Intervention de Cyril Pellevat

Commission des affaires européennes — Réunion du 15 novembre 2018 à 8h30
Économie finances et fiscalité — Nouveau programme d'investissement pour l'europe investeu : proposition de résolution européenne et avis politique de mm. didier marie et cyril pellevat

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat, rapporteur :

Dans le projet de cadre financier pluriannuel 2021-2027, la Commission européenne a prévu de poursuivre l'expérience positive du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) mis en place en 2015. Tout en reprenant les principes du FEIS, son successeur, InvestEU, lui apporte de substantielles améliorations.

Le bilan du plan Juncker est positif tant pour l'Union en général que pour la France. Il avait pour but de relancer les investissements stratégiques dans l'Union européenne en s'appuyant sur le FEIS, un outil à fort effet de levier. Il devait atteindre trois objectifs stratégiques. D'abord, stimuler l'investissement, en s'assurant que les ressources publiques, limitées par nature, soient utilisées pour mobiliser l'investissement privé, en ciblant les défaillances du marché. Puis, renforcer la compétitivité en améliorant l'environnement en matière d'investissement, tant au niveau européen que dans chaque État membre. Enfin, favoriser la croissance économique à long terme.

Le but était de mobiliser 315 milliards d'euros d'investissements entre 2015 et 2017, avec un effet de levier de 15, grâce à la garantie que le Fonds apporte aux investissements les plus risqués qui, sans cela, ne trouveraient pas de financement. Le Fonds est géré par la Banque européenne d'investissement (BEI), qui est un acteur essentiel du plan.

Ce plan a financé deux grands types de projets. D'une part, des grands projets portant sur les secteurs d'avenir comme les infrastructures - transport, haut débit, énergie, numérique - , ayant pour objet de développer l'utilisation plus efficace des ressources et des énergies renouvelables, ou soutenant la recherche et l'innovation. D'autre part, des projets innovants portés par des PME, pour du capital et des micro-crédits, ou des ETI, avec des crédits de financement pour les projets de recherche et développement et du capital-risque pour les prototypes. Le Fonds européen d'investissement (FEI) apporte sa garantie aux banques nationales de développement, qui sont la Caisse des dépôts de consignations (CDC) et Bpifrance pour la France.

Les projets doivent répondre à plusieurs critères d'éligibilité. Ils doivent être viables sur les plans économique et technique et compatibles avec les politiques de l'Union en matière de croissance intelligente, durable et inclusive, de création d'emplois de qualité et de cohésion économique sociale et territoriale. Le principe d'additionnalité impose que le projet ne puisse être financé via les circuits traditionnels sans la garantie du FEI. Les projets doivent maximiser la mobilisation de capitaux du secteur privé et être ciblés sur des secteurs déterminés, comme la recherche, l'énergie, les équipements de transport, les PME et ETI, les technologies de l'information et de la communication, l'environnement, ou la promotion du capital humain, de la culture et de la santé.

La France est le principal bénéficiaire en valeur absolue du plan, devant l'Italie et l'Espagne. Ont ainsi pu être financés des réseaux numériques très haut débit, dans le Nord et le Grand Est, des fonds d'infrastructures - comme Gingko pour la dépollution des friches industrielles, Capenergie 3 pour l'efficacité énergétique et les renouvelables, ou TRI en Nord Pas-de-Calais, qui accompagne la transition énergétique et le numérique - et des projets de transition énergétique. Le volet social, par contre, est en retard. Au terme de la première phase du plan Juncker, en juillet 2018, 144 opérations avaient été approuvées en France, représentant un total de 50 milliards d'euros d'investissements et mobilisant 10 milliards d'euros d'engagements financiers de la BEI. En tout, 60 000 entreprises ont bénéficié d'une garantie Juncker et plusieurs fonds d'investissement ont été mis en place, notamment en matière d'infrastructures et à l'appui de la transition énergétique.

Forte de ce succès, la Commission européenne a proposé en 2016 la prorogation du Fonds. Après d'âpres négociations sur le financement de la garantie et la gouvernance du comité de pilotage du FEIS, le doublement de la durée du plan a été décidé fin 2017. Le FEIS 2 a été porté de 21 milliards d'euros à 33,5 milliards d'euros. Quant à la garantie, elle a été relevée de 16 à 26 milliards d'euros.

Il a également été décidé de se concentrer sur les investissements durables afin de contribuer à atteindre les objectifs de l'accord de Paris. Une amélioration de la couverture géographique, notamment dans les régions les moins développées, y compris les régions ultramarines périphériques, était en outre préconisée. De nouveaux secteurs ont été introduits, en particulier la pêche et l'agriculture durables, et une place a été faite aux plus petits projets, grâce à la réduction de la taille des projets éligibles et à la mise en place de plateformes d'investissement régionales sectorielles, comme en Occitanie, en Normandie et à La Réunion. Enfin, l'accent a été remis sur la nécessaire additionnalité des financements garantis et sur le caractère risqué des projets retenus, afin d'écarter l'effet d'aubaine dénoncé par certains.

Notre commission a suivi avec attention la mise en oeuvre du plan. Au cours des quatre dernières années, elle a proposé au Sénat trois résolutions européennes et avis politiques, mettant particulièrement l'accent sur le rôle que les collectivités territoriales, et singulièrement les régions, doivent jouer dans la mise en oeuvre du plan et la place à donner aux projets portés par des PME et des TPE. Il y a un an, Didier Marie et moi-même, nous vous avons présenté une communication sur la prorogation du plan.

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