Il me revient de vous exposer le bilan d'une campagne budgétaire qui s'est chiffrée en 2018 à un peu plus de 22 milliards et qui a concerné près de 16 500 établissements et services médico-sociaux à destination des personnes âgées et des personnes handicapées. En ces temps de réforme annoncée du financement de la perte d'autonomie, il me semble important de vous en rappeler les principaux caractères. Les dotations finançant les dépenses de soins de ces établissements et services leur sont versées par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), via les agences régionales de santé (ARS). Elles proviennent très majoritairement de la part de l'Ondam consacrée au secteur médico-social, mais également de plusieurs ressources propres de la CNSA. Parmi ces dernières, deux prélèvements fiscaux sont assis sur les revenus : la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA), mieux connue sous le nom de « journée de solidarité », et la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa). À partir de 2019, s'y ajoutera une fraction du produit de la CSG.
Cette année encore, l'Ondam médico-social a fait l'objet d'une consommation inférieure de près de 200 millions aux montants initialement engagés, intégralement couverte par un recours à la trésorerie de la CNSA. Cette pratique, installée depuis plus de trois ans, continue de faire reposer sur un expédient financier un besoin de financement que le vieillissement de la population ne pourra pourtant jamais endiguer. Nous avions l'année dernière l'espoir que cette habitude regrettable finirait par cesser ; nous avons au contraire appris que ces fameuses réserves de la CNSA seraient ponctionnées de près de 490 millions en 2019 ! Autrement dit, littéralement épuisées.
Plus inquiétant, les différences instances de surveillance de l'Ondam retiennent pour 2019, pour la première fois, un tendanciel de dépenses de soins du secteur médico-social dont le rythme d'évolution diminue. De 3,9 % cette année, il passerait à 3,6 % l'an prochain. Alors que le Gouvernement maintient son ambition d'une médicalisation renforcée des établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes (Ehpad) et que les besoins d'accompagnement thérapeutique des personnes handicapées n'ont jamais été aussi importants, on ne peut qu'être interdit. Ce ralentissement pourrait venir du virage inclusif de l'offre médico-sociale amorcé par le Gouvernement, selon lequel les parcours des personnes âgées et handicapées doivent privilégier la coordination de services à l'accueil en établissement. En préférant la meilleure organisation de l'offre disponible à l'ouverture de nouvelles places, on fait le pari de parcours mieux adaptés et d'économies d'échelle simultanées. Bien que partageant cette ambition sur le long terme, je m'interroge sur le calendrier retenu : engager dès à présent ce virage inclusif alors que les deux secteurs du grand âge et du handicap n'en sont qu'aux prémices de réformes tarifaires de très grande ampleur me paraît particulièrement hasardeux. La concertation que conduit Dominique Libault sur la réforme de la dépendance vient à peine d'être lancée et le chantier d'évolution de l'offre médico-sociale pour les personnes handicapées connaît d'inquiétants signes d'essoufflement. Est-ce le moment opportun pour un ralentissement de l'évolution des dépenses de soins ?
Le dispositif du PLFSS relatif au secteur médico-social est une fois de plus très réduit. Les articles 40 et 41 concentrent à eux seuls l'ensemble des innovations portées par le Gouvernement en matière médico-sociale pour 2019. L'article 40 met en oeuvre d'une des promesses de la stratégie nationale pour l'autisme, en organisant le financement intégral par l'assurance maladie d'un parcours de bilan et d'intervention précoce destiné aux jeunes enfants atteints du trouble du neuro-développement. Il s'agit d'un indéniable progrès, qui permettra de soulager des familles contraintes de recourir à des professionnels libéraux - ergothérapeutes et psychomotriciens - souvent non conventionnés. Pour autant, l'article me paraît présenter plusieurs maladresses. Je vous présenterai quelques amendements pour le rendre plus opérationnel et réduire le risque de rupture d'égalité. L'article 41 accélère le rythme de convergence tarifaire des forfaits globaux de soins attribués aux Ehpad, dont la loi portant adaptation de la société au vieillissement avait initialement fixé le terme à sept ans. La mesure est intéressante mais laisse entier le problème du modèle financier des Ehpad, que je vous avais présenté en mars. Aucune mesure spécifique n'est prévue pour remédier aux effets dommageables de la réforme du forfait dépendance et les restes à charge des résidents se maintiennent à des niveaux intolérablement élevés. Bien que le Gouvernement ait lancé d'ambitieux chantiers sur ces questions dont l'urgence n'est plus à prouver, notre commission devra rester vigilante.
Sous réserve de l'adoption de ces amendements, j'émets un avis favorable sur les dispositions médico-sociales.