L'article 15 supprime l'obligation de traitement dans une installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) ou dans une installation (IOTA) classée au titre de la loi sur l'eau qui conditionne la sortie du statut de déchet, dans la mesure où cette obligation constituerait une sur-transposition de la directive-cadre européenne relative aux déchets du 19 novembre 2008, modifiée par la directive du 30 mai 2018. La directive prévoit plusieurs conditions pour qu'un déchet cesse d'être un déchet et redevienne un produit. Une condition générale doit tout d'abord être remplie : celle d'avoir subi une opération de recyclage ou de valorisation.
En droit français, ces dispositions ont été transposées par l'ordonnance du 17 décembre 2010. L'article L. 541-4-3 du code de l'environnement octroie le bénéfice de sortie du statut de déchets aux seuls exploitants ICPE et aux installations IOTA. Selon les indications du site internet du ministère de la transition écologique et solidaire, cette disposition « permet d'assurer le bon encadrement de la gestion des déchets ». En cela, cette transposition s'écarte de la directive, qui ne parle pas explicitement de valorisation réservée aux seuls établissements classés. L'objectif de l'article 15 est donc de supprimer cette disposition, en ce qu'elle irait plus loin que la directive.
Je ne suis pourtant pas convaincue qu'il s'agisse d'un cas flagrant de sur-transposition. En effet, la directive précise, à l'article 6, que les critères de sortie du statut de déchet doivent assurer un niveau élevé de la protection de l'environnement et de la santé humaine et notamment inclure des procédés et techniques de traitement « autorisés ». Cette notion de traitement « autorisé » peut sembler renvoyer à notre législation française en matière d'installations classées.
Ensuite, quel serait le niveau de garantie en termes de protection de l'environnement et de la santé humaine si l'on adoptait le projet de loi ainsi rédigé ? Le système ICPE garantit un haut niveau de protection via un système de contrôle très strict par des agents assermentés de l'État, tandis que les autres installations ne sont pas contrôlées. Elles pourraient l'être, mais par les collectivités territoriales, c'est-à-dire les maires, et seulement en présence d'un risque avéré, donc potentiellement trop tard en cas de pollution. Des acteurs du secteur du traitement des déchets m'ont alertée sur les risques qu'une telle suppression pourrait faire peser sur l'environnement et la santé humaine, notamment pour les déchets dangereux envoyés dans des installations de fabrication de produits, qui ne sont pas forcément classées, en substitution de matières vierges.
Nous devons donc être extrêmement vigilants sur ces questions d'environnement et de santé publique. En revanche, je suis convaincue par l'objectif de l'article, qui ambitionne de développer le recyclage, et notamment la réutilisation et le réemploi dans le secteur de l'économie sociale et solidaire par exemple. Les entreprises de ce secteur pourraient utilement bénéficier de la procédure de sortie du statut de déchet sans qu'il y ait de risque pour l'environnement. C'est le cas par exemple d'un fauteuil dont on se débarrasse et qui est ensuite réutilisé.
C'est pourquoi je vous proposerai un dispositif permettant de conserver ce principe qui constitue la garantie d'un contrôle efficace sur ces installations, mais de l'assouplir afin de permettre à de nombreuses entreprises de pouvoir bénéficier de la procédure de sortie du statut de déchet. Mon amendement COM-2 prévoit ainsi des dérogations, pour certaines catégories de déchets non-dangereux, afin qu'ils puissent bénéficier de la procédure de sortie du statut de déchet en dehors d'une installation classée.
L'amendement COM-16 de notre collègue M. Marseille participe du même esprit : il précise juste que ces dérogations sont possibles pour certains types de déchets inertes ou non-dangereux. Or, les déchets inertes constituent une sous-catégorie des déchets non-dangereux, ce qui rend cette mention inutile. Cet amendement serait donc satisfait par l'adoption de l'amendement COM-2.