Je débuterai mon propos en vous présentant deux projets, choisis parmi les quelques huit cents conduits par l'Agence. Le premier, où l'AFD intervient en prêts, est d'ordre macro-économique et vise à faire du Burkina Faso le nouveau hub des énergies renouvelables. Située au sud-ouest de Ouagadougou, la centrale solaire de Zagtouli est la plus grande d'Afrique de l'Ouest. Ainsi, ce sont près de quatre cents ouvriers qui ont travaillé simultanément à la construction des structures et à la mise en place des 130 000 panneaux solaires. Cette centrale va fournir 55 GWh d'électricité chaque année, soit 4% de la consommation annuelle du pays et va améliorer l'accès à l'électricité pour de nombreuses personnes, tout en limitant les émissions de gaz à effet de serre. Le Burkina Faso entend désormais lancer une production électrique de plus en plus tournée vers l'énergie solaire, plus accessible et moins polluante, avec comme objectif que 30% de la consommation électrique nationale provienne de l'énergie solaire à l'horizon 2025.
L'autre projet, d'ordre plus micro-économique, concerne la formation professionnelle au Liban, dans le contexte de la crise syrienne et est abondé par cinq millions d'euros de dons. Suite à la crise migratoire et sociale qui sévit au Liban, l'ONG française IECD et son partenaire Semeurs d'avenir ont développé, avec l'appui de l'AFD, des formations courtes et qualifiantes dans divers domaines. Les formations proposées sont ciblées sur des métiers offrant des débouchés sur le marché du travail. Le projet inclut également la formation de 70 enseignants. Ce programme facilitera, au total, l'insertion professionnelle ou la reprise d'études de 1 600 jeunes dont de jeunes migrants d'origine syrienne qui pourront, en temps voulu, participer à la reconstruction de la Syrie.
J'en viens, à présent, au chemin parcouru depuis mon audition en mai 2016. L'AFD constitue un réseau technique de taille mondiale, qui compte désormais 2 500 collaborateurs de quatre-vingt nationalités, répartis dans 85 agences actives dans cent-dix pays. Des strates régionales ont également étoffé ce réseau. L'AFD accompagne 3 600 projets et est en mesure d'en générer près de 700 par an. La trajectoire de forte croissance doit impliquer des gains d'efficacité que l'examen de la prochaine loi d'orientation permettra d'évaluer dans une perspective pluriannuelle. Notre trajectoire a débuté, en 2014, avec 7 milliards d'euros, pour atteindre 11 milliards en 2018, soit une augmentation annuelle d'un milliard d'euros. Notre objectif est d'atteindre 14 milliards d'euros en 2019, voire 18 milliards en 2020, afin de respecter l'objectif présidentiel de 0,55% du RNB. D'ailleurs, le projet de loi de finances pour 2019 constitue une première étape en ce sens : l'AFD va disposer de moyens exceptionnels d'engagement, autant pour ses prêts que pour ses dons, avec deux milliards d'euros de subventions ; ce montant prenant en compte non seulement le budget voté en loi de finances, mais aussi l'apport des différents fonds qu'elle obtient soit à Bruxelles soit auprès d'autres instances multilatérales. Si ses ressources budgétaires françaises vont être multipliées par quatre, les fonds que l'AFD obtient auprès des organismes multilatéraux ont doublé. Ainsi, elle vient d'obtenir 240 millions de dollars du Fonds vert pour le climat en soutien d'un programme d'adaptation des pays les plus pauvres au changement climatique.
Alors que la politique de développement avait perdu 40% de ses crédits depuis la fin du mandat de Jacques Chirac, l'inversion de cette trajectoire n'a été possible qu'à la condition du renforcement de notre pilotage politique. S'inspirant du fonctionnement des conseils de défense, cette nouvelle forme de pilotage implique des réunions périodiques avec le Président de la République et une loi de programmation. Le Premier ministre est impliqué régulièrement dans le cadre des travaux du Comité interministériel de la coopération et du développement (CICID) et l'Agence est sous la tutelle de trois ministères : économie et finances, Europe et Affaires étrangères, ainsi que le ministère des Outre-mer.
Toutes les administrations, avec d'autres parties prenantes, dont les parlementaires, sont réunies et approuvent les projets de l'AFD. Nous sommes très attentifs à répondre à vos sollicitations et à vous rendre des comptes sur nos travaux, comme je le ferai prochainement devant la section du Sénat de l'Assemblée parlementaire de la francophonie. La Cour des comptes vient d'ailleurs de rendre un rapport positif sur la gestion et la stratégie de l'AFD.
Les moyens budgétaires votés sont concentrés dans les pays prioritaires : les trois-quarts des subventions doivent être employés dans les dix-neuf pays prioritaires de l'aide française, dont le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso. Les prêts concessionnels sont destinés aux pays émergents de l'Afrique, comme la Côte d'Ivoire, le Kenya, le Congo-Brazzaville, le Nigéria et le Maroc. Il s'agit, pour l'Agence, d'y obtenir des résultats plus importants en volume en consentant à ces prêts.
En outre, avec quarante-deux milliards d'euros de bilan, l'Agence est aussi une banque qui peut accorder des prêts non concessionnels aux taux du marché, notamment à nos territoires ultramarins, de plus en plus reliés à leur environnement régional, et à d'autres pays émergents, comme la Colombie, le Brésil et le Kenya, où la France a des intérêts.