Je souhaiterais m'attacher pour finir à deux points qui ont particulièrement retenu notre attention durant cette démarche : la dimension nécessairement collective de la gestion des risques, d'une part, et l'enjeu de l'information en temps de crise, d'autre part.
La gestion de crise doit être plus inclusive.
J'entends par là que la gestion des urgences doit intégrer de nouveaux acteurs dans les centres de décision, d'une part, et mieux mobiliser des forces vives complémentaires, d'autre part.
Gérer les urgences est une mission collective. Or, nous avons trop souvent entendu que certains acteurs, pourtant essentiels ou partenaires complémentaires, étaient encore trop éloignés des services de décision et de secours. Ainsi, il apparaît nécessaire que les élus soient mieux représentés dans les COD, particulièrement les exécutifs territoriaux (recommandation n° 34). De même, les médias doivent pouvoir avoir des accès aux décideurs, et des salles de presse aménagées à proximité des COD (recommandation n° 36). Cette collaboration large d'acteurs doit s'entendre très en amont pour être efficace le jour J. Aussi, nous appelons à la tenue dans chaque territoire de « séminaires annuels des risques naturels » réunissant, sous l'égide des préfets, les élus locaux et les responsables de la sécurité civile, de l'environnement et des services de soins : c'est le sens de la recommandation n° 35.
Une gestion de crise plus inclusive, c'est aussi valoriser des acteurs non gouvernementaux mais pour autant indispensables. Je pense ici aux acteurs humanitaires, aux volontaires, aux bénévoles, au service militaire adapté. La crise de l'an dernier a montré leur engagement sans faille aux côtés de nos populations.
Les bénévoles de l'urgence doivent disposer d'un statut plus sécurisé leur permettant de s'entraîner et d'être mobilisés plus facilement (recommandation n° 51).
Aussi, il convient de renforcer les capacités de mobilisation des jeunes du SMA, y compris ceux ayant fini leur formation et maîtrisant donc des techniques de déblaiement et de secours utiles dans les interventions post-catastrophes. Nous proposons ainsi la création d'une « réserve SMA » dans chaque territoire (recommandation n° 52).
J'en viens enfin à la question de la communication et de l'information. Elle apparaît centrale et transversale, à toutes les étapes des crises. Tout le monde a pu constater les impacts des rumeurs et « fake news » durant Irma, mais récemment aussi durant la crise des séismes en essaim, à Mayotte.
La gestion par les autorités sur place s'appuie de plus en plus sur le numérique et les réseaux sociaux, Facebook et Twitter étant devenus incontournables. En temps de crise, les équipes territoriales de communication doivent pouvoir être renforcées rapidement par la délégation à l'information et à la communication (DICOM) du ministère de l'intérieur (recommandation n° 55) afin de pouvoir intervenir efficacement au service d'une information fiable.
Le numérique n'est pas un obstacle à la gestion de crise : il doit être vu comme un levier d'action important.
Face aux fake news, des initiatives de « médias sociaux en gestion de l'urgence » comme celle menée par l'association VISOV (Volontaires internationaux en soutien opérationnel virtuel) doivent être valorisées : des partenariats doivent être encouragés avec les préfectures et services de secours (recommandation n° 56). Elles permettent ainsi d'aider les autorités dans la diffusion de messages certifiés et ne pas amplifier la panique déjà forte.
Il faut aussi se saisir des opportunités que permet le numérique, comme le promeut l'association HAND (Hackers against natural disasters) : des projets d'applications de gestion des catastrophes naturelles ont déjà été produits ; peu s'intéressent cependant aux spécificités de nos territoires, particulièrement l'insularité. Nous proposons de lancer un appel à projets en ce sens (recommandation n° 57).
Je terminerai en rappelant le rôle du service public audiovisuel en temps de crise. L'exemple de la radio initiée par Radio France « Urgence info Îles du Nord » en 2017 l'a montré.
Le service d'information du ministère de l'intérieur, la DICOM, conclut des conventions avec Radio France et France Télévisions. Celles-ci doivent mieux intégrer le réseau outre-mer des « 1ères » et des partenariats locaux doivent pouvoir émerger (recommandation n° 58).
Aussi, le service public audiovisuel et particulièrement la radio doivent être vus comme des services à rétablir d'urgence, par le biais d'antennes provisoires notamment (recommandation n° 59). Les stations et chaînes publiques doivent surtout, enfin, être mieux identifiées par la population comme des repères (recommandation n° 60) vers lesquels se tourner en cas de crise grave.
La communication et l'information sont décisives et portent les caractéristiques de l'ensemble des thématiques que nous vous avons présentées, à savoir l'implication des services de l'État et des territoires, l'importance de partenaires pluriels et de la société civile, au service d'une cause : la protection de nos populations.
Je forme le voeu que ce travail dense puisse nourrir la réflexion, à Paris comme dans les territoires, et que les recommandations que nous formulons aujourd'hui seront prises en compte dans le cadre du projet de loi annoncé.
Je vous remercie.