Selon les documents budgétaires, la mission « Économie » affiche, à périmètre constant, un montant de crédits de paiement en augmentation cette année de 6,09 % par rapport à 2018, mais cela n'est dû qu'aux crédits déployés pour la mise en oeuvre des réseaux d'initiative publique, dans le cadre du programme « France très haut débit ». Si l'on excepte cet effort ponctuel - effectivement important - le reste des crédits baisse de 7,3 %, à la faveur, comme l'indiquent pudiquement les documents budgétaires, « d'une rationalisation des aides aux entreprises ». Comme c'est bien dit ! Ce mouvement s'accompagne d'une baisse du plafond d'emplois de 325 équivalents temps plein travaillé (ETPT), pour s'établir à 11 693 ETPT pour 2019.
Par rapport à l'année passée, le suivi budgétaire du programme 134 « Développement des entreprises et régulation » est d'ailleurs rendu très malaisé par le regroupement de diverses actions. L'administration explique cette évolution par un souci de lisibilité et de rationalisation de présentation, compte tenu notamment de la faible dotation de certaines actions. Au total, le programme connaît une baisse de 13,2 % de ses autorisations d'engagement, et de 7,8 % de ses crédits de paiement. Mais, si elles avaient été conservées, ces actions auraient montré une baisse considérable du montant de leurs autorisations d'engagement depuis 2013 : - 86 % pour l'action n° 2 « Commerce, artisanat, services », -76 % pour l'action n° 3 « Entreprises industrielles » et - 90 % pour l'action n° 21 « Tourisme »...
Au final, le budget de la mission - et plus particulièrement son programme 134 - témoigne, incontestablement, d'un désengagement financier de l'État dans son rôle d'appui aux acteurs économiques, sur lequel je reviendrai. Je souligne néanmoins dès maintenant qu'il est concomitant au désengagement forcé d'autres acteurs de l'accompagnement des entreprises que sont les chambres de commerce et d'industrie (CCI), auxquelles est assignée une nouvelle trajectoire de baisse 400 millions d'euros sur quatre ans, alors que le montant de la taxe affecté a diminué de 46 % depuis 2012 et que l'an dernier, après une nouvelle baisse de 150 millions d'euros, le Gouvernement s'était engagé à garantir la stabilité des ressources des CCI en 2019-2022... C'est une promesse non tenue. Il est certes indispensable que le réseau consulaire évolue, mais il faut lui laisser le temps de se réorganiser. Or, cette trajectoire financière n'est pas compatible avec cette réorganisation : une baisse de 100 millions d'euros implique en effet des suppressions d'emplois à hauteur de 1 000 ETPT qui, elles-mêmes, génèrent 100 millions d'indemnités qui devront être intégralement prises en charge par les CCI... En outre, elle remet en cause les projets très pertinents, et pourtant soutenus par l'État, en matière d'appui à l'export et de mutualisation avec Business France. Faut-il penser que l'objectif du Gouvernement est purement et simplement de faire disparaître le réseau ?
J'entends déposer un amendement à titre personnel, puisqu'il s'agit d'une disposition relevant de la première partie du PLF - mais vos signatures restent bienvenues - établissant un moratoire d'un an sur la baisse annoncée du plafond de la taxe pour frais de chambre.
Au total, les dépenses d'intervention du programme 134 s'élèvent à 289,3 millions d'euros en crédits de paiement et 278,7 millions en autorisations d'engagement, soit une baisse respective de 17,8 % et 21,2 %. Ces dépenses sont concentrées sur deux mesures qui représentent à elles seules 72 % du total : la compensation au titre de la mission de service public de transport postal pour 103,8 millions d'euros et la compensation carbone au profit des entreprises électro-intensives pour 106,7 millions d'euros.
Les autres dépenses sont très émiettées et diverses : 6,1 millions d'euros pour le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac), 7,6 millions pour l'Association française de normalisation (Afnor), 8,9 millions pour les centres techniques industriels, 14 millions pour les pôles de compétitivité, 8,3 millions pour des actions en faveur du numérique...
Le programme 220 « Statistiques et études économiques », qui assure le financement exclusif de l'Insee, voit ses autorisations d'engagement baisser de 4,3 % et ses crédits de paiement de 2,7 %. Les crédits du programme 305 « Stratégie économique et fiscale » baissent de 2 % en crédits de paiements et en autorisations d'engagement. Enfin, le programme temporaire 343 « Plan France très haut débit » dispose pour la première fois de crédits de paiement à hauteur de 175,8 millions d'euros, ce qui permet de financer effectivement les réseaux d'initiative publique déjà validés, mais les autorisations d'engagement tombent à 5 millions d'euros.
J'en viens maintenant à l'examen de trois points particuliers. Après des années de baisse, le projet de loi pour 2019 sonne le glas du fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac), placé en « gestion extinctive ». Ce fonds serait uniquement doté de crédits de paiement pour un montant de 6,10 millions d'euros, cette somme ayant pour seule ambition d'assurer le paiement d'opérations territoriales ayant fait déjà l'objet de décisions d'octroi de subvention. Mais il n'y aura pas de financement de nouveaux projets en 2019.
Cette extinction est d'autant moins compréhensible qu'elle intervient alors que le Gouvernement a diffusé le 30 mai 2018 un nouvel appel à projets pour bénéficier des sommes du fonds et qu'il présentait jusqu'alors le Fisac comme l'un des instruments financiers au soutien de son plan « Action coeur de ville ».
Certes, en 2019, des crédits non utilisés, initialement affectés à d'anciennes opérations dont le financement s'est finalement avéré moins élevé que prévu, seront mobilisés, ce qui fait qu'au total, les montants réellement disponibles en 2019 pour financer les actions engagées préalablement devraient être de l'ordre de 16 à 18 millions d'euros.
Mais cet arrêt définitif du Fisac est d'autant moins acceptable que le Sénat avait au contraire souhaité en faire l'un des éléments de la reconquête commerciale des centres villes. La proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres villes et centres bourgs, adoptée le 14 juin dernier - à l'unanimité - prévoyait en effet d'élargir l'objet du fonds tout en fléchant prioritairement ses crédits vers les communes ayant adhéré à une opération de revitalisation locale.
Certes, la compétence économique des régions fait de ces dernières les premiers acteurs du développement local et, le cas échéant, de la redynamisation artisanale ou commerciale. Mais l'État ne doit pas pour autant se priver d'un outil d'intervention qui peut permettre d'assurer des aides ponctuelles et ciblées dans un objectif de complémentarité, voire de rééquilibrage, d'une action locale défaillante faute de crédits disponibles.
Lors de leur audition, les représentants de la direction générale des entreprises ont soutenu que l'extinction du Fisac ne remettrait pas en cause le bon achèvement du plan « Action coeur de ville », qui compte 5 milliards d'euros mobilisés sur 5 ans. C'est évident. Cependant, par nature, l'opération « Action coeur de ville » ne bénéficiera pas à l'ensemble des villes moyennes ni surtout aux centres bourgs qui peuvent être dans une situation de dévitalisation commerciale avancée.
C'est donc pour ces territoires fragiles, où le maintien parfois d'un unique commerce permet d'assurer l'animation du bourg ou du village, que le Fisac s'avère un instrument essentiel. Il est d'autant plus important qu'il puisse être maintenu qu'il n'est pas acquis que les collectivités territoriales concernées puissent compenser la suppression des crédits de ce fonds par une augmentation à due concurrence de leurs propres subventions.
Dans ces conditions, je vous proposerai un amendement afin d'ouvrir des crédits d'engagement pour 2019, destiné à assurer la pérennité du Fisac en le dotant de 30 millions d'euros, tant en crédits de paiement qu'en autorisation d'engagement - amendement identique à celui que la commission des finances a adopté la semaine dernière. Il prélève les sommes nécessaires à égalité sur les programmes 220 « Statistiques et études économiques » et 305 « Stratégie économique et fiscale », en fléchant 5 millions d'euros pour les petites stations-services.