Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la raréfaction de la construction neuve et l'importance de la demande en matière de logement social conduisent aujourd'hui à un engorgement des fichiers de demandeurs de logement.
Face à cette situation de blocage, la solution qui est aujourd'hui mise en avant par le Gouvernement est le développement de l'offre sur un créneau spécifique. Cette volonté est très nettement exprimée dans l'article 31 bis du code général des impôts et dans l'article 11 de la loi de finances pour 2003.
Avec la première de ces dispositions, le Gouvernement avait choisi de modifier les règles en vigueur en matière d'investissement locatif des particuliers en majorant sensiblement l'incitation fiscale issue du dispositif Besson. En fait, il s'agissait essentiellement de permettre aux investisseurs de capter une clientèle moyennement ou relativement fortunée en proposant des loyers de première mise en location particulièrement attractifs.
Deux mesures essentielles ont été prises à cette fin : la non-prise en compte d'un quelconque plafond de ressources pour les locataires et le sensible relèvement des loyers autorisés.
On connaît le coût fiscal de cette politique pour l'État : il s'élève à 300 millions d'euros si l'on en croit l'évaluation des voies et moyens. Il semble qu'il soit, en réalité, plus important : selon certaines estimations indiscutables, le montant de la dépense fiscale associée à la réalisation du moindre logement « Robien » s'élève à plus de 33 000 euros !
Quant à la seconde disposition, elle consiste à diviser par deux le taux de l'impôt sur les sociétés pour les sociétés d'investissement immobilier cotées, dont les profits sont désormais taxés à hauteur de 16 %, au lieu de 33, 33 % auparavant.
Cette législation, vous le savez, a largement encouragé les opérations de vente à la découpe. Rappelons, par exemple, que la société GECINA, spécialisée dans cette activité, a ainsi réalisé une économie d'impôt de 400 millions d'euros en 2004 et que, malgré une légère contraction du résultat imposable de l'entreprise, l'économie réalisée au titre de l'année 2005 reste tout à fait substantielle. Là encore, le coût pour l'État, en termes de dépense fiscale, n'est pas négligeable puisqu'il atteint près de 1 milliard d'euros.
Par ces dispositions, le Gouvernement a donc opté pour une politique de dépense fiscale au profit de quelques ménages fortunés : un trait a été tiré sur une dépense publique pourtant nécessaire.
Si l'on veut lutter efficacement contre l'instauration d'un marché du logement profondément ségrégatif, si l'on veut éradiquer la paupérisation des quartiers d'habitat collectif, les dépenses publiques pour le logement doivent être réorientées vers les priorités que sont l'offre locative sociale et l'accession sociale à la propriété.