Intervention de Jean-René Lecerf

Réunion du 18 octobre 2007 à 10h00
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf :

Je voulais simplement dire par là que la volonté de changer la prison n'était pas un rêve de naïf, mais qu'elle était une ardente obligation, unanimement partagée et rendue possible par les progrès considérables, trop souvent passés sous silence, accomplis ces dernières années, tant dans les mentalités des uns et des autres que dans la qualité du personnel de l'administration pénitentiaire.

En adoptant aujourd'hui, sans doute de manière définitive, le projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté, nous franchissons une nouvelle étape. Je me réjouis que le Sénat et l'Assemblée nationale aient travaillé dans le même état d'esprit et uni leurs efforts pour améliorer le texte qui leur était proposé, les députés approuvant et confortant les modifications apportées par les sénateurs. Comment s'en étonner, si l'on se remémore l'étroit parallélisme des bilans de l'état de nos prisons que les deux assemblées avaient dressé en 2000, dans leurs commissions d'enquêtes respectives ?

Sans doute, des avancées restaient encore possibles. J'aurais préféré, par exemple, que l'avis de la commission des lois de chacune des deux assemblées, préalable à la nomination du contrôleur général par décret du Président de la République, soit exprimé à une majorité qualifiée suffisamment compréhensive pour englober l'opposition. Je fais confiance aux présidents des deux commissions des lois pour rechercher ce consensus et je souhaite l'entrée en vigueur rapide de cette réforme.

Notre rapporteur, Jean-Jacques Hyest, a raison de rappeler toute l'importance qui s'attache au choix de la personnalité appelée à exercer ces fonctions, afin d'asseoir le magistère moral de la nouvelle autorité. Cette association nouvelle du Parlement et du chef de l'État, que Nicolas Sarkozy souhaite développer pour la nomination aux plus hautes responsabilités, apportera un souffle nouveau à notre République et fera partie, je l'espère, des aspects essentiels de la réforme constitutionnelle à venir. Elle contribuera aussi à montrer qu'au-delà des différences de sensibilité naturelles, légitimes, voire nécessaires dans une démocratie, il existe aussi des passerelles et des points de convergence entre les uns et les autres.

La confiance exprimée par la représentation nationale, dans sa globalité, envers celles et ceux qui seront amenés à exercer d'éminentes responsabilités confortera encore leurs chances de réussite et les protégera des turbulences liées aux alternances politiques.

Madame le garde des sceaux, vous le savez mieux que quiconque, la réforme de nos prisons n'est pas une réforme comme les autres. Elle ne doit pas opposer majorité et opposition, mais les réunir étroitement, car elle puise ses fondements dans le souci absolu de la dignité humaine.

Les débats qui s'organiseront autour de la prochaine loi pénitentiaire sont lourds de sens : traduction dans notre droit positif des règles pénitentiaires européennes, prise en compte des mesures et sanctions pénales tant en milieu fermé qu'en milieu ouvert, développement des alternatives à l'incarcération, respect du droit, bafoué depuis plus de cent trente ans, quant à l'encellulement individuel, nouvelle appréhension, beaucoup plus ambitieuse, de la formation professionnelle et du travail des détenus, attention renouvelée portée à la maladie mentale en prison et à son traitement, meilleure reconnaissance de la qualité du travail si complexe des personnels de l'administration pénitentiaire. Voilà quelques thèmes importants, même s'ils ne sont pas exhaustifs.

Alors que certains commentateurs redoutent que la grande loi pénitentiaire attendue ne se transforme en catalogue de voeux pieux, sans prise sur la réalité carcérale au quotidien - on peut les comprendre quand on sait qu'il y a urgence en ce domaine depuis deux cents ans ! -, nous comptons sur vous, madame le garde des sceaux, pour que nos espérances unanimes ne soient pas déçues. Vous savez que vous pouvez compter sur notre concours, certes vigilant et exigeant, mais déterminé et sans partage.

Dans cette attente et puisqu'à chaque jour suffit sa peine, même s'il n'est pas inutile de remettre les réformes en perspective, c'est avec enthousiasme que le groupe de l'UMP adoptera ce projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté.

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