Intervention de Renaud Donnedieu de Vabres

Réunion du 20 novembre 2006 à 22h00
Diffusion audiovisuelle et télévision du futur — Question préalable

Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication :

Je ne vous prends pas pour Malraux mais, en écoutant vos propos, je me disais qu'au fond je n'avais peut-être pas su vous faire comprendre à quel point l'ensemble des dispositifs contenus dans ce projet de loi, comme dans celui qui l'a précédé en 2004 et comme dans celui qui l'a préparé en 2000, est une avancée extraordinaire pour l'ensemble de nos concitoyens.

Bien entendu, nombre de problèmes sont sur la table et constituent autant de défis. Mais, il ne faut pas bouder de temps en temps les étapes et les progrès que la technologie représente pour nos concitoyens.

Certes, la technologie et la mondialisation font parfois peur, alors que le progrès technique apparaît en certaines circonstances comme destructeur. Mais, en l'occurrence, s'il est intelligemment encadré, le progrès ne comporte que des aspects positifs, s'agissant tant de l'offre de liberté pour nos concitoyens que du soutien à l'activité pour les acteurs des sociétés de programmes ou de télévision.

Nous avons un rendez-vous important ; il faut l'honorer et non le différer.

Au-delà des postures de principe - elles sont naturelles entre une majorité et son opposition républicaine -, je voudrais brièvement insister sur deux points. D'une part, il y a effectivement lieu d'avoir une discussion sur ce sujet positif. D'autre part, notre débat permettra de répondre à vos préoccupations.

Monsieur le sénateur, je vous ai trouvé très pessimiste, par exemple sur la capacité de l'audiovisuel public à relever ce défi. Il sera au rendez-vous. Vous le savez, quelles que soient les modalités de perception - nous les avons fait évoluer et progresser - et le produit de la redevance, le Parlement garantit année après année une augmentation du budget de l'audiovisuel public.

De la même manière, les équipes de France Télévisions sont totalement mobilisées pour mettre en oeuvre un tel progrès scientifique et technologique. À cet égard, je voudrais vous faire part d'une anecdote qui concerne la ville dont je suis élu, Tours. Voilà quelques mois, j'assistais à l'arrivée d'une course cycliste, le Paris-Tours. J'ai alors eu la surprise - j'ignorais qu'elles travaillaient sur ce projet - de voir les équipes de France Télévisions préparer et se préparer pour une sorte de répétition générale de la captation du Paris-Tours en haute définition, afin de pouvoir présenter et proposer un dispositif similaire à l'ensemble de nos concitoyens à l'occasion du Tour de France.

Les défis sont immenses, mais chacun est mobilisé. L'objet de ce projet de loi est de nous permettre d'être au rendez-vous.

Monsieur le sénateur, vous posez des questions légitimes, mais j'ai du mal à entrevoir ce que vous proposez pour y apporter des réponses. Sans doute les réponses figurent-elles dans le projet de loi que je vous soumets, ainsi que dans l'analyse qui en a été faite par la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques.

Vous faites partie de ceux qui sont présents au coeur des grands événements de la création, sous l'égide du président Valade. Je tiens à vous en remercier.

De ce point de vue, votre apport au travail du ministre de la culture et de la communication que je suis est essentiel : il illustre l'engagement constant de la Haute Assemblée pour consolider, concrétiser et promouvoir la diversité culturelle, la richesse de nos créations et les conditions de développement de l'emploi de nos artistes et techniciens.

C'est l'honneur de notre pays que vous incarnez les uns et les autres par votre présence, votre ouverture d'esprit et votre curiosité intellectuelle, en étant partout où cela bouge, où cela craque, même parfois où cela siffle, mais où s'effectue tout simplement la création culturelle de notre pays.

Monsieur le sénateur, je vous le redis en vous regardant droit dans les yeux, nous avons certes des divergences, mais le ministre républicain que je suis n'oubliera jamais votre présence, votre courage et votre propos de l'été dernier, lorsque vous vous êtes rendu en Avignon en compagnie d'une délégation du Sénat menée par le président de la commission des affaires culturelles pour porter avec dignité et détermination le débat au coeur même de l'événement culturel.

Oui, monsieur Renar, vous posez des questions légitimes sur le respect de la diversité culturelle et la création. Mais ces interrogations trouvent leurs réponses dans le travail effectué par la commission des affaires culturelles et par la commission des affaires économiques.

Depuis le 26 septembre dernier, la commission des affaires culturelles, en lien avec Bruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, a procédé à plus de dix auditions pour couvrir tout le champ des acteurs concernés par le projet de loi soumis à votre vote.

Sans revenir longuement sur la question de l'urgence, qui a déjà été développée par le président de la commission des affaires culturelles, le Gouvernement a pris sa décision sur la base de deux facteurs.

Le premier d'entre eux est celui de l'offre proposée à nos téléspectateurs. Il est nécessaire d'agir rapidement pour offrir à tous les Français l'apport de la télévision numérique terrestre. Certains d'entre vous se sont exprimés à juste titre pour exiger que cela concerne 100 % des Français par une couverture hertzienne terrestre et, en guise de complément, par le recours au satellite là où la géographie et l'encombrement du ciel l'imposent.

Bien entendu, il s'agit d'une question avant tout politique. L'articulation du travail entre vos deux commissions permet au Parlement de jouer un rôle central, afin que personne ne soit le laissé-pour-compte du développement technologique et d'une offre télévisuelle riche, pluraliste et diversifiée.

Le second facteur concerne vos propres travaux en commission. C'est sur la base du constat dressé par vos deux rapporteurs, c'est-à-dire l'urgence technologique, que le Gouvernement a pris sa décision de déclarer l'urgence.

Comme cela a été relevé en commission, au-delà de son apparence technique, ce projet de loi est éminemment politique. Il concerne chacun de nos concitoyens, chaque téléspectateur, parce qu'il engage le futur du paysage audiovisuel français et de la culture. Vous avez parfaitement raison.

D'ailleurs, M. le rapporteur ne dit pas autre chose. Ainsi, dans l'avant-propos du rapport, il écrit ceci : « Le présent projet de loi n'est pas un texte purement technique mais un vrai texte politique au sens noble du terme ». En effet, ce texte législatif définit les contours de ce qui occupe nos concitoyens entre trois et quatre heures par jour en moyenne, à savoir la télévision. Nous avons tous pour objectif de faire en sorte que les contenus soient également au rendez-vous.

À ce propos, et à l'approche des grands rendez-vous démocratiques, j'espère bien provoquer dans les délais qui me sont impartis une réunion des ministres de la culture et de la communication et des responsables de l'audiovisuel public des vingt-cinq ou des vingt-sept pays de l'Union européenne pour les mobiliser autour des contenus culturels, voire pour créer un grand événement télévisuel européen à l'occasion des journées du patrimoine du mois de septembre prochain. Il s'agirait de nous faire passer d'un lieu culturel à un autre ou d'un spectacle vivant à un autre et de permettre à la technologie de favoriser la diffusion et les appétits en ce domaine. En outre, cela aiderait à donner le goût de la diversité culturelle à nos concitoyennes et nos concitoyens qui, suivant où ils se situent, n'entrent pas spontanément dans une salle de spectacles ou dans un lieu de culture.

Vous vous inquiétez du développement de la production de contenus et de la création. Là encore, vous êtes parfaitement en phase avec votre rapporteur, qui dresse le même constat. Ainsi, évoquant l'offre sur la TNT, il écrit ceci : « Elle se caractérise également par un certain nombre de lacunes inquiétantes en matière d'originalité des programmes proposés aux téléspectateurs ».

C'est la raison pour laquelle votre commission des affaires culturelles proposera, à la fois, d'encadrer l'octroi de la chaîne compensatoire par des obligations spécifiques en matière de diffusion et de production cinématographique et de préciser la notion d'oeuvre audiovisuelle dans un sens plus strict et dans une formulation à laquelle je souscris pleinement.

Par ailleurs, et vos amendements ne contestent pas ce principe, je rappelle que le projet de loi encadre une contribution de la haute définition et de la télévision mobile personnelle au compte de soutien.

Bref, le présent projet de loi permet un enrichissement de la capacité financière de soutien à la production cinématographique et audiovisuelle.

En la matière, l'engagement et la politique du Gouvernement et de la majorité, et peut-être de l'opposition, car, au-delà des divergences démocratiques, je ne renoncerai jamais à tenter de créer une unité sur ce dossier, consistent non pas à courir derrière la technologie, mais bien à mettre celle-ci au service du contenu, de l'offre de programmes, de la singularité et de la diversité de notre création !

Enfin, vous craignez une attribution inéquitable du futur gain numérique. Là encore, permettez-moi de vous renvoyer au rapport de votre commission. Ce dernier souligne la sagesse d'un texte qui « se garde bien de répartir a priori un ?dividende numérique? dont personne ne peut encore déterminer précisément l'ampleur ».

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