Je me permets d'insister sur la nécessité de mener des études scientifiques complémentaires pour améliorer la connaissance de l'activité sismique dans cette zone. Or, nous ne disposons pas des ressources suffisantes localement car cela nécessiterait de mobiliser des bateaux pour réaliser des sondages sur zone. Des missions d'appui devront donc être menées au regard des risques qui pèsent sur Mayotte mais aussi sur les territoires voisins qui n'ont pas non plus les moyens d'une telle entreprise. Il s'agit sans doute d'une opportunité intéressante pour développer la coopération régionale, notamment avec Madagascar et les Comores.
En ce qui concerne les autres risques naturels, Mayotte est peu soumise au risque cyclonique, le canal du Mozambique étant moins familier de ce phénomène que La Réunion. Aucun cyclone n'est ainsi passé à proximité de Mayotte depuis 2014. Mis à part en 2008, aucun épisode de cette nature n'avait frappé l'archipel depuis 1984. La situation géographique de Madagascar, situé à l'est, protège Mayotte des dépressions qui se forment dans cette zone. Malgré tout, le risque cyclonique doit être pris en compte car il pourrait avoir de graves conséquences humaines et matérielles à cause de la prégnance de l'habitat précaire qui représente aujourd'hui 37 % des logements de Mayotte. La situation est d'autant plus préoccupante que les bangas, ces cases en tôles, sont souvent construites dans des zones dangereuses. Cet urbanisme sauvage, associé à l'étroitesse et à la topographie du territoire, rendent l'archipel particulièrement vulnérable aux glissements de terrain. En janvier 2018, un banal épisode pluvieux a ainsi provoqué des éboulements qui ont causé la mort de 5 personnes. Un simple événement météorologique sensible peut donc avoir de graves conséquences. Le contexte particulier du territoire justifie que nous soyons préoccupés par les phénomènes cycloniques quelle que soit leur intensité. L'utilisation des taules pour construire ces habitats précaires peut en effet avoir des conséquences dramatiques en cas de vents violents.
Nous devons donc impérativement nous préparer à faire face à ce type de phénomène. Dans cette optique, un exercice a été organisé en début d'année pour tester la chaîne de réactivité des services, de la mise en alerte jusqu'au stade de l'apparition du cyclone. En cas de crise, 250 sapeurs-pompiers, un millier de gendarmes et de policiers pourront être mobilisés dès cet été, après l'arrivée de forces de l'ordre supplémentaires, et 350 militaires au maximum pourront être déployés sur site, sans compter le régiment du service militaire adapté (SMA). À ces moyens humains s'ajoute la mobilisation de l'ensemble des services de l'État et des collectivités également mis en tension à l'occasion de cet exercice.
Cette simulation a par ailleurs permis de tester l'efficacité de tous les documents de référence en matière de gestion de crise, notamment du plan ORSEC et de ses déclinaisons locales à travers les plans communaux de sauvegarde (PCS). Si toutes les communes ne sont pas dotées de PCS, la plupart d'entre elles ont d'ores et déjà entamé des démarches en ce sens.
Nous devrions être en capacité de réagir rapidement en cas de crise majeure, à condition de pouvoir bénéficier de l'appui de services de l'extérieur. La Réunion joue un rôle majeur à cet égard puisqu'elle dispose de moyens humains considérables, et notamment du 2e régiment de parachutistes. Elle accueille par ailleurs la plate-forme d'intervention régionale de l'océan Indien (PIROI). Le matériel de la PIROI pourrait être facilement projeté à Mayotte en cas de crise, comme cela a déjà été fait par le passé pour des territoires voisins comme Madagascar. Pour autant, les urgences telles que les premiers secours et le dégagement des axes routiers devront être gérées très rapidement, ce qui implique que les forces de l'ordre et les services administratifs de Mayotte soient particulièrement réactifs et efficaces. Si les dégâts étaient très importants, nous serions rapidement confrontés à des difficultés d'intervention. Des renforts en provenance de La Réunion et de métropole devraient alors être déployés dans l'urgence. Or, cela nécessite d'abord que nous soyons en mesure d'assurer la sécurisation des sites prioritaires tels que l'aéroport et le port pour permettre le débarquement des moyens humains et matériels. Ces opérations sont d'autant plus difficiles à mener que la plupart des bâtiments ne sont pas construits aux normes sismiques, y compris les locaux des sapeurs-pompiers.
Nous devons par ailleurs mener des actions de prévention afin de limiter en amont les dégâts potentiels en cas de risque naturel majeur. La sécurisation de l'habitat est évidemment l'enjeu majeur de la politique de prévention, mais la situation est si grave que ce problème ne pourra pas être résolu à court terme. Dans cette optique, des efforts importants sont fournis pour accélérer l'élaboration des plans de prévention des risques naturels (PPRN). Cette démarche, entreprise en 2009, devrait aboutir en 2019 ou 2020. Nous espérons d'ores et déjà produire 3 PPRN en 2018 en travaillant en liaison étroite avec les collectivités. J'ajouterai que le risque de submersion n'est pas traité dans les PPRN. Il conviendra donc de mener un travail complémentaire sur ce sujet, d'autant plus que des bidonvilles se sont construits en zone littorale.
Je conclurai en apportant un complément d'information sur les tempêtes tropicales, dont l'intensité est moins importante que celle des cyclones mais qui frappent régulièrement Mayotte. Nous disposons, dans l'océan Indien, d'une classification de ces phénomènes différente de celle qui est mise en oeuvre aux Antilles. Je considère que ce système, qui différencie la vigilance cyclonique et la vigilance classique, est trop complexe et difficilement compréhensible pour la population. Il me paraît donc essentiel qu'une réflexion soit menée pour améliorer la lisibilité du dispositif d'alerte.