Intervention de Bruno Le Maire

Commission des affaires économiques — Réunion du 30 octobre 2018 à 17h55
Projet de loi de finances pour 2019 — Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'économie et des finances

Bruno Le Maire, ministre :

Je tire une conclusion simple de nos échanges : il faut que je vienne plus souvent !

Nous serons vigilants à éviter la double peine en matière de contrats courts, mais je conserve une conviction : il existe des abus. Il n'est pas normal que les entreprises qui se comportent bien et embauchent en CDI sans multiplier les contrats courts aient le même niveau de cotisation à l'assurance chômage que celles qui en usent et en abusent. Le système de bonus-malus est juste et améliore le fonctionnement de l'assurance chômage.

Madame Renaud-Garabedian, nous sommes très attentifs aux lycées français, qui sont un atout majeur de la puissance culturelle de la France. Mais la Cour des comptes a appelé notre attention sur les difficultés de l'association de gestion des lycées français de l'étranger. Le Trésor ne peut apporter de garanties à une association qui aurait des problèmes de gestion. Nous pouvons envisager d'autres schémas de garanties. Je vous propose de prendre attache avec mon cabinet.

Monsieur Decool, je tiens au maintien d'une capacité de fabrication en France. L'idée selon laquelle seuls les laboratoires de recherche seraient en France alors que la production serait délocalisée à l'étranger me fait furieusement penser à l'utopie d'une industrie sans usine. Ce n'est bon ni pour l'emploi ni pour nos territoires. Comment y maintiendrait-on une activité sans industrie ni agriculture ? Ne noircissons tout de même pas le tableau. Nous avons créé 6 900 emplois dans le secteur industriel au cours des derniers mois - c'est sans précédent depuis dix ans - et l'industrie a embauché 61 719 personnes en septembre - là encore le chiffre le plus élevé depuis dix ans. Il y a une vraie demande d'emplois industriels ; à nous de faire en sorte qu'on puisse y répondre par les formations et les qualifications adéquates.

Madame Artigalas et monsieur Babary, le taux réduit du GNR est une niche fiscale et celles-ci n'ont pas vocation à perdurer. Nous avons besoin d'une fiscalité simple, stable et lisible. Néanmoins, il faut accompagner les entreprises de terrassement et de travaux publics, en modifiant l'indice Insee au 1er janvier 2019 et en établissant une dérogation exceptionnelle pour modifier les contrats en cours, afin que les entreprises ne soient pas trop pénalisées.

Madame Estrosi Sassone, l'État a les moyens, notamment législatifs, de réagir aux éventuelles dérives tarifaires des mutuelles.

Nous travaillons sur les pôles de compétitivité. Il y a beaucoup d'interrogations dans les territoires. Aucune décision ne sera prise sans discussion avec les élus concernés. On m'a encore posé la question, récemment, en Corse. Revenons-y plus tard.

Nous avons décidé de la sanctuarisation du CIR ; je pense qu'il faut écarter la possibilité d'un déplafonnement. Ce n'est pas la priorité pour soutenir notre secteur industriel. Je préfère que nous ouvrions le débat sur les impôts de production et les allégements de charges au-dessus de 2,6 SMIC.

Le régime de fiscalité des brevets est désormais attractif, grâce au travail des députés. Nous étions le dernier pays de l'OCDE à ne pas avoir aligné notre législation, tout en nous réclamant du multilatéralisme. Soit l'on respecte les mêmes engagements que les autres, soit l'on refuse les instruments multilatéraux. Le double discours n'est pas possible.

Monsieur Gay, je le redis avec fermeté : le CICE a pour but d'améliorer la compétitivité des entreprises et d'encourager leur investissement, pas de favoriser le versement de dividendes supplémentaires. Chacun doit ensuite prendre ses responsabilités et jouer le jeu. Si ce n'est pas le cas, nous en tirerons les conclusions. Le comité de suivi et les parlementaires se saisiront du sujet et fourniront en 2020 leur analyse de l'usage des 20 milliards d'euros supplémentaires accordés en 2019, en toute transparence.

Monsieur Gremillet, je n'oublie pas la question de l'emmental. Il faut viser la qualité, mais c'est la compétitivité-coût qui fera la différence, au moins sur les produits de première nécessité. La DPI était contraire aux règles européennes et nous nous serions fait rattraper rapidement par la patrouille. Nous avons prévu une assurance pour les récoltes que les agriculteurs peuvent utiliser pour investir.

Madame Férat, les Pays-Bas comptent 17 millions d'habitants, ce qui est plus simple à gérer que 65 millions d'habitants. Les mesures qu'ils ont prises correspondent toutefois bien à la politique que nous lançons sur l'innovation, la compétitivité, le redressement de nos finances publiques. Les résultats sont effectivement là.

Monsieur Montaugé, l'objectif en matière de cessions d'actifs est de redéfinir la place de l'État et de l'entreprise dans notre société. Chez ADP, l'activité stratégique, le contrôle des frontières, le contrôle des personnes, la redevance et les tarifs resteront dans la main de l'État. Je vous donne une garantie : nous ne referons pas les erreurs commises sur les autoroutes. J'assume mes responsabilités, j'étais directeur de cabinet du Premier ministre à l'époque. Nous tirons les leçons. Les redevances aéroportuaires continueront à être fixées tous les cinq ans avec l'État. La logique, c'est de recevoir 250 à 300 millions d'euros de revenus réguliers par an, c'est-à-dire 2,5 à 3 milliards d'euros pour investir dans l'innovation de rupture.

Ne confondons pas les dividendes de la Française des jeux, qui sont de 80 à 90 millions d'euros par an, et les recettes fiscales, d'environ 3,3 milliards d'euros, que nous continuerons à percevoir.

Madame Noël, je ne suis pas en mesure de vous répondre ce soir, même si je suis très sensible à la question des zones frontalières. Je vous répondrai par écrit.

Madame Bertrand, comme exemple de restructuration, je ne veux pas citer à nouveau les CCI. L'audiovisuel public sera aussi au coeur des restructurations dans les mois qui viennent. Le ministre de la culture en aura la responsabilité. Nous restructurons aussi en profondeur la DGE et la DGCCRF, en redéfinissant clairement leurs missions.

Madame Chauvin, il faut distinguer lunetiers et opticiens. Ces derniers ont poussé comme des champignons après la pluie ; il y en a quasiment plus en France qu'aux États-Unis car nous avons créé un important effet d'aubaine. Les lunetiers sont des TPE-PME industrielles possédant un savoir-faire très particulier. Nous devrons veiller effectivement à ce que le reste à charge zéro ne puisse pas menacer la qualité des lunetiers français, très largement reconnue.

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