Intervention de Fabien Gay

Réunion du 20 novembre 2018 à 21h30
Conditions de mise en œuvre de l'accord économique et commercial global ceta — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Fabien GayFabien Gay :

… et, même si l’Union européenne a toute compétence pour ces négociations depuis le traité de Lisbonne, la question de l’association des parlements nationaux reste, selon nous, un enjeu majeur.

Le CETA, signé le 30 octobre 2016, est entré en vigueur de manière provisoire le 21 septembre 2017 pour sa partie relative aux barrières tarifaires. Nous devions nous prononcer sur la question des barrières non tarifaires, car celles-ci modifient profondément les législations européenne et nationale. Or comment serait-il possible d’appliquer un accord sur la partie tarifaire sans que la partie non tarifaire en soit affectée ?

Par exemple, nous venons d’adopter la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dont les mesures restent pourtant, selon nous, assez timides, au travers de laquelle nous demandons à nos agriculteurs un mieux-disant social et environnemental. Or, du côté canadien, les experts insistent sur l’absence de garanties concernant les farines animales, les antibiotiques comme activateurs de croissance, l’étiquetage des produits contenant des OGM et le type et les niveaux de pesticides autorisés. Le Canada autorise encore quarante-six substances actives qui ont été interdites depuis longtemps dans les autres pays.

On nous objectera, monsieur le secrétaire d’État, que les quotas d’importation de viande de bœuf – 35 000 tonnes – et de porc – 75 000 tonnes – ne sont pas atteints, mais ce n’est en rien surprenant, les hormones étant autorisées dans l’élevage au Canada ; la mise en place d’une filière sans hormones, destinée à l’export, prend du temps. Pour autant, « sans hormones » ne signifie pas sans antibiotiques ni sans mauvais traitements. De plus, l’Union européenne et le Canada ne sont pas d’accord sur la reconnaissance automatique de leurs standards phytosanitaires. Enfin, les contingents canadiens atteindront leur plein potentiel en 2023, conformément à cet accord.

Il s’agit d’une concurrence déloyale pour notre agriculture et de la mort, à terme, de notre agriculture paysanne. Vous le savez, il est impossible de préciser sur l’étiquette si le bœuf est ou non traité aux hormones. Comment savoir, par exemple, si le saumon nourri aux OGM de la société AquaBounty ne se retrouvera pas un jour dans nos assiettes ?

Les risques ne sont donc pas écartés, et nous ne pouvons pas ne pas les évoquer. Nous parlons de risques, mais le climat est le grand oublié de ce traité. Un rapport commandé par les gouvernements prévoyait une hausse des émissions de gaz à effet de serre, du fait de l’augmentation de 7 % du trafic maritime entre l’Europe et le Canada, et de la promotion des investissements dans des industries polluantes, telles que celle du pétrole issu des sables bitumineux. Sommes-nous donc toujours coincés dans la logique « pas chez moi, mais ailleurs, pas de problème, allez-y, polluez ! » ? Nous bannissons ou nous atténuons ici des pratiques pour les encourager ailleurs, en les cautionnant par l’importation !

Alors que les émissions de gaz à effet de serre ont de nouveau augmenté en 2017, de 3, 2 %, nous voudrions poursuivre ce mouvement destructeur ? Cela n’a absolument aucun sens.

Nous n’avons pas non plus de nouvelles concernant le veto climatique annoncé voilà un an.

Bref, les incohérences sont flagrantes, sans parler de l’actualité, comme le forage offshore ou le projet Montagne d’or en Guyane. Votre slogan, c’est définitivement : « Make our business great again ».

Mes chers collègues, je m’adresse maintenant à vous ; jusqu’à quand allons-nous laisser l’exécutif nier aux parlementaires le droit de se prononcer sur le CETA ? Ce traité a été ratifié du côté canadien et par le Parlement européen. Chacun des États membres devait ensuite le ratifier, ce qu’ont fait la Lituanie, la Lettonie, le Danemark, la Croatie et le Portugal. En France, la ratification devait intervenir un an après la mise en œuvre provisoire. Nous y sommes, et pourtant aucune date à l’horizon !

Même situation en Italie, où le Gouvernement avait indiqué son opposition au traité. Pour autant, il tarde, sous la pression de l’Union européenne, à le soumettre à ratification. Est-ce pour cette raison, monsieur le secrétaire d’État, que nous n’avons pas encore eu à nous prononcer ? Pour laisser le temps au gouvernement italien de trouver les moyens d’approuver ce traité, afin de ne pas compromettre son adoption ? En effet, rappelons-le, il suffit qu’un seul des États membres le rejette pour que cet accord tombe de lui-même. Monsieur le secrétaire d’État, une vraie question : quand aurons-nous la date de la ratification de ce traité ?

J’irai même plus loin, nous, sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que les parlementaires européens communistes, des associations et des citoyens, proposons d’organiser un référendum sur le CETA

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