Intervention de Roger Karoutchi

Réunion du 12 novembre 2018 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2019 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Roger KaroutchiRoger Karoutchi :

La commission des finances souhaite appeler l’attention du Sénat sur quelques points.

En premier lieu, l’amélioration des soldes ne doit masquer ni la dégradation de la branche vieillesse, qui voit son excédent diminuer, ni le déficit persistant de la branche maladie, qui ne se réduirait que de 400 millions d’euros entre 2018 et 2019.

En second lieu, la réduction des déficits ne repose pas sur une diminution des dépenses, puisqu’en 2018 celles-ci augmentent de 2, 4 %, dépassant de 900 millions d’euros le plafond prévu en loi de financement. Le redressement des comptes résulte donc entièrement de la forte progression des recettes de l’ordre de 3, 5 % en 2018. Structurellement, plusieurs branches demeurent déficitaires, à commencer par les branches vieillesse et maladie.

Le recul de l’âge légal de la retraite mis en œuvre par la réforme de 2010 ayant cessé de produire ses effets, les dépenses de la branche vieillesse devraient fortement augmenter dans les années à venir. De la même manière, les dépenses de la branche maladie demeurent extrêmement dynamiques. En 2019, avant les mesures prévues par le présent projet de loi de financement, cette hausse des dépenses devait entraîner une dégradation de 3 milliards d’euros du solde de la sécurité sociale.

Les deux tiers des économies présentées par le Gouvernement, soit 3, 8 milliards d’euros, proviendront de l’ONDAM. Plus du tiers des économies restantes, soit 2, 2 milliards d’euros, résultera du quasi-gel des prestations sociales – je n’entrerai pas dans le détail, puisque mon collègue Savary a excellemment exposé la situation, tant le gel et la hausse de la CSG que leur impact sur près de 10 millions de retraités, même si, au travers de ce texte, vous comptez atténuer la mesure pour 350 000 foyers.

Parallèlement, deux mesures emblématiques en recettes sont présentées par le Gouvernement. Il s’agit, d’une part, de la bascule du CICE en allégements généraux de charges et, d’autre part, de l’exonération de cotisations salariales vieillesse sur les heures supplémentaires.

L’entrée en vigueur des allégements généraux a pour conséquence de rendre comparativement moins attractifs plusieurs dispositifs. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale supprime ou modifie un certain nombre d’entre eux, dont ceux qui sont applicables aux travailleurs occasionnels et aux demandeurs d’emploi. La commission des finances a adopté un amendement visant à pérenniser le dispositif d’exonérations spécifiques rétabli par l’Assemblée nationale pour ces travailleurs occasionnels.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale instaure par ailleurs une exonération de cotisations sociales salariales vieillesse sur les heures supplémentaires et complémentaires. Si cette mesure va dans le bon sens, la commission des finances a adopté un certain nombre d’amendements ayant pour objet la défiscalisation totale des heures supplémentaires, qui a fait la preuve de son efficacité.

Par ailleurs, le présent projet de loi tire les conséquences du rapport Charpy-Dubertret et esquisse plusieurs pistes quant au devenir des excédents dégagés par la sécurité sociale.

Tout d’abord, ces excédents futurs permettraient de résorber définitivement la dette sociale. Dans cette perspective, le projet de loi de financement de la sécurité sociale organise le transfert à la CADES de 15 milliards d’euros de la dette résiduelle détenue par l’ACOSS, le résidu de dette non transféré à la CADES ayant vocation à être amorti par les excédents futurs de la sécurité sociale. Toutefois, la commission des finances est plus prudente et appelle à ne voir que l’aspect hypothétique de ces excédents : on ne peut pas considérer que, dans les cinq ou dix ans qui viennent, nous serons certains des excédents en question.

Ensuite, les nouvelles relations financières entre l’État et la sécurité sociale s’articuleraient autour du principe de solidarité financière entre les deux sphères. Cela aurait deux conséquences majeures.

En premier lieu, cette solidarité financière impliquerait un partage du coût des allégements de charges entre l’État et la sécurité sociale.

En second lieu, les excédents de la sécurité sociale auraient vocation à être restitués à l’État. Cette restitution serait réalisée dans le cadre d’une réduction progressive de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale.

La commission des finances a appelé à plusieurs reprises l’attention du Gouvernement sur cette vision extrêmement optimiste liée à un calcul d’excédents excessif par rapport à ce qui est probable.

Malgré cela, la commission des finances et la commission des affaires sociales ayant proposé un certain nombre d’amendements, la commission des finances appellera à un vote positif sur ce texte si, bien sûr, ces amendements sont adoptés.

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