Le sujet, chacun en conviendra, est d'importance. Toutefois, notre débat ne doit pas porter sur l'opportunité, mais sur la recevabilité de la proposition de résolution. Nous devons également veiller au respect du « droit de tirage » de chaque groupe et de la liberté de proposer, dans ce cadre, un sujet d'étude qui ne recueillerait pas l'assentiment général.
Vous auriez pu, monsieur le président, invoquer d'autres arguments pour justifier votre position, mais vous n'avez évoqué que la lettre de la garde des sceaux faisant mention de procédures en cours. Cet argument, pourtant, n'a empêché ni la création, par le passé, d'autres commissions d'enquête, comme l'ont rappelé nos collègues Patrick Kanner et Marie-Pierre de la Gontrie, ni que nous nous penchions sur les événements entourant M. Benalla. Récemment d'ailleurs, pas moins de quatre ministres nous ont interpellés pour que notre commission n'interfère pas... Il ne s'agit pas d'interdire la création d'une commission d'enquête lorsqu'une procédure judiciaire est en cours, mais d'évaluer si cette dernière concerne directement le champ de ladite commission d'enquête. Nous avons, pour notre part, considéré qu'existait un devoir de vérité au-delà des procédures visant telle ou telle personne.
Le groupe socialiste et républicain, comme le groupe du RDSE ainsi que le rappelait Nathalie Delattre, porte un attachement sans faille à la laïcité. L'atteinte éventuelle à la laïcité n'a d'ailleurs pas été évoquée par notre président de commission. L'argument, de fait, n'aurait pas été recevable dans la mesure où la laïcité n'interdit nullement d'aborder les religions dans l'espace public ou de parler de faits religieux ; l'information diffère du prosélytisme. Il n'est que de penser aux cours d'histoire dispensés dans les écoles. Certes, la pédophilie existe dans de nombreuses institutions, mais certaines réalités, pour de multiples raisons, apparaissent propres à l'Église catholique. La laïcité n'a jamais empêché le Parlement de traiter, dans le champ législatif comme en matière de contrôle, diverses questions liées aux religions. Je pense, notamment, au port de signes distinctifs dans certains lieux.
Vous l'aurez compris : la création d'une telle commission d'enquête nous apparaît légitime. D'autres pays s'y sont prêtés. Des membres de l'Église, signataires de l'appel publié par Témoignage chrétien, soutiennent d'ailleurs notre démarche. Nous n'y traiterons pas de théologie, mais d'application de la loi. Des affaires sont été cachées à la justice ; le sujet est grave et concerne la société civile : les parlementaires sont fondés à s'en saisir.