Intervention de Bernard Bonne

Réunion du 12 novembre 2018 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2019 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Bernard BonneBernard Bonne :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le secteur médico-social pâtit à chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale d’une visibilité bien en deçà des enjeux cruciaux qu’il soulève.

Je voudrais, une nouvelle fois, regretter l’habitude tenace des gestionnaires des crédits de l’assurance maladie, à laquelle les exercices 2018 et 2019 ne font malheureusement pas exception. Cette habitude consiste à ponctionner de plusieurs centaines de millions d’euros – 200 millions d’euros en 2018 – le montant initialement voté des crédits médico-sociaux au profit d’autres objectifs et de faire couvrir la différence par un prélèvement sur la trésorerie excédentaire de la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Cette pratique complique le contrôle des dépenses médico-sociales et, surtout, fait reposer le financement de besoins pérennes et exponentiels sur une ressource appelée à disparaître.

Plus que sur l’origine de ces crédits, c’est sur leur usage que je souhaite m’exprimer. Les deux secteurs concernés, le grand âge et le handicap, sont aujourd’hui dans ce qu’il faut bien appeler une impasse tarifaire.

Le modèle financier des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes fait actuellement l’objet d’une concertation de grande importance, dont les résultats sont attendus pour le début de l’année 2019. Sans préjuger ses conclusions, je garde en mémoire les propos du Président de la République, qui, dans son discours de Montpellier du 13 juin dernier, en appelait à plus de médicalisation.

Madame la ministre, je ne peux partager cette vision d’une offre médico-sociale pour personnes âgées, de ce « blanc manteau d’EHPAD » qui ne serait en fait qu’une offre hospitalière sous-dotée, tristement revêtue d’un mince vernis social, dont personne ne semble comprendre qu’il doit être la priorité, pour des raisons de simple humanité. C’est de services, c’est d’humain dont nous avons besoin ! L’accompagnement des personnes âgées ne se résume pas au soin, augmenté d’une prestation hôtelière ; il doit être autre chose qui n’existe pas encore et que nous avons le devoir d’inventer.

Quant au secteur du handicap, l’aboutissement de la réforme intitulée « services et établissements : réforme pour une adéquation des financements aux parcours des personnes handicapées », dite SERAPHIN-PH, ambitieuse et unanimement saluée dans son principe, n’est toujours pas connu avec certitude.

Cette réforme, qui doit permettre de sortir d’une logique stricte de reconduction des dotations historiques, montre quelques signes d’essoufflement et prend une tournure qui n’était pas initialement annoncée. Comme dans le secteur des EHPAD, elle ne s’est jusqu’ici concentrée que sur les besoins des personnes handicapées en matière de santé somatique et psychique, négligeant leurs besoins socio-éducatifs. Or c’est tout l’enjeu de la société inclusive, dont il n’a cessé d’être question, que de « démédicaliser » l’accompagnement des personnes handicapées et de revaloriser fortement sa dimension humaine et sociale.

L’avenir de ces deux secteurs, madame la ministre, semble dangereusement s’écarter de leur vocation nécessaire : préserver la place de l’accompagnement des personnes et résister à l’invasion facile du médical, qu’entraîne l’assimilation de l’âge et du handicap à la maladie.

Pour en revenir au texte dont il est question aujourd’hui, et sous réserve des remarques que je viens d’exprimer, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des dispositions médico-sociales du PLFSS.

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