Mon fil conducteur a été de veiller à la cohérence des mesures proposées avec les ambitions affichées et d'être vigilante sur la préservation d'un équilibre entre allègement des contraintes inutiles et maintien de garde-fous indispensables en matière de protection de l'environnement et de la santé humaine.
Les articles 14 à 23 sont regroupés au sein de deux chapitres ayant trait au développement durable et à l'agriculture, le premier étant lui-même subdivisé en sections relatives à l'environnement, à l'eau et au transport ferroviaire.
Au sein de la section Environnement, deux articles portent sur la gestion des déchets.
L'article 14 vise à remédier à une sur-transposition de la directive européenne du 19 novembre 2008 relative aux déchets. Cette directive, qui fixe le cadre de la politique de prévention et de gestion des déchets, prévoit deux types d'exclusion de son champ d'application : des exclusions de produits couverts par une autre réglementation européenne et des exclusions définitives. À ce titre sont exclus les sous-produits animaux et les produits dérivés, ainsi que les carcasses d'animaux morts autrement que par abattage, c'est-à-dire les parties non destinées à la consommation humaine des animaux morts, car ils sont couverts par un règlement dédié de 2009. Au titre des exclusions définitives, les explosifs « déclassés », c'est-à-dire dont on n'a plus l'usage, ne font pas partie du champ d'application de la directive. Ces deux exclusions n'ont pas été transposées en droit français, ce qui complexifie le droit applicable.
Pour les sous-produits animaux s'empilent ainsi la réglementation relative aux déchets issue du code de l'environnement et la réglementation, très encadrée d'un point de vue sanitaire, prévue par le code rural et de la pêche maritime.
Pour les explosifs déclassés, cette sur-transposition allonge significativement leur procédure d'élimination, notamment dans le cadre de leur transfert en Allemagne, qui dispose de filières d'élimination de ces produits, mais qui, elle, a transposé cette dérogation.
L'article 14 exclut ainsi ces deux catégories de la réglementation relative aux déchets, conformément à la directive européenne. J'ai veillé à m'assurer qu'une fois sortis de ce régime juridique ces produits demeureront soumis à une réglementation présentant un niveau de sécurité identique en termes de protection de l'environnement et de la santé. Je proposerai seulement un amendement rédactionnel.
L'article 15 modifie l'article L. 541-4-3 du code de l'environnement, relatif à la sortie du statut de déchet. Il supprime la condition d'être traité dans une installation classée pour la protection de l'environnement ou au titre de la loi sur l'eau pour qu'un déchet puisse cesser d'être un déchet. J'y reviendrai plus longuement dans le cadre de l'amendement que je proposerai.
Dernier article de la section Environnement, l'article 16, qui ajoute une nouvelle dérogation à l'interdiction de chasser les oiseaux migrateurs pendant leur migration, est celui qui m'a posé peut-être le plus d'interrogations et conduite à une position réservée. J'y reviendrai à l'occasion de l'examen de l'amendement déposé sur cet article.
Les deux articles de la section Eau ne présentent aucune difficulté et remédient bien à des sur-transpositions injustifiées.
L'article 17 permet un nouveau report de l'échéance prévue pour l'atteinte du bon état écologique des masses d'eau. La directive-cadre sur l'eau du 23 octobre 2000 l'avait fixée à 2015, tout en prévoyant la possibilité de la reporter dans certains cas limitativement énumérés : pour des raisons de faisabilité technique, de coût excessif ou pour des motifs liés aux conditions naturelles des masses d'eau. Ces reports sont limités à un maximum de deux nouvelles mises à jour de ce document, c'est-à-dire deux fois six ans, sauf dans les cas où les conditions naturelles sont telles que les objectifs ne peuvent être réalisés dans ce délai. Ainsi, pour ce dernier motif, la directive ne prévoit pas de limitation du report dans le temps. Or, en droit français, ces trois possibilités de report ont été transposées, mais toutes limitées à un maximum de deux nouvelles mises à jour et ne peuvent donc être mises en oeuvre après 2027. L'article 17 permet ce report au-delà de 2027 pour le seul motif lié aux conditions naturelles.
Si l'on peut regretter l'effet négatif en termes d'affichage de cette mesure, qui risque peut-être de démobiliser les acteurs, cette « dé-sur-transposition » est justifiée sur le plan technique : une telle possibilité de report ne concernerait qu'un petit nombre de masses d'eau, qui, en effet, pour des motifs liés aux conditions naturelles, présentent un état d'inertie expliquant que des résultats soient très longs à obtenir malgré l'engagement d'actions vigoureuses.
L'article 18 supprime la notion d'« espace aérien surjacent » de la définition des eaux marines et, donc, du périmètre de la stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML). La directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l'espace maritime ne prévoit pas cet espace pour la définition de l'outil de planification relatif à la mer et au littoral. La SNML elle-même, adoptée par décret du 23 février 2017, ne reprend pas cette sur-transposition. Pour autant, elle traite indirectement de cet espace au travers de thématiques comme l'énergie éolienne, la pollution atmosphérique des navires, la protection des oiseaux ou encore les pollutions lumineuses.
Les articles 19 à 23 concernent les transports ferroviaires.
Dans ce domaine, la directive 2012/34/UE établissant un espace unique européen constitue le socle de la régulation. Elle vise à assurer, par un certain nombre de règles relatives à la gestion de l'infrastructure notamment, l'accès de toutes les entreprises ferroviaires au réseau dans des conditions équitables, transparentes et non discriminatoires. Elle autorise les États membres à exclure certaines portions du réseau ou certaines entreprises de l'application de ces règles. Lorsque nous l'avons transposée en droit national, nous n'avons pas toujours été au bout des possibilités offertes en ce sens. Le projet de loi vise à aller plus loin.
Ainsi, l'article 19 reprend une dérogation permettant d'exclure du champ d'application des règles relatives à la gestion des installations de service les lignes exclusivement utilisées pour des services urbains ou suburbains et les lignes de fret utilisées par une seule entreprise ferroviaire : il s'agit des infrastructures reliées au réseau nécessaires pour l'exploitation des trains, comme les voies de garage ou les terminaux de triage. Cette mesure vise surtout à alléger les contraintes des opérateurs ferroviaires de proximité (OFP), pour améliorer la compétitivité du fret ferroviaire par rapport à la route.
L'article 20 exonère les entreprises qui gèrent à la fois des activités de gestion d'infrastructure et d'exploitation de services ferroviaires de l'obligation de tenir une comptabilité séparée pour chacune de ces activités dans certains cas bien délimités : si elles n'exploitent que des services urbains, suburbains ou régionaux sur des réseaux locaux ou régionaux autonomes ou destinés uniquement à l'exploitation de services ferroviaires urbains ou suburbains. Il s'agit de s'aligner sur le texte de la directive, qui exclut d'office ces entreprises du champ d'application de cette règle de comptabilité séparée.
L'article 21 reprend une dérogation permettant de dispenser certaines entreprises de l'obligation de détenir une licence ferroviaire : les entreprises qui exploitent uniquement des services ferroviaires de transport de voyageurs sur des infrastructures ferroviaires locales ou régionales autonomes, les entreprises qui exploitent uniquement des services régionaux de fret ferroviaire et celles qui exploitent uniquement des services de fret sur une infrastructure ferroviaire privée. Cette mesure allège les contraintes pesant sur les entreprises.
L'article 22 concerne la procédure applicable lorsqu'une entreprise souhaite utiliser une installation de service non utilisée depuis plus de deux ans. Les règles fixées dans notre code des transports n'étaient pas totalement conformes au droit européen et auraient dû être adaptées à un règlement d'exécution pris en novembre 2017. L'article renvoie directement à ce dernier et assure la conformité de notre droit avec les textes européens.
L'article 23 reprend une dérogation prévue par la directive de 2007 relative à la certification des conducteurs de train, en exonérant certains conducteurs de l'obligation de détenir une licence de conducteur sur certaines portions délimitées du réseau : les réseaux séparés du reste du système ferroviaire destinés à l'exploitation de services locaux, les infrastructures privées et les sections de voies temporairement fermées à la circulation pour cause d'entretien.
Ces mesures vont dans le sens d'un allègement des contraintes pesant sur les acteurs ferroviaires et je n'y suis pas opposée, dans la mesure où il est délimité et encadré. Les acteurs concernés sont peu nombreux et les répercussions seront en conséquence assez limitées dans un premier temps, mais nous ne devons pas nous priver d'un tel allègement autorisé par les textes européens.
Je présenterai les articles 24 à 27, qui font l'objet de la procédure de législation en commission, lors de notre réunion de ce soir.