Intervention de Jean-Michel Blanquer

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 7 novembre 2018 à 17h35
Projet de loi de finances pour 2019 — Audition de M. Jean-Michel Blanquer ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et de M. Gabriel Attal secrétaire d'état auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Jean-Michel Blanquer, ministre :

J'ai beaucoup de considération pour l'enseignement agricole qui entretient d'excellentes relations avec l'enseignement général. Facteur de réussite pour les élèves, il est un partenaire essentiel de l'éducation nationale. En pratique, lorsque la réforme du baccalauréat a été conduite, nous avons instauré une nouvelle spécialité « écologie, agronomie et territoire » qui peut également s'adresser aux élèves des lycées généraux. Sa visibilité va devenir plus forte pour un thème important pour les élèves, à l'instar de la révolution numérique.

Les conventions de ruralité ne devraient pas être modifiées ; l'objectif étant de couvrir l'ensemble des 66 départements considérés comme ruraux. Avec le sénateur Alain Duran, nous avons ajouté dix départements au dispositif existant et chaque contrat a été rediscuté, afin d'aboutir à une vision stratégique qualitative. Je souhaite que la Vendée soit bénéficiaire d'un contrat de ruralité.

Les AESH sont un sujet important. Avec Sophie Cluzel, nous avons entamé un cycle de discussions avec l'ensemble des acteurs qui doit se terminer en février. Puisque les contrats aidés sont voués à disparaître, nous souhaitons que les AESH soient mieux rémunérés et bien formés. Certes, tous les AESH n'exercent pas à temps plein, ce qui obère leur rémunération. Cette réflexion nous conduit à envisager le temps de l'enfant et à préconiser un lien plus fort entre le scolaire et le périscolaire. L'État et les collectivités locales doivent concevoir ce temps ensemble, afin d'améliorer l'accompagnement de l'enfant et la rémunération des AESH qui doivent également bénéficier de soixante heures de formation annuelle.

Les professeurs doivent également être formés à l'accueil des 340 000 enfants handicapés dans l'école désormais inclusive et bénéficier d'une formation favorisant, dans la durée, la personnalisation des parcours.

La Seine-Maritime est en effet un cas particulier et je ne vous détaillerai pas la manière avec laquelle je compte parvenir à un résultat. La vie de l'éducation nationale ne saurait être contentieuse et la judiciarisation de la vie scolaire, déjà présente, n'a pas à être accentuée. Ce département doit également bénéficier d'une convention de qualité.

Avec 850 000 enseignants pour 12 millions d'élèves, le taux d'encadrement n'est pas, en soi, un problème, puisqu'il faut y ajouter d'autres paramètres comme le nombre d'heures et la répartition territoriale. Nous devons assumer l'ensemble des conséquences de notre modèle éducatif. Ce sujet est plutôt qualitatif : le taux d'encadrement variera peu ou pas avec la mise en oeuvre de nos mesures, parmi lesquelles la seconde heure supplémentaire obligatoire. Quand bien même ces heures supplémentaires, à l'échelle d'un établissement, s'avéreraient insuffisantes, leur impact devrait se limiter à un élève pour trois classes.

La priorité pour le premier degré est clairement assumée et le second degré va connaître une baisse démographique à la suite de celle enregistrée dans l'enseignement primaire. C'est là un cap à passer. Valoriser la fonction de professeur et avoir une école primaire qui parvient à envoyer dans le secondaire des élèves aux compétences consolidées sont des enjeux qualitatifs auxquels nous tenons.

Les recteurs sont attentifs, au cas par cas, aux situations de handicap, à l'instar des épisodes qui viennent de se dérouler en Guyane et en Seine Maritime et relèvent avant tout des ressources humaines.

Je vous remercie de souligner l'importance de la scolarisation à l'âge de trois ans pour l'outre-mer. Cette démarche se traduit par des créations de postes en Guyane et à Mayotte où la faible scolarisation des enfants en bas âge explique, pour partie, les difficultés scolaires qu'ils éprouvent une fois à l'école élémentaire. Le PLF 2019, avec 80 millions d'euros en autorisations d'engagement et 50 millions d'euros en crédits de paiement, permet de financer un plan volontariste inédit pour Mayotte. Conformément aux attentes, l'État s'y engage budgétairement dans la durée et travaille activement avec les Comores pour limiter le flux migratoire. Il est désormais possible d'être optimiste pour Mayotte, même si de nombreux obstacles restent à franchir. La création d'un rectorat, comme l'y invite le projet de loi qui vous sera soumis début 2019, est à cet égard significative. Dans le domaine éducatif, nos engagements du plan Guyane seront également tenus.

C'est la première fois qu'est véritablement instaurée cette mesure, annoncée pourtant par le passé, de l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire. L'acquis que représente l'instruction obligatoire à trois ans est plus important que le problème posé. Il s'agit bel et bien d'une avancée.

Les collectivités seront accompagnées financièrement par l'État pour couvrir les frais générés par l'instruction obligatoire à trois ans, dans le respect de la constitution et avec le soutien de la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur. L'évaluation financière se fera progressivement, puisque les 25 000 élèves supplémentaires que nous allons accueillir en maternelle doivent être rapportés à la baisse globale du nombre de 60 000 élèves. Les frais supplémentaires, qui seront, à cette occasion, engagés par les communes, seront compensés par l'État.

Les préconisations du rapport présenté par la sénatrice Laborde et le sénateur Brisson, tout comme celles du rapport sur le numérique de la présidente Morin-Desailly, auront une influence sur le contenu de la prochaine loi.

Une mission, conduite par l'ancien recteur Bernard Saint-Girons, sur la place du concours, devrait bientôt rendre ses conclusions. Il s'agit de faire évoluer la situation actuelle, avec une vision différente pour les premier et second degrés. L'exigence du niveau master demeurera inchangée, mais nos professeurs entreront dans la carrière de manière progressive, soit dans le cadre du pré-recrutement, soit suite au positionnement du concours lui-même. Il est nécessaire que le ministère de l'éducation nationale contribue, en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur, à la définition des formations dispensées en ÉSPÉ. Il faut susciter des vocations de professeur, dès le collège et le lycée, en octroyant par la suite des bourses spécifiques et en favorisant la mixité sociale au sein de notre corps enseignants.

Si le PPCR peut renforcer le système à l'ancienneté, des mesures en faveur des jeunes professeurs sont prises. Nous faisons évoluer le système. La hausse de 1 000 euros annuel, qui vient s'ajouter à la désocialisation des heures supplémentaires qu'il sera plus aisé d'obtenir, représente un acquis à la fin du quinquennat au profit des jeunes certifiés et des jeunes professeurs des écoles. C'est pourquoi, la création d'un observatoire de la rémunération des professeurs, sous l'égide du directeur des ressources humaines du ministère, nous permettra d'évaluer concrètement les conséquences de ces mesures.

La gestion des ressources humaines (GRH) de proximité va permettre d'accompagner le développement des postes à profil, afin de tenir compte des particularités des territoires et des établissements ; le dédoublement des classes de CP et de CE1, ouvert aux enseignants volontaires, a permis le profilage des postes.

Nous devons renforcer l'enseignement général dans l'enseignement professionnel, car la culture générale et les savoirs fondamentaux de nos élèves doivent être consolidés. Cette démarche doit être avant tout qualitative. L'élève de l'enseignement professionnel reçoit déjà 34 heures d'enseignement par semaine. Dans la lignée du rapport de Régis Marcon et de Céline Calvez, la co-intervention, c'est-à-dire un enseignement général mieux articulé avec l'enseignement professionnel, est privilégiée pour favoriser la progression des élèves.

Je vous remercie de vos propos sur le conseil supérieur des programmes. Les professeurs sont d'ailleurs particulièrement invités à améliorer le contenu des programmes disponibles sur internet ; l'objectif ultime étant d'élever le niveau général des élèves.

Enfin, nos choix budgétaires se traduisent en dépenses salariales : 810 millions d'euros seront consacrés à l'augmentation du salaire des professeurs.

Merci également d'avoir souligné que l'engagement en faveur de l'école primaire, à travers notamment la création de postes, transparaît dans le budget. La baisse des crédits de la formation des professeurs n'est que le produit de la sincérisation des moyens que nous y consacrons. Cela n'exclut pas du tout de futures augmentations budgétaires en faveur de la formation des professeurs, à la condition de les articuler à des fins.

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