Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapée a posé le principe d’une scolarisation en milieu ordinaire des enfants et adolescents présentant un handicap ou, à titre exceptionnel, en milieu spécialisé.
Ce principe a été érigé par le Conseil d’État en obligation de résultat. Cela signifie que tout doit être mis en œuvre pour donner un caractère « effectif » au droit à l’éducation des enfants handicapés.
Nous abordons ce débat dans un contexte politique particulier, compte tenu d’une actualité chargée en la matière.
Je veux tout d’abord évoquer la proposition de loi déposée par notre collègue Olivier Paccaud, ici présent, proposition de loi que j’ai eu l’honneur de cosigner et dont l’objet est d’inclure dans la formation initiale des futurs enseignants une période durant laquelle ils prendront en charge un élève en situation de handicap.
Je tiens également à évoquer le non-débat, à l’Assemblée nationale, de la proposition de loi d’Aurélien Pradié et la polémique qui a suivi, ce que j’ai vivement regretté. Par ailleurs, le Gouvernement a lancé, le 22 octobre dernier, la concertation « Ensemble pour une école inclusive », qui durera quatre mois et concernera le métier des AESH et l’accompagnement pédagogique des élèves. Permettez-moi également de rappeler les annonces, aujourd’hui même, du Comité interministériel du handicap concernant l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et les efforts menés en matière de nouvelles technologies.
Depuis 2006, le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a progressé sans conteste. Ainsi, de 100 000 élèves scolarisés en 2006, nous sommes passés à plus de 340 000 à la rentrée 2018.
L’objectif est de parvenir à scolariser en milieu ordinaire toujours plus d’enfants en situation de handicap, mais à condition qu’ils bénéficient d’un accompagnement de qualité. En 2018, les crédits consacrés à l’accompagnement en milieu scolaire ordinaire ont considérablement augmenté. En effet, comme le souligne notre collègue Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances, ils sont passés de 800 millions d’euros à 1, 2 milliard d’euros.
Toutefois, la réussite scolaire de ces enfants passe non seulement par un accompagnement humain de qualité, mais aussi et surtout par un changement d’état d’esprit de la part des parents, du monde éducatif, des acteurs du handicap et de la société tout entière, pour bâtir une école réellement inclusive. Il reste du travail ! Rappelons en effet que nous manquons d’AESH, plus de 12 000 enfants n’ayant pas de solution à cette heure.
De plus, il y a urgence à se pencher sur le statut des AVS et des AESH. Ce métier manque d’attractivité. Cela tient au faible nombre d’heures travaillées, à une rémunération modique, à un travail à temps partiel, à une succession de CDD et à un déficit de formation.
À cet égard, je suis favorable à l’instauration d’un statut unique d’accompagnant, lequel doit devenir un véritable professionnel, formé, disposant d’un emploi stable et pérenne, rémunéré à sa juste valeur par l’éducation nationale. L’orientation prise par le Gouvernement et tendant à convertir, sur cinq ans, les contrats aidés d’AVS en contrats d’AESH, va dans le bon sens, mais n’est pas suffisante.
L’accompagnement des enfants en situation de handicap en milieu scolaire ordinaire ne concerne pas seulement les AESH. Aussi, dans mon rapport intitulé Repenser le financement du handicap pour accompagner la société inclusive, j’ai suggéré de prévoir une formation obligatoire à destination de tous les enseignants du premier et second degré, relative à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, quel que soit le handicap. Aucune structure ne doit tenir les enfants en situation de handicap éloignés de l’environnement scolaire.
Toutefois, certains enfants, compte tenu de leur handicap, ne peuvent être scolarisés qu’en milieu adapté ou grâce à un accompagnement scolaire spécifique. Là aussi, il convient de revoir les dispositions concernant le financement, car les parents de ces enfants sont souvent contraints de solliciter la PCH, la prestation de compensation du handicap, pour bénéficier de tous les services.
Une telle dichotomie du financement de la scolarisation en milieu adapté ne se justifie pas et mérite une clarification. Elle est potentiellement constitutive d’une rupture d’égalité entre enfants handicapés scolarisés et méconnaît le principe même de la compensation, qui n’a pas vocation à se substituer aux obligations incombant aux pouvoirs publics.
Pour ces raisons, j’ai proposé que, quel que soit le mode de scolarisation, les accompagnants soient directement rémunérés par les pouvoirs publics. Seuls les services complémentaires comme l’aide aux devoirs pourront être financés par la PCH.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le secrétaire d’État, le Sénat a beaucoup travaillé sur ce sujet, que ce soit au sein de la commission de la culture ou de la commission des affaires sociales, en formulant des mesures concrètes et pragmatiques.
Alors que les concertations sont lancées, que les groupes de travail sont mobilisés, j’espère que le Gouvernement saura s’inspirer de ses travaux, afin de faire progresser rapidement l’école inclusive.