Intervention de Antoine Lefèvre

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 24 octobre 2018 à 9h35
Projet de loi de finances pour 2019 — Mission « justice » - examen du rapport spécial

Photo de Antoine LefèvreAntoine Lefèvre, rapporteur spécial :

Je vous présente les crédits de la mission « Justice », qui regroupe les moyens de la justice judiciaire, de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse. Je vous prie d'abord de bien vouloir excuser l'envoi tardif de mon rapport : j'ai reçu hier après-midi des réponses au questionnaire budgétaire envoyé le 10 juillet dernier, malgré la date limite d'envoi des réponses fixée au 10 octobre par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). De nombreuses réponses demeurent manquantes, notamment le détail des principales économies et mesures nouvelles, alors même que le budget est construit sur ces documents ! J'espère recevoir rapidement ces réponses, afin d'enrichir mon rapport.

Avec un budget de plus de 9 milliards d'euros en 2019, le ministère de la justice bénéficierait de 332 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année précédente, soit une hausse de 3,8 % de ses moyens.

Hors compte d'affectation spéciale « Pensions », en 2019, les crédits augmentent de 4,5 %, soit 313 millions d'euros. Cette hausse respecte la trajectoire fixée par la loi de programmation des finances publiques ainsi que l'annuité prévue par l'article 1er du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, telle qu'adoptée par le Sénat hier.

Vous le savez, ce renforcement des moyens n'est pas nouveau et, même si la situation demeure fragile, les choses semblent commencer à s'améliorer, notamment dans les juridictions. En effet, les recrutements de magistrats, de greffiers ou de juristes assistants ont permis d'améliorer le fonctionnement des juridictions et, d'après les informations que nous avons pu recueillir, les crédits supplémentaires votés chaque année commencent à produire leurs effets sur le terrain. Cette situation demeure néanmoins fragile, comme le montre l'exemple du tribunal de grande instance de Bobigny, qui rencontre de grandes difficultés à recruter des greffiers : alors que les magistrats souhaiteraient augmenter le nombre d'audiences hebdomadaires, le manque de greffiers les en empêche. Cette situation est toutefois spécifique à la région Île-de-France.

En revanche, la surpopulation carcérale et l'état de certaines de nos prisons, pourtant connus de longue date, auraient justifié que le Gouvernement agisse plus vite pour concrétiser le programme immobilier pénitentiaire initié par le précédent ministre de la justice. En effet, au lieu de construire 15 000 places de prison sur le quinquennat comme le prévoyait le candidat à l'élection présidentielle, Emmanuel Macron, le Gouvernement propose la création de 7 000 places d'ici à la fin du quinquennat et le lancement de la construction de 8 000 autres d'ici à 2022. Ce report est regrettable, car il y a urgence.

La masse salariale représente plus de 60 % des dépenses du ministère de la justice, d'où une certaine rigidité du budget. Ainsi, un tiers des moyens supplémentaires prévus en 2019, soit 112 millions d'euros, correspond à une augmentation des dépenses de personnel.

En effet, il est prévu de créer 1 300 emplois supplémentaires en 2019, dont 524 postes de surveillant pénitentiaire, notamment pour réduire le nombre de postes vacants.

Hors dépenses de personnel, l'augmentation des dépenses du ministère de la justice s'explique principalement par plusieurs éléments : les moyens complémentaires dont bénéficie l'administration pénitentiaire au titre de la prévention de la récidive et de la réinsertion des personnes placées sous main de justice ; la nécessité de mettre à niveau l'informatique du ministère ; la progression continue des dépenses d'aide juridictionnelle, notamment à la suite de l'élargissement de l'accès à celle-ci ; le dynamisme des frais de justice et la nécessité de rebudgéter cette dépense qui génère chaque année d'importantes charges à payer.

Enfin, s'agissant de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), 4,7 millions d'euros supplémentaires sont prévus pour la création de cinq centres éducatifs fermés (CEF) - le Gouvernement envisageant d'en créer 20 sur la mandature. Ces structures d'hébergement constituent une alternative à l'incarcération pour des mineurs multirécidivistes, multiréitérants ou ayant commis des faits d'une particulière gravité.

En raison de l'encadrement nécessaire pour la prise en charge des jeunes placés en CEF, le prix de journée de ces établissements - 672 euros prévus en 2019 - est significativement supérieur à celui des autres structures d'accueil des jeunes pris en charge par la PJJ.

J'ai interrogé la direction de la PJJ sur l'efficacité d'un dispositif aussi coûteux : il m'a été répondu qu'elle procédait à des études internes ponctuelles, dans l'attente d'un système d'information plus performant permettant d'estimer réellement l'efficacité de ces établissements.

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