C'est très agréable d'échanger avec un ministre pourvu d'une colonne vertébrale idéologique solide, et qui l'assume. Ce n'est pas le cas de tous les autres membres du Gouvernement. Dans une interview récente, un journaliste vous interrogeait sur la trésorerie abondante du CICE, et sur le risque que d'abondants dividendes ne soient versés aux actionnaires. Vous avez répondu que ce serait une grave erreur. L'argent du CICE et des baisses de charges, qui représente 20 milliards d'euros, voire, cette année, 21 milliards d'euros, doit aller à l'investissement, l'innovation et l'emploi, disiez-vous. Les entreprises ont demandé ces mesures sous le gouvernement socialiste, et nous nous rappelons tous du pin's « un million d'emplois » de M. Pierre Gattaz. Évidemment, nous n'avons jamais vu la couleur de ces emplois, mais l'argent, lui, a été donné. Vous ajoutez que vous ferez le bilan en 2020, pour voir si les entreprises ont joué le jeu - sinon, dites-vous, l'État interviendra.
Mais, monsieur le ministre, le bilan, on le connaît, puisque France Stratégie, qui pilote un comité de suivi, dit que99,3 milliards d'euros auront été versés entre 2014 et 2020 par le CICE, auxquels il faut ajouter, à partir de 2019, les allégements de cotisations patronales, qui seront versées avec un décalage. Ce même comité de suivi parle, pour l'instant, de 10 000 à 200 000 emplois créés. Donc, cela ne fonctionne pas. Êtes-vous prêt, dès lors, à un débat politique de haut niveau sur cette question ? Si les entreprises jouent le jeu, très bien, ayons un débat sur l'allégement des cotisations patronales. Si elles ne le jouent pas, sommes-nous d'accord pour suspendre ces aides ? Déjà, il y a eu plusieurs scandales, sur lesquels je vous ai interpellé sans obtenir de réponses. Ainsi, de Carrefour, qui a touché plus de 150 millions d'euros de CICE avant de supprimer 4000 à 5000 emplois. Trouvez-vous cela normal ?