Je vous propose de dresser un premier bilan, trois ans après la mise en place de la métropole de Lyon. Avant de démarrer, je souhaite excuser le président, qui n'a pas pu se rendre parmi vous ce matin. Nous avons beaucoup travaillé sur le bilan de cette expérience unique en France, qui n'a pas forcément vocation à se démultiplier.
S'agissant du retour d'expérience, je souhaite concentrer mon propos sur trois, ou plutôt quatre points.
En premier lieu, l'efficacité de la gouvernance du territoire. Nous sommes une grande métropole, et nous regardons ce qui se fait à l'échelle européenne, voire mondiale. Force est de constater que le phénomène métropolitain est mondial : 50% du PIB mondial est produit sur 300 métropoles, dont font partie Paris, Lyon et Marseille. Il est particulièrement intéressant d'examiner comment ces 300 métropoles sont gouvernées, ainsi que ce qui fait leur efficacité. Très clairement, un modèle de gouvernance se dégage à deux niveaux. La proximité, en premier lieu : l'ensemble des compétences exercées par la commune et une grande partie des compétences départementales sont entre les mains de l'échelon dit local. La maille supérieure est celle de la région en France, qui trace le schéma directeur et qui porte des compétences à l'échelle du territoire, tel un réseau ferroviaire ou de transport.
Si ce modèle est aujourd'hui très largement majoritaire dans les grandes métropoles mondiales, ce n'est pas un hasard. Il a une efficacité et permet d'aller très vite dans les décisions. Les quatre niveaux de collectivités rencontrés en France trouvent une efficacité indéniable dans un certain nombre de territoires ; toutefois, sur des territoires urbains, des frictions sont possibles, notamment lorsque les exécutifs n'ont pas la même appartenance politique. Ce sont autant de dérives et de freins dans l'exécution des projets.
Aujourd'hui, si Paris a la chance d'avoir deux niveaux de décision, c'est également un gage de son efficacité. Pour Lyon, le fait d'être un financeur passif et non embarqué dans la co-construction ou la co-décision aurait pu être plus un frein qu'un atout. Le dossier du périphérique, par exemple, aurait pu ne jamais voir le jour.
On voit bien combien ces décisions très importantes pour le territoire exigent des consensus complexes à obtenir.
Le deuxième constat est celui de la structure financière de la métropole, qui renvoie à la soutenabilité des dépenses sociales. La dynamique de ces dépenses est très forte, a fortiori dans les territoires urbains, et la structure financière de la métropole (recettes et dépenses de fonctionnement) est très équilibrée. Nous avons des recettes en provenance de la fiscalité directe et indirecte, de l'État, ainsi que des recettes propres liées aux activités. L'équilibre des recettes crée les conditions de leur sécurité et de leur dynamisme. C'est très précieux, comparé à des structures dépenses-recettes d'autres collectivités qui sont trop asymétriques. Certains départements sont ainsi trop dépendants de la conjoncture, et les EPCI sont peut-être excessivement, jusqu'ici, tournés vers la fiscalité économique.
La structure actuelle de nos dépenses-recettes permet d'absorber plus facilement les dépenses sociales. Celles-ci représentent aujourd'hui à peu près un quart de nos dépenses de fonctionnement, pour une moyenne de 50 à 60% des dépenses d'un département en France. Lorsqu'elles progressent de 2, 3 ou 4 points, cela devient très compliqué pour les départements. En 2010, à la demande de Matignon, le directeur général de Michel Mercier avait produit un rapport sur la santé financière des départements deux ans après la crise financière de 2008. Il révélait que les départements avaient beaucoup souffert pour faire face à des dépenses sociales très élevées dans un contexte de recettes atones.
Notre structure financière permet aussi d'affronter plus facilement la contractualisation financière. Comme vous le savez, nous sommes contractualisés à 1,2%, un objectif compliqué, avec la dynamique actuelle des plans sociaux. Même si les AIS sont plafonnés à 2% dans le calcul des 1,2%, il reste que tous les frais d'hébergement ne sont pas plafonnés. Pour un département, respecter le 1,2% est très difficile ; plus de la moitié des dépenses sont à 2%, ce qui signifie qu'aucune augmentation n'est possible pour le restant. Le simple fait que les dépenses sociales ne représentent « que » 25% de nos dépenses nous facilite la tâche.
Par ailleurs, notre pays traverse aujourd'hui un enjeu migratoire majeur. C'est un enjeu mondial qui représente une réelle responsabilité nationale, avec des conséquences avant tout locales. La question des mineurs non accompagnés (MNA) devient un enjeu dépassant le simple cadre de nos responsabilités. Deux chiffres : les MNA, pour la métropole de Lyon, représentaient un budget de 16 millions d'euros en 2015, pour la première année de vie de la métropole, et de 50 millions d'euros pour 2018.