Intervention de Yann-Gaël Amghar

Commission des affaires sociales — Réunion du 24 octobre 2018 à 8h35
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 — Audition de M. Yann-Gaël Amghar directeur de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale acoss

Yann-Gaël Amghar, directeur de l'Acoss :

Notre rôle de caisse de compensation a connu une évolution en 2018, avec des prolongements en 2019.

En 2018, nous avons joué un rôle dans la compensation à l'Unédic des mesures de diminution puis de suppression des contributions salariales à l'assurance chômage. Nous avons intégralement compensé la perte pour l'Unedic, à l'euro près, et nous avons reçu en retour de l'État une fraction de TVA - 5,6 % -, calibrée pour correspondre au montant exonéré. Nous jouons un rôle de chambre de compensation dans le sens où, si nous garantissons à l'Unedic l'intégralité de la perte de recettes liée à la suppression des cotisations salariales, nous n'avons pas de garantie à l'euro près sur la fraction de TVA qui nous est versée. Tout décalage aura donc un impact sur les comptes de la sécurité sociale.

Ce schéma a été transposé en 2019 pour gérer l'extension des allégements généraux de cotisations sociales. Il est en effet prévu, pour compenser la suppression du CICE, de renforcer les allégements de cotisations patronales sur les salaires, notamment au niveau du SMIC. Ces allègements portent sur les cotisations patronales à l'assurance chômage et aux régimes complémentaires Agirc-Arrco. Là encore, nous jouerons un rôle de caisse de compensation, en reversant à l'Unédic et à l'Agirc-Arrco l'intégralité des cotisations exonérées. En regard, nous recevrons une fraction de taxe sur les salaires et de TVA.

Ce rôle de compensation, qui s'élargira donc en 2019, n'a pas posé de difficultés pour l'instant. La nouvelle « tuyauterie » qu'il nous faudra créer avec l'Agirc-Arrco ne devrait pas poser de problèmes non plus.

Vous avez également mentionné notre rôle dans la gestion de la trésorerie de la sécurité sociale, qui connaît une évolution importante dans le PLFSS pour 2019. En effet, une partie de la dette accumulée par le régime général et portée par l'Acoss a vocation à être reprise par la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la Cades.

Cette dette se compose des déficits cumulés du régime général non couverts par les précédentes reprises de dette, notamment celle votée en 2010.

Il convient de distinguer ce qui relève de la dette et des besoins de trésorerie. L'écart entre les deux tient, d'une part, aux fortes variations mensuelles de nos flux de trésorerie, d'autre part au fait que nous refinançons d'autres dettes que celle du régime général, en particulier celle du régime agricole.

Au sens comptable, on peut soit regarder globalement les comptes des différentes branches du régime général, soit se focaliser sur les branches déficitaires. Or, comme vous l'avez mentionné, monsieur le président, la branche AT-MP a cumulé des excédents depuis plusieurs années. Ces excédents restent bien la « propriété » de cette branche, mais, dès lors que nous exerçons une gestion mutualisée de la trésorerie, nous couvrons le besoin de financement des autres branches avec les excédents de la branche AT-MP. Pour employer une image, c'est comme si un syndicat de copropriétaires finançait par une trésorerie mutualisée les défaillances de certains copropriétaires. Dans tous les cas, les crédits et les dettes des uns et des autres ne sont pas annulés.

Si l'on raisonne uniquement sur les déficits non repris, sans faire masse avec les excédents existants, la dette du régime général s'établirait à 26,5 milliards d'euros fin 2018. La Cades en reprendra 15 milliards d'euros, selon un calendrier qui reste à préciser. Par ailleurs, selon les prévisions pluriannuelles annexées au PLFSS, les excédents dégagés jusqu'en 2022 devraient permettre de couvrir les 11,5 milliards d'euros restant. Nous aurions donc une dette résiduelle de 1 milliard d'euros pour le régime général fin 2022.

Cette reprise de dette est réalisée sans allonger l'horizon de vie de la Cades, par des transferts de recettes de la sécurité sociale vers la Cades à hauteur des besoins correspondants.

Soyons clairs : aujourd'hui, l'Acoss n'éprouve aucune difficulté à placer la dette qu'elle gère sur les marchés, dans un contexte de recherche de bonnes signatures publiques et de taux extrêmement bas, voire négatifs. C'est contre-intuitif, je vous l'accorde, mais la dette rapporte aujourd'hui de l'argent au régime général. La reprise de dette ne répond donc pas à une nécessité technique immédiate. Elle vise à anticiper un retournement de taux - nous y sommes plus exposés dans le cadre d'un financement à court terme - ou à aborder avec une situation financière apurée un éventuel retournement de cycle économique.

Si nous n'avions pas procédé à certaines opérations, le régime général allait constituer de très importants excédents dans les années à venir. Une partie de ces excédents sera donc laissée au régime général, une autre donnera lieu à des réductions de compensation bénéficiant au budget de l'État, une dernière enfin sera utilisée pour transférer des recettes à la Cades et financer la reprise de dette.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion