Intervention de Jean-Pierre Decool

Réunion du 6 novembre 2018 à 21h45
Suppression de surtranspositions de directives européennes — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

Monsieur le président, madame la ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, ce projet de loi entend lutter contre les surtranspositions de directives européennes, en supprimant un grand nombre de cas, dans des domaines variés.

Cette initiative est louable tant le problème de surtransposition est bien identifié. Certains de nos voisins européens – l’Allemagne, la Suède ou l’Italie – ont adopté le principe d’interdiction de toute surtransposition n’intervenant pas pour protéger les intérêts du pays d’un préjudice causé par la transposition à l’identique d’une norme européenne.

D’une part, ce phénomène est révélateur d’une apparente déconnexion entre la phase de négociations européennes et celle de transposition en droit national. D’autre part, il semble mettre en évidence un certain nombre d’insuffisances dans les études d’impact menées par nos institutions.

Aussi le présent projet de loi répond-il, de façon non exhaustive, à l’un des symptômes de l’inflation normative, pénalisante pour notre économie et pour le fonctionnement de nos institutions.

Dans un monde globalisé, le droit est un des éléments de notre compétitivité nationale. Les situations de surtransposition, lorsqu’elles ne sont pas justifiées par des raisons de sécurité ou de justices sociale ou environnementale, créent une force d’inertie dans le fonctionnement de notre économie et peuvent engendrer des distorsions de concurrence au sein du marché européen.

Il nous faut donc alléger, autant que faire se peut, le fardeau normatif, tout en préservant notre autonomie politique. Il ne s’agit pas d’appliquer le droit européen à la lettre, sans l’adapter, de façon pragmatique, aux réalités locales.

Nous nous devons également de veiller à limiter les situations dans lesquelles le droit européen entre en contradiction avec la volonté de nos concitoyens et entrave leurs libertés. Aussi la volonté de nombreux élus de favoriser les circuits alimentaires de proximité dans la restauration collective se heurte-t-elle avec les règles d’attribution des marchés publics issues du droit européen.

Par ailleurs, dans des situations où le droit européen serait moins protecteur que le droit national, il paraît essentiel de préserver notre liberté politique, notamment en matière de sécurité sanitaire.

Le principe de subsidiarité et l’adaptabilité du droit européen au droit national sont les premiers remparts contre l’euroscepticisme. La préservation de ces principes est une condition sine qua non de l’acceptabilité sociale de l’Union européenne.

En effet, dans bien des cas, la surtransposition d’une directive peut relever d’un choix politique conscient. Lorsque la France n’a pas su faire prévaloir ses intérêts au cours de négociations européennes, le temps de la transposition des directives est un des derniers leviers d’action dont nous disposons pour préserver nos intérêts.

À ce titre, comme l’a souligné le Conseil d’État dans son avis consultatif, l’étude d’impact du présent texte ne nous permet pas de comprendre pleinement la logique des surtranspositions que nous souhaitons supprimer aujourd’hui ni leur impact, positif ou négatif, pour les contribuables, les entreprises ou les pouvoirs publics.

C’est bien là le seul bémol que nous pourrions apporter à ce texte. Si le groupe Les Indépendants le soutient, il appelle également de ses vœux une réponse plus systémique aux situations de surtranspositions du droit européen. Au cours des années à venir, il nous paraît essentiel de renforcer la stratégie d’influence de la France au sein des institutions européennes, notamment lors des négociations, en amont de l’adoption des textes. Plus la France sera présente et active au sein des institutions européennes, moins les directives transposées seront éloignées des intérêts nationaux et des réalités locales. Il y va de l’intérêt de la France et de l’Union européenne, car, pour reprendre les propos du général de Gaulle, « on ne fait pas de politique autrement que sur des réalités ».

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