrimoine mondial de l'Unesco.

Ainsi, La Réunion apparaît comme la région de France qui concentre le plus de risques naturels. À cela s'ajoute l'éloignement de la métropole, qui nous oblige à acquérir une forte capacité d'autonomie. En outre, La Réunion est territoire contraint du point de vue de l'aménagement puisque 40 % de l'île seulement est habitable, soit 1 000 kilomètres carrés sur 2 500. La population est donc très concentrée sur les littoraux, même si elle investit de plus en plus les Hauts, ce qui crée de nouveaux enjeux en matière d'aménagement et de prévention des risques.

Les services présents à cette audition sont compétents sur le volet prévention ainsi que sur le volet gestion de crise.

Je rappellerai en outre que le cyclone Berguitta a produit des effets dévastateurs à La Réunion, il y a deux mois. Les inondations qui ont frappé l'île ont résulté à la fois des fortes précipitations mais aussi d'une prise en compte insuffisante des risques naturels dans le schéma d'aménagement.

En outre, la vulnérabilité de la population est à prendre en compte, puisque 40 % des Réunionnais vivent sous le seuil de pauvreté. Bien qu'il ait connu une diminution, le taux de chômage reste élevé puisqu'il oscille entre 22 et 23 %. Malgré la mise en oeuvre d'une politique de résorption de l'habitat insalubre depuis trente ans, des progrès restent à faire dans ce domaine puisqu'il existe toujours un habitat à risque, en particulier dans les cirques où les risques d'éboulements sont élevés. Après Berguitta, les habitants de certains logements situés en bord de ravine se sont vus refuser l'accès à ces habitations pour des motifs de sécurité. Les représentants du BRGM pourront vous apporter des précisions à ce sujet, puisqu'ils ont fait le tour de ces zones à la fin du mois de janvier.

Enfin, il convient d'évoquer l'environnement régional pour compléter ces premiers éléments de contexte puisque nous travaillons en coopération avec les États de l'océan Indien. Certains sont marqués par une extrême pauvreté comme les Comores ou Madagascar, d'autres sont plus développés tels que Maurice ou les Seychelles. Ces quatre pays font partie, tout comme la France, de la Commission de l'océan Indien (COI) qui développe des programmes de coopération en matière de sécurité civile sur la prévention des risques et la gestion de crise ou encore d'alerte météorologique grâce à Météo France. L'environnement régional est très exposé au réchauffement climatique, à l'image des Seychelles qui seront particulièrement impactées par la montée des eaux. Compte tenu de la vulnérabilité particulière de ces territoires, la France joue un rôle important dans la zone puisqu'elle apparaît comme le référent pour la sécurité civile. Certaines coopérations ont déjà été menées, notamment grâce aux fonds européens comme l'Interreg, géré par le conseil régional, mais des progrès restent à faire au niveau de l'État et des collectivités, même s'il s'agit d'une compétence relevant du domaine régalien. Ces améliorations sont d'autant plus nécessaires que la fragilité de cet environnement régional, je le rappelle, est appelée à s'accroître dans les prochaines années sous l'effet du changement climatique.

Par ailleurs, les enjeux sanitaires ne doivent pas être négligés. La PIROI intervient régulièrement à Madagascar où la peste à l'état endémique continue de sévir. À l'heure actuelle, La Réunion est frappée par la dengue, et le chikungunya par le passé a causé de graves problèmes sanitaires sur le territoire. Même s'il ne s'agit pas de risques naturels, ces facteurs sont à souligner car ils doivent nécessairement être pris en compte dans le développement des coopérations régionales.

J'ajouterai un mot sur la question de l'information des citoyens en rappelant qu'au mois de juin 2017 s'est tenue la deuxième édition des Assises des risques naturels, la première ayant eu lieu en 2011. Cet événement a mobilisé tout le réseau des référents risques des collectivités, des associations mais aussi de la zone océan Indien. Ainsi, les États de la COI et le Mozambique, avec lequel nous souhaitons construire une étroite coopération, ont pu participer aux Assises. Les autorités du Mozambique nous sollicitent de plus en plus pour pouvoir bénéficier de l'expertise française puisque le pays est confronté aux mêmes risques naturels que La Réunion, notamment les cyclones.

Dans la perspective des Assises des outre-mer, la DEAL a mené un sondage afin de mesurer l'état des connaissances des risques naturels par la société réunionnaise. Cette étude a révélé un taux de confiance élevé, entre 80 et 90 %, dans la capacité de la préfecture et des collectivités à informer la population et gérer le risque cyclonique, cité comme le risque naturel le plus évident. Ce taux de confiance est encore plus élevé pour Météo France qui améliore sans cesse ses prévisions. En revanche, sur les autres aléas tels que les inondations et le volcanisme, ce sondage a révélé une méconnaissance des conduites à suivre. Or, même si le volcan de La Réunion a la particularité d'être un volcan effusif, moins dangereux, des éruptions explosives pourraient se produire. En outre, les éruptions peuvent affecter Sainte-Rose et Saint-Philippe, voire le sud de l'île et la région du Tampon et Saint-Pierre lorsqu'elles se produisent hors enclos.

J'aimerais porter à votre connaissance un dernier élément de contexte qui guidera l'ensemble du propos. 7 thèmes ont été traités lors des ateliers des Assises des outre-mer qui viennent de s'achever. Parmi eux, le sous-thème du thème 5 sur la sécurité portait spécifiquement sur la question des risques naturels majeurs et la meilleure information des populations. Le rapporteur pour la société civile était un représentant de la PIROI qui s'est appuyé sur le travail fourni en juin 2017 lors des Assises de la sécurité civile. Ainsi, nous comptons faire remonter plusieurs projets dans le cadre des Assises des outre-mer pour développer l'information, la formation et les équipements à l'échelle de la zone afin d'améliorer la prévention. Cette démarche a fait l'objet d'une large consultation auprès des acteurs locaux de la gestion des risques naturels.

J'en ai donc fini avec la présentation du contexte réunionnais et vous propose désormais d'aborder la question de la stratégie en matière de prévention. La DEAL, service pilote, pourra vous exposer le processus de mise à jour des plans dans ce domaine. Nous vous présenterons également les points à améliorer dans notre dispositif actuel.

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