Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 12 novembre 2018 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2019 — Discussion générale

Olivier Dussopt :

Je dirai quelques mots, en écho aux différentes interventions.

Monsieur le rapporteur général, nous partageons votre constat : nous sommes satisfaits du redressement des comptes de la sécurité sociale, mais nous en connaissons la fragilité.

Ce PLFSS pour 2019 affiche une économie de 5, 7 milliards d’euros et l’ambition d’un solde excédentaire. Pour autant, il n’y a certainement pas de « cagnotte sociale », comme j’ai eu l’occasion de le souligner, encore moins eu égard aux 120 milliards de dettes cumulées du système social.

Le décalage au 1er octobre du renforcement des allégements généraux au niveau du SMIC pour 2019 n’a pas d’impact sur les comptes sociaux, puisque l’ensemble de ces allégements sera totalement compensé par l’État l’année prochaine. Il n’y aura donc pas d’impact sur le solde ni aucun risque sur les comptes de la sécurité sociale.

En ce qui concerne la rénovation des relations financières entre l’État et la sécurité sociale, vous exprimez votre crainte de voir apparaître une chronique pluriannuelle de baisse de la TVA affectée à la sécurité sociale.

Or les nouveaux principes exposés dans le rapport qui vous a été remis doivent bien évidemment être débattus au sein de votre assemblée, ce que permettra justement l’examen de ce PLFSS.

Par ailleurs, nous proposons d’appliquer ces nouveaux principes jusqu’en 2022, selon une trajectoire pluriannuelle que déterminera ce PLFSS et qui pourra, en fonction des aléas d’exécution que vous avez évoqués, être révisée lors des prochains PLFSS, le cas échéant.

La mise en œuvre de cette trajectoire nous paraît indispensable pour clarifier réellement et rendre plus lisibles les transferts financiers devenus complexes et permettre l’application de ces nouveaux principes dans la durée. Nous mettrons tout en œuvre, dans le cadre de l’exécution des PLFSS, pour pouvoir la tenir.

Je tiens encore à préciser deux points. D’une part, la chronique de minoration de la TVA transférée à la sécurité sociale d’ici à 2022 nous permet d’assurer – et il s’agit pour nous d’une priorité – à la fois l’équilibre des comptes de la sécurité sociale sur toute cette période, avec la nuance que j’ai introduite à l’instant, et un désendettement global de la dette sociale d’ici à 2024.

D’autre part, sur le sujet des relations financières entre l’État et la sécurité sociale, vous avez été nombreux, sur l’ensemble des travées, à rappeler le principe de compensation posé par la loi de 1994. Comme je l’ai souligné lors de l’examen de la motion, les compensations n’ont pas été systématiques depuis 1994 : nous avons pléthore d’exemples d’exonérations non compensées en termes de recettes par l’État. Nous ne rompons donc pas avec un principe inscrit dans le marbre, comme certains l’ont laissé entendre.

J’en viens maintenant aux interrogations concernant les exonérations dont bénéficient les employés du secteur non lucratif.

Jusqu’en 2018, les associations – pour faire simple, mais nous savons que le champ peut être plus large – bénéficiaient du CITS, qui leur permettait de profiter d’un crédit d’impôt à hauteur de 4 points de cotisations employeur acquittées pour l’emploi d’un salarié, et ce jusqu’à 2, 5 SMIC.

À partir de 2019, le CITS, comme le CICE, qui octroyait un crédit de 6 points dans une fourchette sensiblement identique, est transformé en allégement de cotisations patronales pérenne de 6 points dès le 1er janvier.

Les employeurs du secteur non lucratif, notamment les associations, vont donc automatiquement passer, entre le 31 décembre 2018 et le 1er janvier 2019, d’un système de CITS à 4 points à un système d’allégement de cotisations à 6 points. Ils seront donc gagnants.

J’ajoute que ces mêmes employeurs bénéficieront, à partir du 1er octobre, dans les mêmes conditions, de l’allégement renforcé au niveau du SMIC, comme l’ensemble des employeurs.

Je saisis l’occasion pour préciser que les allégements renforcés prévus à partir du 1er octobre 2019 seront mis en œuvre dès le 1er janvier pour les employeurs agricoles. Nous avons arbitré de manière à accompagner tout de suite, et plus fortement, le secteur agricole.

Le gain total que permet le passage du CITS à 4 points à l’allégement pérenne à 6 points est important pour le secteur non lucratif : 1, 4 milliard d’euros en année pleine.

La « désocialisation » des heures supplémentaires, même si ce barbarisme n’est pas forcément le plus adapté, est un choix délibéré.

Ce dispositif s’appliquera, à partir de la fin de l’année 2019, à l’ensemble des salariés du secteur privé et du secteur public. Nous assumons le coût induit sur les comptes de la sécurité sociale en ce que cette mesure permettra de mieux rémunérer le travail.

Nous partageons totalement les chiffres que vous avez cités, madame Fournier, et qui démontrent que les employés, les ouvriers, celles et ceux qui ont aujourd’hui les revenus les moins importants, seront les bénéficiaires les plus nombreux de ce dispositif.

Nous veillons à ce que l’ensemble des salariés de ce pays, ceux du secteur privé comme ceux du secteur public, puisse en bénéficier. Il faut apporter une précision : le bénéfice des agents publics est un peu moindre que celui des salariés du secteur privé, parce que les premiers, titulaires ou contractuels – là aussi, une très légère différence existe entre les deux régimes –, n’acquittent pas un certain nombre de cotisations visées par l’exonération.

Pourquoi avoir choisi la désocialisation plutôt que la défiscalisation, au-delà des impacts budgétaires que vous avez évoqués ? Principalement pour deux raisons qui se recoupent : ce système de désocialisation et d’exonération de cotisations salariales bénéficie à l’ensemble des salariés, imposables ou non, contrairement à un système de défiscalisation ; par ailleurs, le plafonnement des cotisations salariales acquittées par les salariés dans le cadre des régimes que nous connaissons nous permet, en termes de coût et de mobilisation financière, de concentrer le gain sur les premiers centiles de revenus : le bénéfice des personnes disposant des revenus les plus importants sera moins progressif du simple fait du plafonnement des cotisations acquittées par les salariés.

Je terminerai en évoquant un point qui fait débat, ici comme à l’Assemblée nationale, celui du régime social des avantages accordés aux salariés par les comités d’entreprise.

L’Assemblée nationale a adopté un amendement d’origine parlementaire, sous-amendé par le Gouvernement, qui avait vocation à clarifier le dispositif proposé et notamment à protéger ce que l’on appelle parfois un peu facilement les chèques-vacances.

Cet amendement visait donc à clarifier un régime de droit qui n’est pas clair, les exonérations dont bénéficient ces avantages accordés aux salariés s’appuyant davantage sur des tolérances internes aux URSSAF que sur des règles juridiques établies.

À côté de ce besoin de clarification, la volonté du Gouvernement est de s’assurer qu’aucun salarié qui en bénéficie ne soit taxé sur ces dispositifs. Il est hors de question de prélever quoi que ce soit sur ces dispositifs réguliers, récurrents, de chèques-vacances.

Peut-être le travail a-t-il été mené trop rapidement. Il faut donc le poursuivre, sans adopter, à ce stade, de disposition législative. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement soutiendra les amendements de suppression de cette disposition déposés à l’article 7 bis. Nous pourrons ainsi, d’ici au prochain PLFSS, travailler sereinement, tranquillement, et aboutir au seul objectif qu’a jamais poursuivi la majorité à l’Assemblée nationale et auquel le Gouvernement souscrit : la sécurisation du cadre juridique de ces dispositifs sans aucune taxation aux dépens des salariés.

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