Mes chers collègues, avant d'accueillir nos hôtes, je dois vous informer que le groupe socialiste et républicain m'a fait savoir qu'il avait désigné Mme Victoire Jasmin pour succéder à Mme Catherine Conconne comme secrétaire du bureau de notre délégation. Nous prenons acte de ce remplacement et je félicite Victoire Jasmin en notre nom collectif.
Nous sommes heureux de retrouver ce matin les représentants des filières agricoles de nos outre-mer, territoires qui constituent les avant-postes de l'Union européenne dans la Caraïbe, en Amazonie et dans l'océan Indien.
Nous accueillons ainsi des représentants de la filière sucre, canne, rhum, de la filière banane, de la filière fruits et légumes, des filières d'élevage et de la pêche ainsi que des filières industrielles de transformation agro-alimentaires ; ils sont accompagnés de Gérard Bally, délégué général et fondateur d'Eurodom qui défend leurs intérêts à Bruxelles, et de Laetitia de La Maisonneuve, en charge des relations institutionnelles.
Malgré les progrès pour une reconnaissance des contraintes et besoins spécifiques des régions ultrapériphériques, nous savons qu'il faut inlassablement, vis-à-vis de la Commission européenne, réaffirmer la nécessité d'une régulation salvatrice face au dogme de la concurrence et de l'ouverture. Notre délégation sénatoriale aux outre-mer s'est prononcée à maintes reprises sur ce sujet pour contrer les effets dévastateurs, sur les économies de nos régions ultrapériphériques, d'une politique commerciale fort peu attentive aux conséquences collatérales d'accords conclus avec les pays tiers. Certaines de nos résolutions, adoptées par le Sénat, ont rencontré un certain succès et ont concrètement aidé à éviter des dérapages extrêmement dommageables : je pense bien sûr à notre rapport d'information sur l'accord conclu par l'Union européenne avec le Vietnam et ses conséquences pour la filière sucre, notamment la production de sucres spéciaux ; je pense également au travail d'étude que nous avons réalisé sur l'inadaptation des normes phytosanitaires nationales et européennes aux conditions de production dans nos régions ultrapériphériques, qui a donné lieu à une résolution adoptée solennellement par le Sénat en séance plénière et que j'ai eu l'honneur de présenter au Forum des régions ultrapériphériques de mars 2017.
Nous voilà confrontés aujourd'hui à un nouveau danger : celui de la contraction du soutien financier apporté par le programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) dont la Commission européenne elle-même, dans son rapport de décembre 2016 au Parlement européen et au Conseil, a souligné la conformité aux objectifs de la politique agricole commune (PAC) mais surtout la pertinence et l'efficacité en faisant valoir - je cite - que le programme POSEI était « essentiel au maintien des productions de diversification traditionnelles » et s'était « avéré utile dans la mise en oeuvre des exigences en matière de qualité et d'environnement ».
Nonobstant ces prises de position claires et les déclarations non moins explicites du président Jean-Claude Juncker à Cayenne lors de la conférence des RUP fin octobre 2017 sur le maintien des enveloppes POSEI, la Commission vient d'annoncer une baisse de 3,9 % dans le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027, soit une amputation en valeur absolue de près de 11 millions d'euros pour les RUP françaises. Cette annonce est le corollaire de la réduction également envisagée de l'enveloppe budgétaire de la PAC, réduction qui s'établirait pour la France à près de 6,5 % par an.
Pour autant, sachez que le Sénat ne s'y résigne pas et a réagi vigoureusement lors de sa séance publique du 6 juin avec l'adoption d'une résolution européenne prenant la défense d'une politique agricole commune forte, portée par la commission des affaires économiques et son rapporteur notre collègue Daniel Gremillet, membre de notre délégation. Cette résolution a d'ailleurs été enrichie au cours du débat par l'adoption d'un amendement défendu en séance par notre collègue de la Guadeloupe Dominique Théophile pour prôner le maintien d'un budget stable pour le POSEI. Je précise que l'amendement a été adopté avec un double avis favorable de la commission et du Gouvernement. Je salue pour ma part cette louable initiative et espère que la France parviendra à se faire entendre grâce à une mobilisation générale sur cette question primordiale.
Mais je ne voudrais pas être trop long car nous sommes d'abord là pour vous entendre et vous vous êtes mobilisés en nombre. Je vais donc immédiatement vous céder la parole. Je vous propose d'entendre en premier lieu Gérard Bally, délégué général d'Eurodom, pour une approche fédératrice du sujet, puis M. Jean-Bernard Gonthier, président de la chambre d'agriculture de La Réunion, avant de donner la parole au président Philibert et aux représentants de chaque filière.